C’est une statue qui aurait pu ne jamais revoir le jour, ou dans un bien mauvais état. L’église Saint-Étienne de Mareil-Marly (Yvelines), construite avec une grande unité architecturale, date du XIIIe siècle. Elle est sauvée une première fois au XIXe siècle, alors que, très dégradée, Eugène Millet, élève d’Eugène Viollet-le-Duc, la restaure. Depuis, les quelques travaux entrepris n’ont pas été à la hauteur des besoins. Des infiltrations n’ont cessé de rendre les murs toujours plus humides, menaçant la stabilité d’un bâtiment construit sur la glaise. Il aura fallu la détermination sans faille et à la persévérance d’une poignée de bénévoles pour que soit entreprise une restauration digne de ce nom. Sept ans auront été nécessaires entre le lancement d’une association de sauvegarde et les premières interventions des restaurateurs, dans le chœur. Tous ceux qui se dépensent sans compter pour notre patrimoine savent ce qu’il faut d’énergie pour faire bouger les mairies et les administrations.
Mais dans le cas qui nous intéresse, il y aura eu bien plus que la protection du bâtiment. Car c’est un trésor qui a été retrouvé à l’occasion de la restauration, commencée en 2017. Deux statues ont été exhumées sous le dallage de l’église, bien à l’abri dans le sable qui en constitue la base. Un évêque, dont la tête n’a pas été retrouvée, et surtout, cette belle statue de saint Étienne, de près de deux mètres de hauteur, dans un excellent état de conservation. La polychromie est d’une étonnante fraîcheur. Des restaurateurs sont intervenus pour éviter que la peinture ne disparaisse après sa mise à l’air libre.
Une véritable prouesse artistique
La composition est remarquable : sur un bloc de pierre dont la largeur est limitée, le sculpteur parvient à raconter une histoire, de façon ramassée. Il montre saint Étienne, reconnaissable à sa dalmatique de diacre, portant un manipule. Son bourreau le frappe d’une pierre (Saint Étienne, le premier des martyrs, a été lapidé) au point que des gouttes de sang perlent de son front. À leurs pieds, celui qui est probablement le commanditaire. Sa taille bien inférieure à celle des autres personnages est le signe, non d’une erreur de perspective, mais de son importance moindre dans cet ensemble.
Dieu le Père, reconnaissable à son auréole crucifère (l’auréole porte en effet une croix dorée) surplombe la scène, avec un geste de bénédiction. Pourquoi ces statues ont-elles été cachées à la vue des paroissiens, sous le dallage ? À quelle date cet enfouissement a-t-il eu lieu ? Rien ne permet de répondre à ces questions, mais laisse espérer qu’en d’autres endroits, des découvertes puissent encore nous émerveiller. La statue a rejoint son église, permettant au plus grand musée de France, constitué par les œuvres d’art conservées dans les églises, de continuer à s’enrichir.