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Soli Deo Gloria, la véritable signature de Jean-Sébastien Bach

Un rare manuscrit rare du compositeur Johann Sebastian Bach (1685-1750) vendu aux enchères en juin 2016.

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Morgane Afif - publié le 27/07/24
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Le 28 juillet 1750, Jean-Sébastien Bach rendait son âme à Dieu après avoir créé une musique à Sa louange. Tombé dans l’oubli pendant des décennies, son génie s'élève comme une prière. C'est d'ailleurs presque de cette façon qu'il signait ses manuscrits autographes.

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J.S.B. comme Johann Sebastian Bach. Ce n’est pourtant pas de ce monogramme que Jean-Sébastien Bach signait ses manuscrits autographes. Trois autres lettres leur étaient substituées : S.D.G., Soli Deo Gloria. L’expression, elle, est tirée de la Vulgate de saint Jérôme qui traduit ici la première lettre de saint Paul apôtre à Timothée ; “soli Deo honor et gloria in saecula saeculorum” (À Dieu [...] honneur et gloire pour les siècles des siècles, 1 Tim 1, 17). Beaucoup ont voulu traduire la phrase en “à la gloire de Dieu” en se méprenant sur l’usage du datif. Il faut aussi plutôt comprendre “à Dieu seul la gloire”, qui fait référence à l’un des cinq solae qui font le socle de la foi luthérienne, celle-là même qui habitait le compositeur allemand. Celui-ci traduit l’un des fondements du protestantisme, par lequel Dieu seul est digne d’être honoré et glorifié. Le mot prend ici tout son sens : en effaçant son nom derrière ces trois lettres, l’artiste s’efface pour laisser place au seul Créateur car toute et tout œuvre ne viennent que de Lui.

Une foi ardente et une invincible espérance 

Bach n’est pas le seul à signer ainsi ses manuscrits. Haendel en fit le même usage, lui qui composa la très célèbre Sarabande popularisée par la bande originale du Barry Lindon de Stanley Kubrick ou son sublime Hallelujah tiré de son oratorio Le Messie. Bach, connu pour son austérité, a laissé le témoignage d’une foi ardente, comme le prouve l’imposante bibliothèque théologique qui fut retrouvée dans l’inventaire de ses biens à sa mort. “L’importance de cette bibliothèque est tout à fait inhabituelle à cette époque ; elle s’approche des bibliothèques ecclésiales qu’on trouve alors dans les villes saxonnes de moyenne importance et aurait rendu jaloux plus d’un pasteur.” souligne à ce titre Jean-Marc Tétaz, théologien et philosophe dans “Bach et Luther. À propos de la théologie des Cantates de Bach” (in Études théologiques et religieuses).

Jean-Sébastien Bach par Elias Gottlob, 1746 (détail)

La Réforme, alors, habite l’Allemagne protestante. Plus d’un siècle sépare Bach de Luther mais tous deux ont été des enfants d'Eisenach, dans le land de Thuringe. Fidèle à la réforme luthérienne, Bach fait de sa foi le cœur de son œuvre, témoignant d’une invincible espérance. Celle de son temps, bien sûr, à une époque où la religion habite les peuples et les mœurs, mais aussi celle de son âme. La mort, pourtant, plane depuis son plus jeune âge sur sa propre vie : orphelin à 9 ans, la fratrie Bach a déjà vu mourir plusieurs de ses enfants quand ses deux parents expirent tour à tour. Marié, seule la moitié de ses vingt enfants parvient à l’âge adulte et la faucheuse lui ravit aussi sa première épouse, Maria Barbara. Une maladie foudroyante l’enlève alors à son mari, en voyage, sans que personne n’eut pris le soin d’en rapporter la cause. La mort - et avec elle l’espérance de la résurrection - habite ainsi ses compositions. Tantôt compagne bienheureuse qui ouvre les portes du Royaume, comme dans sa cantate Ich habe genug (“Je suis comblé”) ; tantôt comme l’hôte funèbre qui rappelle le suspiratio des violons qui s’élèvent en sanglots comme dans son Christ lag in Todesbanden (“Le Christ gisait dans les liens de la mort”). 

Œuvrer à la gloire de dieu

L'œuvre entier de Bach se lit comme une prière ; parfois louange, parfois supplication, mais toujours adressé à Dieu avec qui sa musique s’établit dans un dialogue permanent. “Soli Deo Gloria” ; “à Dieu seul la gloire” : Bach atteste ainsi n’être que le dépositaire d’un don particulier qu’il a reçu de son Créateur et qui, justement, doit Lui revenir. C’est ce qui vaut au monde ses chefs-d'œuvre de musique sacrée, qu’ils aient été conçus comme tels, ou non, comme la mélodie du prélude de son Clavier bien tempéré reprise par Charles Gounod et chantée par Maria Callas dans son sublime Ave. C’est d’ailleurs ce que confesse la foi luthérienne qui professe que rien ne se crée ex nihilo. S’il n’existe aucun autre créateur que Dieu, c’est qu’à Lui seul revient la gloire. Soli Deo Gloria.

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