En Grèce, aux confins du Péloponnèse, se situe un minuscule village du nom de Vasta. Minuscule, il l'est vraiment : il ne compterait en tout qu'une soixantaine d'habitants. Reculé, il l'est aussi, puisqu'il est perché à quelque 800 mètres d'altitude. Intriguant, enfin, puisqu'il dispose d'une chapelle byzantine et millénaire dont la spécificité est telle qu'elle lui a valu d'être inscrite dans le Guinness des records, qui la qualifie même d'église "miraculeuse". La raison en est simple : de son toit mince s'échappent dix-sept grands arbres dont la plupart mesurent au moins 30 mètres de haut et certains pèsent plus d'une tonne. Plus étonnant encore, ces arbres majestueux ne sont en aucun cas visibles à l'intérieur de la petite chapelle.
Construite au XIIe siècle, à l'époque byzantine, elle est dédiée à une sainte orthodoxe du nom de Théodora, vénérée en Grèce. Les informations sur sainte Théodora de Vasta sont rares et l'époque lointaine à laquelle cette dernière a vécu empêche d'affirmer avec exactitude la véracité des faits rapportés par la croyance populaire.
On sait cependant que Théodora a vécu au Xe siècle dans cette région de la Grèce, entre l'Arcadie et la Messénie. Née dans une famille pauvre, elle avait deux sœurs. N'ayant pas de garçon, les parents de Théodora devaient payer pour permettre le recrutement d'un conscrit dans l'armée byzantine mais n'en avaient guère les moyens. Afin de leur épargner cet effort et de préserver son père, Théodora, jeune femme belle et vertueuse, prit l'habit masculin et se fit passer pour un homme sous le nom de Theodoris, avant d'entrer dans l'armée pour défendre un monastère voisin. Elle y gagna, tant par son courage que par sa foi fervente et sa pureté, l'admiration de tous.
Que mon corps devienne une église, mes cheveux une forêt d'arbres et mon sang un fleuve pour les arroser
Mais une femme qui partageait la couche de plusieurs soldats porta un jour de faux témoignages contre Théodora, qu'elle pensait être un homme. Elle l'accusa de l'avoir déshonorée et mise enceinte, et de ne pas vouloir l'épouser. Traduit en cour martiale, "Théodoris" rejeta les accusations portées contre lui, mais choisit de ne pas révéler sa véritable identité, se sachant perdu d'avance, puisque le refus d'épouser une jeune fille pour rétablir son honneur souillé signifiait la condamnation à mort. Au moment de mourir, Théodora aurait alors formulé cette prière :
"Seigneur, fortifie ma résolution. Je quitte la vie sans avoir vécu ses joies. Je te rends grâce, car tu m'as toujours donné la force de paraître forte. Tu m'as glorifiée par ta grâce et ta puissance. Ma pureté sera gardée encore un peu. Réconforte mon père, ma mère et mes sœurs. Pardonne à cette femme, car elle devra faire face à une situation difficile lorsque la vérité sera révélée. Je voudrais que cela arrive non pour montrer ma vertu, mais pour que ton nom soit glorifié. Aide-moi Seigneur, à recevoir avec honneur mon martyre et à accepter ce sacrifice comme manifestation de ma gratitude. Seigneur, fais pousser des arbres sur ma tombe pur témoigner de ta protection de ma pureté, et que mon sang devienne l'eau pour arroser ces arbres. Amen."
Après sa mort, et une fois la véritable identité de Théodora révélée, une petite église fut construite sur le lieu de son exécution, et une petite rivière passe encore aujourd'hui sous l'église. Dix-sept arbres se mirent à pousser de telle sorte que pendant longtemps, personne ne put expliquer ce phénomène. Théodora est considérée comme une Vierge martyre et serait à l'origine de plusieurs miracles après la venue de nombreux pèlerins sur les lieux pour la vénérer. Elle est fêtée par l'Église orthodoxe le 11 septembre.