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L’entrée payante à Notre-Dame ? Une proposition quatre fois choquante

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File d'attente à l'entrée de Notre-Dame

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Henri de Beauregard - publié le 24/10/24
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L’idée de faire payer l’entrée à Notre-Dame de Paris choque l’avocat Henri de Beauregard. Pour des raisons juridique, culturelle, politique et surtout symbolique, il estime que la transformation des cathédrales en musées priverait les Français d’un des rares espaces gratuits ouverts à l’intériorité.

Dans un entretien au Figaro, la ministre de la culture, Rachida Dati, propose de faire payer l’entrée de la cathédrale Notre-Dame de Paris. En 2017, la suggestion avait été lancée par Stéphane Bern. Que penser de cette idée ? La proposition est choquante au plan historique. Parce que cathédrales et églises ont été confisquées à l’Église en 1789, puis gardées en 1905 contre la promesse de leur entretien et de leur mise à disposition gratuite, et qu'il n'est pas trop demander à l'État que de tenir ses promesses. Elle est choquante au plan juridique, car l’article 17 de la loi de 1905 dispose expressément que "la visite des édifices ne pourra donner lieu à aucune taxe ni redevance". 

L’accès à ses origines

Elle est choquante au plan culturel, aussi. Cathédrales et églises ont été construites et conçues comme de véritables musées du pauvre, pour proposer la foi bien sûr, mais aussi pour offrir la culture au plus grand nombre, car la beauté est un catéchisme. Dans beaucoup de villages, l’église constitue le seul élément culturel notable au travers duquel l’écolier découvre la peinture, l’iconographie, la sculpture, l’ébénisterie… Les saints représentés : Bonaventure, Guirec ou Louis-Marie, les matières utilisées, granit, tuffeau, chêne ou olivier, disent l’histoire et la géographie du village. Et on ne fait pas payer l’accès à ses origines. Jamais.

Cette proposition est choquante au plan politique, car quoiqu’on en dise, l’État et les villes ont parfaitement les moyens d’assumer ce patrimoine. C’est affaire d’arbitrages politiques. On trouve bien de l’argent pour des choses moins nobles. Les monuments historiques, ce sont 3% du budget de la culture, alors même qu’à mon sens, le premier souci de la culture devrait être celui de la transmission. Et puis, il faut cesser de voir cathédrales et églises comme des coûts alors que ce sont aussi, et probablement d’abord, des revenus et de l’emploi, certes difficiles à évaluer, mais incontestables, à travers le tourisme… Qu’est-ce qui fait vivre Vézelay ou Tréguier ? Et que viennent chercher les touristes qui se pressent dans nos villes ou sur nos chemins de randonnées, sinon, ici, ce clocher typique, et là, ce retable ouvragé ? 

Des espaces gratuits de silence

Mais cette proposition est choquante au plan symbolique, surtout. Pour le fidèle pratiquant, naturellement, mais pas d’abord. Car après tout, lui sait ce qui se passe à la messe, Qui il vient y rencontrer, et il sait que cela vaut bien plus qu’un, dix ou mille euros. Cette proposition est surtout choquante à l'égard de ceux qui ne paieront pas. Et ne viendrons plus. Tous ceux qui, sans confesser une foi affirmée ou une pratique déterminée, éprouvent un jour l’envie ou le besoin d’y entrer, pour y trouver un oasis de silence au milieu de nos villes agitées. Pour y mettre une bougie. Pour y écouter le silence. Pour essayer de s’y retrouver. Pour méditer. Pour confier. Pour s’ennuyer. Dans nos sociétés d’agitation, d’argent, de bruit, c’est un luxe que d’avoir des espaces gratuits de silence et d’ennui. Églises et cathédrales y sont l’un des derniers espaces non-marchands. Un espace qui se propose à tous sans rien vendre à personne. 

Des repères pour tous

Alors plutôt que d’en restreindre l’entrée, je crois qu’il est urgent de permettre aux Français de se les réapproprier, de les proposer, et de les protéger. Pas comme des vestiges : comme des repères. Repères d’identité. D’un quartier. D’une ville. D’un pays. Gage d’humanité, aussi, d’une société qui laisse encore une place, gratuite, à l’intériorité.

[EN IMAGES] Derniers préparatifs avant la réouverture de Notre-Dame :

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