Quand vous tapez « prière contre les angoisses », le moteur de recherche vous apportera probablement parmi ses premières réponses « l’acte d’abandon à Jésus ». Si beaucoup connaissent la prière qui en fait partie : « Oh Jésus, je m’abandonne à toi, à toi d’y penser pour moi », peu savent qui est son auteur ou, plus précisément, qui a écrit son texte révélé, avancent certains, par Jésus lui-même lors d’une vision mystique.
Capucin napolitain, ami de Padre Pio et portant comme lui des stigmates du Christ, don Dolindo Ruotolo était un confesseur très recherché, le maître spirituel pour des milliers de fidèles. Dès sa mort, le 19 novembre 1970, sa dévotion s’est très vite répandue partout dans le monde, à la mesure des grâces dont de nombreux chrétiens témoignent. Les foules qui se recueillent chaque jour devant son tombeau et des centaines d’ex-voto en sont la preuve impressionnante.
Fascinée par cet aura du mystique italien, Joanna Bątkiewicz-Brożek, journaliste, traductrice et auteure polonaise, décide en 2016 de mener sa propre « enquête ». « En traduisant de l’italien un livre sur sa vie, il y quelques années, je suis tombée sur cette prière de quelques mots : "Jésus, je m’abandonne à toi, à toi d’y penser pour moi". Le fait qu'elle a été directement inspirée par Jésus lui-même m'a vraiment impressionnée. Je voulais comprendre son histoire et celle de don Dolindo", explique-t-elle à Aleteia.
Caché dans les archives
Son enquête la conduit aux archives des Sœurs franciscaines de l’Immaculée à Naples. C’est là que tous les manuscrits du capucin sont gardés. Ce jour-là, elle a rendez-vous avec la religieuse responsable des archives. Une journée qui s’annonce pleine d’émotions : "Alors que je grimpais la via Santa Teresa degli Scalzi vers le lieu où vivait don Dolindo, à côté de l’église de San Giuseppe dei Vecchi, il pleuvait des cordes. Mon ordinateur est tombé deux fois au milieu de la rue… J’avais l’impression que c’était un parcours d’obstacles", se souvient Joanna.
"Émue, je me demandais pourquoi ce privilège allait me toucher moi… Pourquoi c’est moi qui pourrait toucher ce trésor soigneusement gardé ?"
Quand elle sonne enfin à la porte du couvent, une religieuse d’une soixantaine années lui ouvre. Sans attendre, cette dernière confie à la journaliste que depuis la mort de don Dolindo, à l'exception du postulateur du procès en béatification, personne de l'extérieur n’a vu encore le manuscrit de l’acte d’abandon. "Émue, je me demandais pourquoi ce privilège allait me toucher moi… Pourquoi c’est moi qui pourrait toucher ce trésor soigneusement gardé ?", poursuit-elle en décrivant avec précision le moment où le texte a été posé sur une table.
Sur les pages jaunies par le temps, la date du 6 octobre 1940 lui saute aux yeux : c'est le jour du 58e anniversaire du capucin. L’acte d’abandon à Jésus est collé à l’intérieur d’une lettre que don Dolindo adressait à sa fille spirituelle, Elena Montella. Tourmentée, rejetant ses parents, la jeune fille avait croisé le frère capucin le jour de sa confirmation. Ce 6 octobre 1940, le mystique lui avait écrit une lettre de soutien spirituel en y joignant la fameuse prière. Est-ce qu'il pensait qu’un jour tant de personnes allaient la lire et la réciter aux quatre coins du monde ?
"À part l’immense émotion de voir ces pages vieillis par le temps, j'ai été frappée de voir qu'un acte d’abandon aussi puissant, car il s’agit des paroles de Jésus qui changent le destin de milliers de personnes aujourd'hui, ont été écrites en lettres minuscules sur des fiches plus petites que les pages d'un cahier d’école. Pourtant Padre Pio lui-même écrivait à don Dolindo : 'Rien de ce qui sort de ta plume ne doit être perdu !", conclut Joanna, étonnée où son « enquête » l’a finalement menée : en juin 2020 elle a été nommé vice-postulatrice du procès en béatification de don Dolindo. « Je ne sais pas pourquoi cette mission si importante m’a été confiée. Parfois je pense qu’elle me dépasse, mais dans ces moments-là, je dis la prière d’abandon de don Dolindo : « Oh Jésus, je m’abandonne à toi, à toi d’y penser pour moi ».