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Il fait partie des quatre-vingt-six statues représentant les figures illustres de l’histoire de France dans la Cour Napoléon du Louvre. Dans les années soixante, à l’époque du franc, son portrait ornait un "gros" billet de banque. Nombre d’établissements scolaires, de rues et d’avenues de nos villes portent encore son nom, à commencer par Clermont-Ferrand où il vit le jour il y a 400 ans. Blaise Pascal est "une figure majeure de notre culture (qui) a magnifié l’esprit français (en portant) un message universel […] sur le chemin de la vérité" a rappelé le président de la République dans un tweet émis le 19 juin, jour de sa naissance.
Ce supplément d’âme
Commettons délibérément un anachronisme : le tweet, cette forme d’expression cursive et censée être percutante, l’auteur des Pensées s’en serait sûrement servi avec le génie des mots que son intelligence inspirée savait ciseler avec un art consommé de la formule. Il aurait sûrement contribué à relever le niveau intellectuel de la moyenne des messages circulant maintenant sur les réseaux sociaux. Il leur aurait apporté ce supplément d’âme, ce centre de gravité et de profondeur si indispensable à l’intelligence humaine et qui leur manque si tragiquement ; faute de quoi la vacuité, la bêtise et la méchanceté exercent impitoyablement leur frénétique tyrannie sur cette agora numérique dévoyée.
Le pape François, comme ses proches prédécesseurs d’ailleurs, voit en Pascal un témoin extraordinaire, idéal même peut-être, de l’intelligence chrétienne. Le fondateur du grand quotidien italien La Reppublica, Eugenio Scalfari, lui-même athée, avait eu plusieurs conversations avec le Pape au début de son pontificat. Il avait révélé que le Pape lui avait dit : "Blaise Pascal mérite la béatification." Ce projet avait sur le coup enchanté de nombreux amoureux de la littérature chrétienne. Mais cette perspective de "catholicisation" de l’illustre savant, mathématicien et philosophe français, avait aussi déplu à des cercles intellectuels soucieux de préserver le caractère universel de son œuvre. Le diocèse de Paris, à qui il reviendrait de lancer la procédure, ne l’a pas à ce jour initié. Le pape François a donc choisi d’honorer Pascal en publiant cette semaine une exhortation apostolique Grandeur et Misère de l’homme qui a déjà été présentée sur Aleteia.
Le primat du réel
On pourrait toutefois revenir sur un des points insistants de la méditation du Pape qui montre bien l’actualité vivace de la pensée pascalienne. François écrit ainsi, "en méditant les Pensées de Pascal, on retrouve, en quelque manière, ce principe fondamental : La réalité est supérieure à l'idée, car il nous apprend à nous tenir éloigné des “diverses manières d'occulter la réalité”, depuis les “purismes angéliques” jusqu'aux “intellectualismes sans sagesse”". On sait que le Pape a fait du primat du réel un des paradigmes de sa réflexion personnelle. Il l’a largement développée dans son encyclique programmatique La Joie de l’Évangile.
Le pari que nous invite à faire Blaise Pascal en cette aube incertaine du XXIe siècle, c’est bien de résister aux simplismes et aux simplifications qui réfutent, travestissent et déforment les réalités.
Cependant la priorité du réel est actuellement malmenée et même combattue par une inflation de dénis et de faussetés qui s’est emparée de la société du commentaire. Cette tendance inflationniste du mensonge et de la désinformation est une réaction négative et néfaste face à la complexité croissance des problèmes à régler et des décisions à prendre dans la société et dans le monde, en butte à des changements et à des urgences considérables. Cette dénégation du réel entraîne un défaussement de l’esprit de responsabilité. Cette posture s’exprime par une amplification des discours falsificateurs promettant d’illusoires "grands soirs" alors que — comme on l’apprend en méditant l’Histoire — l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt le matin et empoignent le réel, non pas en le fantasmant mais en l’assumant.
Ni ange, ni bête
Le pari que nous invite à faire Blaise Pascal en cette aube incertaine du XXIe siècle, c’est bien de résister aux simplismes et aux simplifications qui réfutent, travestissent et déforment les réalités. À l’enseigne de Pascal, il nous faut nous méfier des démagogues déguisés en bons bergers ou en gentilles bergères. Méditons donc bien cette pensée pascalienne et exerçons-nous à en tirer profit pour nous-mêmes et aussi pour toutes les communautés humaines que nous fréquentons : "L'homme n'est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la bête."
Pratique