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Les Ursulines de Valenciennes, guillotinées pour n’avoir pas renoncé à enseigner

Martyre des Ursulines de Valenciennes en 1794.

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Anne Bernet - publié le 22/10/23
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Martyres pour n’avoir pas voulu renoncer à « enseigner la religion catholique et romaine », les religieuses Ursulines de Valenciennes pardonnèrent à leurs bourreaux. L’Église fête leur mémoire le 23 octobre.

Les historiens s’entendent pour considérer que la mort de Robespierre, le 28 juillet 1794, marque la fin de la "Grande Terreur". L’affirmation est vraie mais, en certaines régions, les violences révolutionnaires continuèrent de se déchaîner contre les catholiques. Ainsi s’explique le martyre, en octobre 1794, de onze Ursulines de Valenciennes, auquel l’on tenta de donner une justification politique. Dans les départements du Nord, le tribunal révolutionnaire s’est montré impitoyable, la proximité des frontières et des armées autrichiennes fournissant un prétexte aux exécutions de supposés ennemis de la République. Thermidor semble avoir mis un coup d’arrêt à cette politique, certains juges de la veille se retrouvant à leur tour en prison et menacés de connaître le sort qu’ils ont infligé à tant d’innocents. Cet apparent apaisement, après de longs mois d’angoisse, incite à un optimisme prématuré.

Des religieuses enseignantes

Parmi les nombreuses communautés religieuses de Valenciennes, il s’en trouve une spécialement aimée, celle des Ursulines, religieuses enseignantes qui se consacrent à l’éducation des filles. Fondé en 1654 par les maisons de Mons et Namur en Belgique, leur couvent a été fermé le 1er octobre 1792, en application de la loi sur la suppression des ordres religieux et surtout de la menace que ces supposés collaborateurs de l’envahisseur autrichien pourraient faire peser sur la ville. Sommée de vider lieux, la supérieure, Mère Saint François de Borgia, dans le monde Marie-Clotilde Paillot, ne voulant pas voir la communauté dispersée, décide que ses filles, à l’exception de cinq sœurs âgées ou malades autorisées à rentrer dans leurs familles, chercheront refuge au couvent de Mons : choix fatal car se rendre à Mons, en terre étrangère, équivaut à émigrer, ce qui, en cas de retour en France, est passible de la peine de mort… 

En mettant le pied sur la première marche de l’échafaud, Laurentine déclare : "Voici le premier degré du Ciel !"

Les défaites républicaines font que, fin juillet 1793, après trois mois de siège, Valenciennes capitule. Maîtres de la ville, les Autrichiens autorisent les communautés religieuses à se reconstituer. Le 11 novembre, les Ursulines rentrent et reprennent leurs activités. Cette trêve dure aussi longtemps que l’occupation. En juin 1794, la victoire de Fleurus marque le début de la contre-offensive française et, le 29 août, la libération de Valenciennes. À cette date, voilà un mois que Robespierre est mort, de sorte que la supérieure ne s’inquiète pas outre mesure. Elle a tort.

Le vrai crime est d’être rentrées

Dès le 31, elles sont sommées de quitter leur couvent. Les deux tiers obtempèrent mais la supérieure, restée sur place avec une dizaine de sœurs, est arrêtée le 1er septembre. Pour montrer qu’il s’agit bien d’épurer la cité de ses éléments antipatriotiques, l’on recherche activement les absentes et on les arrête à leur domicile. Le motif est une question de sécurité nationale et la commission révolutionnaire s’est muée en commission militaire, mais ses objectifs n’ont pas changé. Courant septembre, les Ursulines sont transférées à l’église de la Chaussée devenue prison, puis séparées en deux groupes, l’un ramené à son couvent, l’autre conduit à l’église Saint-Jean. 116 religieuses et prêtres y sont incarcérés, preuve que les motifs allégués couvrent les mêmes vieilles haines contre l’Église. Les conditions de détention sont horribles, la promiscuité aussi mais elle permet aux sœurs de pouvoir se confesser aux nombreux prêtres emprisonnés et communier.

Nous pardonnons à nos ennemis, nos juges, notre bourreau.

« Nous pardonnons »

Le 17 octobre 1794, trois ecclésiastiques et cinq Ursulines, les Mères Marie-Nathalie de Saint-Louis (Marie-Louise Vanot, 66 ans), Laurentine de Saint Stanislas (Jeanne Prin, 47 ans), Marie-Louise de Saint François d’Assise (Geneviève Ducrez, 37 ans), Marie-Ursule (Hyacinthe Bourla, 48 ans) et Marie-Augustine (Marie-Madeleine Desjardins, 35 ans), sont déférées devant la commission. À la question de savoir si elles ont émigré, elles répondent, comme l’a conseillé la supérieure : "Oui, avec un passeport de la municipalité." Cela ne change rien car le vrai "crime" est d’être rentrées… À la question "pourquoi ?", mères Laurentine et Nathalie répondent "n’avoir eu d’autres vues qu’enseigner la religion catholique et romaine". Cela suffit à les envoyer à l’échafaud. "Elles y volent", diront les témoins, en chantant à pleine voix une adaptation de la Marseillaise, "le jour de gloire est arrivé". En mettant le pied sur la première marche de l’échafaud, Laurentine déclare : "Voici le premier degré du Ciel !"

Le 23 octobre, la supérieure, les Mères Marie-Cordule de Saint-Dominique (Jeanne Barrez), Marie Scholastique de Saint-Jacques (Marie-Marguerite Leroux), sa sœur, Anne Leroux, sœur Joséphine, entrée chez les Ursulines après la fermeture de son couvent de clarisses, et sa compagne, sœur Marie-Françoise (Liévine Lacroix), les suivent à la mort en chantant le Magnificat. Leurs derniers mots seront : "Nous pardonnons à nos ennemis, nos juges, notre bourreau." Les onze martyres ont été béatifiées en 1920.

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