Une revolarisation "compatible avec l’esprit des lieux" : c’est le souhait du vice-président de la Fondation du patrimoine, Bertrand de Feydeau, qui a annoncé officiellement la création du prix Sésame le 22 novembre. Le projet est financé par le Fonds du Bien Commun et par des mécènes individuels. Les 42.000 églises en France – dont 95% appartiennent aux communes – sont, pour beaucoup, menacées par le manque d’entretien, telles étaient les conclusions du rapport du Sénat de juillet dernier. Parmi les églises les plus menacées se trouvent souvent celles XXe siècle, car jugées de faible intérêt patrimonial et parfois construits avec des matériaux de faible qualité. 2.500 à 5.000 édifices religieux risquent d'être démolis d'ici 2030, selon l’Observatoire du patrimoine religieux.
L’augmentation des coûts de réparation, les regroupements de communes, et la baisse de la pratique religieuse nécessite, selon Bertrand de Sagazan, directeur de l’Institut Pèlerin du patrimoine et vice-président du prix, "un mouvement de réappropriation". Et de rappeler notamment que les églises étaient autrefois de hauts lieux de sociabilité et que la séparation entre la vie religieuse et la vie profane était moindre, contrairement à l’idée reçue. Pendant des siècles, "il n’y avait pas de bancs, et, dans la nef, les enfants jouaient et les chiens couraient". Selon lui, maintenir le culte signifie, d’un même coup, maintenir l’ouverture des églises à tous.
Un usage partagé du lieu, la solution privilégiée
Si, en vingt-cinq ans d’existence, la Fondation du Patrimoine a restauré près de 7.000 lieux de culte, il a été jugé important de porter davantage attention aux édifices plus modestes, auxquels, pourtant, les habitants locaux sont souvent très attachés. Comme le remarquent les organisateurs, il est nécessaire de prévenir "les réactions potentiellement hostiles du public". Pour ce faire, cinq points seront particulièrement examinés : le projet devra bénéficier d’un soutien local, être "compatible avec l’usage cultuel actuel ou d’origine", être respectueux de l’architecture du bâtiment, permettre, dans la mesure du possible, une large ouverture au public, et, enfin, avoir un "impact positif" sur le territoire.
Un usage partagé du lieu est la solution privilégiée par les promoteurs du prix. Et de citer ainsi les exemples d’une "épicerie solidaire" tenue dans l’église Saint-André (Lyon) durant la pandémie, l’église Saint-Hilaire de Mortagne-sur-Sèvre (Vendée) menacée de destruction étant devenue "un centre d’interprétation du vitrail" ou une autre devenue partiellement un lieu d’accueil pour les étudiants durant la pandémie.
Les candidatures peuvent être déposées jusqu’au 3 février 2023. Cinq projets seront sélectionnés pour une dotation totale de 100.000 euros. Une somme encore modeste au regard de l’état de dégradation avancée d’une partie du patrimoine religieux, mais que les organisateurs comptent bien renouveler.