Je rencontre beaucoup de personnes ces derniers temps qui sont déboussolées par les scandales qui se répètent dans l’Église. Ces personnes ne sont pas des victimes directes de méfaits commis par des prêtres ou des religieux ; elles ne sont pas non plus coupables de ce qui s’est passé. Mais leur foi est ébranlée par ces événements. Et il y a de quoi ! J’avoue que je n’ai pas toujours les mots pour les aider. J’avoue que, moi non plus, je ne sors pas indemne des sinistres actualités qui mettent en avant la perversité de personnes qui avaient donné leur vie à l’Église.
Des chrétiens déstabilisés
Dans ces moments déstabilisants, il faut dénoncer les crimes, soigner les victimes, réfléchir pour que de telles horreurs ne se reproduisent plus. Mais il faut aussi prendre garde à ne pas se laisser aller au désespoir. Non pas pour se dire que toutes ces révélations ne sont que des mauvais rêves qui finiront par passer ; mais pour avoir la force d’aller de l’avant et retrouver la saveur de l’Évangile qui, seul, nous permettra de surmonter ces terribles difficultés.
Sur ce chemin, j’ai été aidé par l’exemple de grand(e)s saint(e)s. Même si chaque époque est différente, des chrétiens, dans le passé, ont déjà vécu des moments où tout semblait s’écrouler dans la vie de l’Église. Saint Dominique est de ceux-ci. Au XIIIe siècle, il a été confronté à une grave crise dans l’Église de son temps. Je crois que son attitude peut nous inspirer trois pistes pour, nous aussi, rester debout quand tout semble chavirer dans l’Église.
Première piste : oser pleurer
Les premiers frères dominicains rapportent qu’ils entendaient saint Dominique pleurer la nuit dans la chapelle. Des larmes accompagnaient sa prière. Il pleurait pour les péchés du monde, pour les souffrances de l’Église, déchirée par les divisions et la médiocrité de sa réponse aux appels du Seigneur.
Voilà un premier exemple à méditer. Quand tout semble s’effondrer dans l’Église, Dominique nous invite à prendre le temps de considérer notre peine. Peut-être même de nous laisser aller à pleurer. Cette peine signifie que nous ne sommes pas indifférents, que les drames qui déchirent l’Église nous touchent parce que, au plus profond de nous, nous aimons l’Église. Ce n’est pas rien que de le constater.
Deuxième piste : connaître ses racines
Les témoins de la vie de saint Dominique rappellent qu’il a été un homme bien enraciné dans sa foi. Il avait reçu une solide formation dans la terre d’Espagne qui l’a vu naître. Cette formation était intellectuelle, mais pas seulement. Elle était aussi faite de rencontres avec des croyants qui l’ont marqué, avec des personnes en attente de la Parole de Dieu.
Regarder nos racines, c’est nous rendre compte que nous désirons que le message de l’Évangile continue à retentir dans le monde parce qu’il est d’une richesse incomparable.
Quand tout semble s’écrouler dans l’Église, il est bon de revenir, comme saint Dominique, à nos racines : à tel texte biblique important pour nous, à tel événement fondateur pour notre parcours de foi, à telle personne dont la foi nous a porté. C’est là le deuxième conseil que la vie de Dominique nous donne : faire mémoire de nos racines pour réaliser combien notre foi a fait de nous des personnes belles. Regarder nos racines, c’est nous rendre compte que nous désirons que le message de l’Évangile continue à retentir dans le monde parce qu’il est d’une richesse incomparable.
Troisième piste : être vainqueur du mal par le bien
Saint Dominique a été confronté à des prêtres et des évêques qui n’étaient pas à la hauteur de leur mission, notamment parce qu’ils vivaient d’une manière trop riche. Ils choquaient, par leur mode de vie, de nombreux chrétiens qui quittaient l’Église. Dominique a alors proposé une nouvelle forme de vie religieuse — centrée sur la pauvreté et la mendicité — plus inspirée de l’Évangile.
Quand tout semble s’écouler dans l’Église, saint Dominique nous rappelle qu’il faut certes nommer ce qui ne va pas. Mais il ne faut jamais se laisser écraser par le mal. Il convient d’inventer de nouvelles voies, inspirées par l’Évangile et la Tradition de l’Église, qui permettent de sortir de la crise. Nous pouvons tous le faire à notre niveau pour ne pas nous laisser fasciner par le mal mais nous engager à le vaincre avec la créativité que donne l’Esprit saint.
Il y a de quoi être ébranlé par le visage de l’Église que les scandales qui se succèdent dévoile. Mais, avec Saint Dominique, il nous faut retrouver la joie de croire et d’annoncer l’Évangile. C’est à partir de cela que nous pourrons rebâtir ce qui doit l’être dans l’Église et nous engager à ce que sa mission ne soit plus dénaturée.
Pratique