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Durant la Semaine sainte, regarder le monde en face

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Xavier Patier - publié le 05/04/23
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Quand la société s’installe dans la fuite, constate l’écrivain Xavier Patier, le temps pour les chrétiens n’est pas de fuir ni de s’endormir. Le combat du chrétien est de regarder le monde en face et d’accepter la croix.

À observer le flot toujours nouveau et toujours semblable des catastrophes qui nourrissent la jouissance amère des journaux et la passion triste des chaînes d’information, je ressens de plus en plus l’impression d’appartenir à une autre planète. Je ne suis plus chez moi dans ce monde-là. Il ne m’intéresse plus. J’ai trop affaire ailleurs. Ma campagne m’occupe entièrement en cette saison d’agnelage et de semis. Le premier lézard qui prend le soleil sur la pierre du perron me captive plus que toute la politique. Mais un chrétien a-t-il le droit de se désintéresser de l’humanité ? Vieille tentation : cesser de regarder le drame pour ne plus en souffrir. Couper la télévision, mais couper aussi son cœur.

La tentation du désert

Car il n’y a pas que des intentions pures dans les décisions que nous prenons de nous retirer au désert. Nous y retrouvons immanquablement les tentations éternelles, libido sentiendi, libido scienti, libido dominandi ("la jouissance des sens, du savoir, du pouvoir"), que Pascal appelait les trois fleuves de feu, fleuves qui ne cessent de déborder sur le monde sans étancher aucunes de nos soifs, et semblent ne féconder que l’enfer médiatique. Le Christ au désert ne les a pas vaincues sans combattre. 

Regardons en face notre civilisation : elle installe la fuite comme sa valeur suprême.

À l’approche de la Passion, il importe de nous souvenir que le Christ se retirait au désert pour prier, c’est-à-dire pour regarder le monde en face et non pour le fuir. Regardons en face notre civilisation : elle installe la fuite comme sa valeur suprême. Lisons jusqu’au bout ce que nous préparent les programmes politiques : fuyons notre genre, fuyons notre héritage, fuyons notre destin, fuyons notre corps, fuyons notre vie. Sauve qui peut général."Pour le chrétien, l’euthanasie ne pose aucune question", disait Mauriac, qui ajoutait : "Quelle que soit la croix où notre destin nous cloue, nous savons que nous ne devons pas en descendre avant l’heure. Cette croix que nous adorions en paroles, voici le moment de nous y étendre avec le Fils de l’Homme." Paroles insupportables dans la civilisation de la fuite. Paroles à méditer au moment de la montée vers Pâques, pourvu que nous ne nous endormions pas.

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