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Un gouvernement sans famille

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Blanche Streb - publié le 13/06/22
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L’absence d’ambition politique en faveur de la famille de la part du nouveau gouvernement révèle une vision de la société purement individualiste. Alors que la société se divise de plus en plus, Blanche Streb, directrice de la recherche d’Alliance Vita, montre que la lente dégradation de la politique familiale affaiblit structurellement la cohésion sociale.

Le deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron s’ouvre sans ministère chargé de la Famille. 79% des Français vivent en famille, comme l’ont fait remarquer les AFC, mais cela n’intéresse guère le gouvernement. Qu’en pensera la nouvelle Assemblée nationale ? Les premiers décrets d’attribution des nouveaux ministères accordent la politique "relative à la famille" au ministre des Solidarités… et "l’Enfance" à un secrétariat d’État rattaché au Premier ministre. Doit-on comprendre que le sort des enfants dépend davantage de l’État que de leurs parents ? Et pourtant, natalité en berne, séparations, difficultés économiques, recul de l’âge de la maternité… l’enjeu politique de la famille demeure devant nous. 

Le désir d’enfant reste fort en France, comme l’atteste une récente enquête réalisée pour l’Union nationale des associations familiales (Unaf) qui montre que plus des deux tiers des personnes ayant eu un enfant en auraient voulu au moins un de plus. C’est aussi le cas de 23% des personnes ayant eu deux enfants. Pourtant, nous sommes désormais en dessous du seuil de renouvellement des générations. L’indice de fécondité, subissant une baisse continue, est de 1,83 enfant par femme en 2021, quand il était à 2 enfants en 2014. 

Perte de confiance

La dégradation constante de la politique familiale ces dernières années, allant de la modulation des allocations familiales, aux modifications du quotient familial, à la réforme du congé parental — provoquant une baisse de 43% du nombre de bénéficiaires — ont fragilisé considérablement la confiance des Français dans la politique familiale de leur pays tout en aggravant leurs difficultés. La conciliation entre vie professionnelle et familiale reste difficile. Le recul de l’âge de la maternité — dont les causes sont multiples — explique aussi cette baisse de la fécondité. L’âge moyen pour un premier enfant est désormais de 28,5 ans, attestant un recul d’un an chaque décennie depuis quarante ans. Or malheureusement, les risques d’infertilité augmentent avec l’âge. La démographie est au cœur des enjeux d’avenir de la société française. Un rapport du Haut-Commissaire au plan plaide pour un pacte national pour la démographie, afin de sauver le modèle social français, et affiche parmi ses objectifs celui d’avoir plus d’enfants.

L’impact des séparations

Un autre sujet mériterait toute l’attention de notre politique familiale. Celui du soutien aux couples qui traversent des difficultés. Car la stabilité des couples a un impact positif sur le bien-être et l’épanouissement des personnes, en particulier celui des enfants. Même si en France, plus de sept enfants sur dix vivent avec leurs deux parents, de plus en plus de jeunes sont touchés par des ruptures familiales, rendues inévitables dans certains contextes, notamment ceux liés à la violence. En 2020, 380.000 mineurs étaient concernés. Un chiffre qui a plus que doublé en moins de trente ans. Or, les séparations ont d’indéniables conséquences : sur les liens entre les parents et les enfants, la santé physique et émotionnelle, les parcours scolaires… Mais aussi évidemment sur le niveau de vie. 

Triste paradoxe, actuellement, la politique familiale soutient la médiation familiale en cas de séparation. En revanche, rien n’est fait pour soutenir les couples et encourager la fidélité.

Les chiffres font mal : un tiers des foyers monoparentaux vivent sous le seuil de pauvreté, et après une séparation, on enregistre en moyenne 20% de perte de niveau de vie pour une femme. La monoparentalité pèse grandement sur le budget des familles, même si heureusement, notre pays soutient financièrement ceux qui traversent cette difficulté. L’impact sur les budgets publics est conséquent. Or, triste paradoxe, actuellement, la politique familiale soutient la médiation familiale en cas de séparation. En revanche, rien n’est fait pour soutenir les couples et encourager la fidélité. Une certaine culture contemporaine — au travers de sites de rencontres et de publicités — aurait même tendance à présenter l’infidélité comme un acte sans conséquences pour son conjoint et ses enfants, voire comme une opportunité pour booster son couple. Désolant… 

Soutenir la stabilité

Stratégiquement, la politique familiale aurait tout à gagner à se préoccuper aussi de soutenir la stabilité des unions, quand c’est possible, en proposant des solutions et un soutien concret à tous les couples qui le souhaitent. Une étude menée avec des professionnels de terrain par le réseau Familya et publiée à l’aide du think tank Vers le Haut a conclu de manière très claire que la prévention, « ça marche ». Parmi les couples qu’ils ont accompagnés, les professionnels relèvent une baisse de la conflictualité, une amélioration de la qualité de la relation et constatent que les trois quarts de ceux qui envisageaient une séparation y ont finalement renoncé. La société doit bien sûr aider et soutenir les familles, car chaque fois que l’une d’elle se déchire, c’est un peu de souffrance, de désillusion, de violence, d’insécurité affective, sociale et économique qui se dilue dans la société toute entière. Mais elle doit aussi en respecter la souveraineté. Les attaques contre elle ne manquent pas, fragilisation du mariage, de l’autorité parentale, exacerbation de l’autonomie et de l’autodétermination, interdiction de l’école à la maison… 

Le défi politique du quinquennat qui s’ouvre ne pourra faire l’économie d’une politique familiale ambitieuse, politique préservant la famille, les couples, la subsidiarité, l’intérêt supérieur de l’enfant et l’écologie — écosystèmes et temporalité — du corps féminin. Il est plus que jamais essentiel de reprendre conscience de la contribution essentielle et spécifique de la famille, cellule fondamentale de la société, à la constitution du lien social et politique. 

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