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Le père Bohdan Heleta est ukrainien et catholique. Âgé de 59 ans, il a passé un an et demi en captivité en Russie, après avoir été fait prisonnier avec le père Ivan Levytskyi, 47 ans. Libéré le 28 juin 2024, en même temps que d'autres civils ukrainiens, il a raconté sa détention dans sa première interview télévisée à la chaîne de l'Église gréco-catholique ukrainienne, Zhyve TV. Les deux prêtres exerçaient tous deux leur ministère à l'église de la Nativité de la Sainte Vierge à Berdyansk, une petite ville sur la mer d'Azov, au sud-ouest de Marioupol. Après l'occupation de leur ville par l'armée russe, à partir du 27 février 2022, tous deux ont choisi de rester au plus près des communautés catholiques grecque et romaine. À mesure que les troupes russes avançaient, la ville se vidait, ses habitants se réfugiant vers l'ouest. Puis, c'est Berdyansk qui est devenue une ville refuge, accueillant les déplacés de Marioupol et d'autres villes surexposées aux combats. Ce flux de réfugiés a encouragé les deux prêtres à rester afin de répondre à leurs besoins.
Au début, raconte le père Heleta, les autorités d'occupation ont toléré les activités religieuses et celles du père Levytskyi, notamment un rassemblement régulier pour prier le rosaire. "Nous avons célébré la liturgie, prié et rencontré des gens", déclare père Bohdan. Mais le 16 novembre 2023, alors qu’Heleta s’apprêtait à célébrer la Divine Liturgie (liturgie de l'Eucharistie dans le rite byzantin, ndlr) après des funérailles, "deux personnes masquées" sont entrées dans l’église en armes. "Je suis resté dans l’église, j’ai mis mes vêtements et j’ai prié la Proskomidia ("Prière de la Préparation", dite avant la Divine Liturgie, ndlr). Et au moment où j’ai fini, deux hommes masqués sont entrés dans l’église. Je pense que c’étaient des militaires", se souvient le père Heleta. "Ils portaient des armes et ils se sont approchés et ont dit en russe : 'Venez avec nous'. Je leur ai demandé en ukrainien ce qu’ils voulaient, pourquoi ils étaient entrés dans l’église habillés comme ils l’étaient."
Bien-sûr, le Seigneur Dieu aide et donne de la force par la prière.
Le père Heleta est emmené dans un centre de détention provisoire à Berdyansk. "Là, ils ont dressé un rapport selon lequel le père Ivan et moi avions violé certaines règles. Nous devions demander l'autorisation des autorités pour prier dans la ville. Mais nous faisions cela depuis neuf mois et ils ne nous ont arrêtés qu'à ce moment-là", relève le prêtre. Le père Levytskyi avait déjà été arrêté. Enfermés ensemble avec huit autres personnes dans une cellule conçue pour deux, les deux hommes dorment par terre. Depuis leur cellule, le père Bohdan affirme avoir entendu "des cris" provenant d'une salle "où les gens étaient torturés".
Prisonniers de guerre
Après avoir refusé de collaborer avec les autorités russes, les deux prêtres ont été convoqués séparément dans des pièces filmées pour répondre à des questions. Quatre mois plus tard, "j'ai été convoqué et on m'a dit que des armes avaient été trouvées dans notre église et que je serais jugé et condamné à 25 ans de prison" raconte le père Bohdan. "J'ai demandé où les armes avaient été trouvées, mais on ne m'a pas dit précisément." Transférés dans une autre colonie pénitentiaire, le père Bohdan et le père Levytskyi passent à deux doigts de la folie. Selon le père Bohdan, un haut parleur diffusait toute la journée "des chansons soviétiques". "J’ai alors compris comment une personne devient folle, j’ai compris pourquoi les gens se suicident", témoigne-t-il. "Bien-sûr, le Seigneur Dieu aide et donne de la force par la prière. Dieu, Jésus-Christ, Marie et les anges étaient tous présents. La prière était notre salut. Et j’ai ressenti la prière de l’Église."
Je me souvenais simplement de Jésus-Christ, de sa croix, de ses souffrances, et une telle force et une telle grâce se sont déversées en moi.
Nouveau transfert, à Horlivka (oblast de Donestk, ndlr). Ici, "le père Ivan a été battu si violemment qu’il a perdu connaissance deux fois", dénonce le père Bohdan. "Nous avons été immédiatement rasés et battus très violemment. Ils nous ont donné des uniformes, des numéros, et c’est tout. Et nous voilà prisonniers de guerre, comme tout le monde." Pour le père Bohdan, leur condition de prêtre catholique a renforcé la haine des détenteurs russes. "J’ai conclu que notre Église est pour eux une secte (...) qui s’est séparée de l’orthodoxie (...) qui doit être éradiquée, isolée de la société et purifiée", affirme-t-il en dénonçant un "fanatisme religieux". Tout au long de sa détention, le père Bohdan s'est appuyé sur la prière pour ne pas succomber au désespoir. "Je me souvenais simplement de Jésus-Christ, de sa croix, de ses souffrances, et une telle force et une telle grâce se sont déversées en moi", assure le prêtre. "Quand ils m’emmenaient quelque part, je me préparais déjà intérieurement, je priais et demandais à Dieu de me donner de la force."
Désormais libre, le père Bohdan a déclaré qu'il était déterminé à témoigner de la proximité de Dieu qu'il a ressentie pendant sa détention, et souhaite donner de l'espoir aux familles dont l'un des leurs est toujours détenu. "Je voudrais dire à tous les autres, et surtout à ces familles, à ces mères, à ces épouses (...) de ne pas perdre espoir, de prier, de se tourner vers Dieu, et tout ira bien. Le Seigneur Dieu sait que même à travers ces souffrances, Il ramène tout le monde à Lui."