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Au Liban, 80% des écoles chrétiennes menacent de fermer

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École Nationale Maronite de Baalbeck, Bekaa, Liban.

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Agnès Pinard Legry - publié le 17/11/22
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Durement frappées par la crise que traverse le Liban depuis octobre 2019, les écoles chrétiennes du pays pourraient bien fermer définitivement. Aux pénuries, pannes d’électricité et à l’inflation galopante s’ajoutent l’exil des professeurs contraints en raison de salaires extrêmement faibles et des familles dans des situations d’extrême pauvreté incapables d’envoyer leurs enfants à l’école. Un tableau dramatique qui pourrait encore s’assombrir si rien n’est fait.

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Des montagnes druzes à la plaine de la Bekaa en passant par les montagnes du Chouf, les écoles chrétiennes tenues par des congrégations religieuses parsèment le Liban comme autant de flammèches d’espérance. Des flammèches qu’on aurait pu penser éternelles mais qui pourraient prochainement s’éteindre à jamais. Depuis trois ans maintenant, le pays du Cèdre tant aimé de Jean Paul II traverse une crise sans précédent. À un taux de chômage proche de 30% - il a triplé depuis 2019 - vient s’ajouter un taux d’inflation à 154% et une livre libanaise qui a perdu quelque 95% de sa valeur. D’après l’ONU, plus de 80% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.

Les écoles chrétiennes, qui résistaient tant bien que mal au chaos ambiant, sont désormais à leur tour rattrapées par l’effondrement total qui guette le pays. "La situation n’a jamais été aussi inquiétante", s’alarme auprès d’Aleteia Baptiste Mekari, chargé de mission pour l’Œuvre d’Orient au Liban. "Aux parents qui n’ont plus les moyens d’envoyer leurs enfants à l’école viennent s’ajouter les professeurs qui – pour ceux qui n’ont pas quitté le pays – n’ont même plus les moyens de payer leur essence pour venir assurer leurs cours ! Et là encore, quand ils y arrivent, ce sont les écoles qui ne sont plus en état : soit parce qu’elles ne peuvent plus payer l’électricité, soit parce que l’électricité nationale n’est plus délivrée." Avant la crise, les professeurs faisaient partie de la classe assez aisée en gagnant entre 1.000 et 1.500 dollars. "Aujourd’hui, leur salaire varie entre 100 et 120 dollars", se désole encore le chargé de mission.

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Sœur Maryam An Nour, directrice de l'école du Carmel Saint Joseph, Liban.

Concrètement, sur les 331 écoles chrétiennes au Liban, 80% des écoles menacent sérieusement de fermer. Présente dans le pays depuis 168 ans, l’Œuvre d’Orient a pu soutenir pour le moment 115 écoles chrétiennes en difficulté. Elle a également créé, avec l’État français, le Fonds des Écoles d’Orient qui a financé 129 écoles chrétiennes en 2021. Mais les besoins, déjà immenses, semblent se multiplier. "Pour le moment, aucune école n’a fermé complètement", reprend le chargé de mission. "Mais c’est une mort lente à laquelle elles sont condamnées si rien ne change. Certaines vont assurer trois jours de cours avant d’enchaîner avec une semaine de fermeture puis des cours à distance. Elles essayent malgré tout de continuer comme elles peuvent à enseigner, à transmettre. Quelques-unes se sont regroupées afin de mutualiser les moyens. Mais aucune solution n’est viable sur le long terme."

À Tripoli, ville située dans l’une des zones les plus pauvres du Liban, l’école des carmes continue ainsi à fonctionner tant bien que mal. La plupart des professeurs ne vivant pas sur place, ils sont contraints de prendre leur voiture pour venir. "Compte tenu de leur faible salaire, ils ne sont plus en mesure de payer l’essence ce qui diminue progressivement leurs jours de présence", glisse encore Baptiste Mekari. "L’Œuvre d’Orient prend donc en charge une partie du prix ou met en place des bus afin de garantir un service minimum. Mais là encore, la situation ne pourra durer ainsi éternellement."

Ferments de paix et de cohésion

Au-delà de l’aspect économique et logistique, c’est aussi sur le plan moral et culturel que se joue le drame d’une éventuelle disparition des écoles chrétiennes. "Les écoles chrétiennes participent à cette paix sociale, à ce "vivre-ensemble" unique au Moyen-Orient", a déjà expliqué à plusieurs reprises le directeur général de l’association, Mgr Gollnisch. "Si elles ferment, la situation risque de se dégrader encore davantage au Liban. La paix est en danger." "Une des grandes richesses du Liban, c’est son éducation, ce sont ses écoles, ses universités", abonde le chargé de mission. "Tout le Moyen-Orient venait au Liban pour que leurs enfants y soient formés. Aujourd’hui le pays ne peut plus assurer ce service de qualité." Ferments de paix et de cohésion, les écoles chrétiennes du Liban dispensent donc aussi un enseignement d’excellence essentiel pour les jeunes générations du Liban et du Moyen-Orient tout entier. Les soutenir est donc, aujourd’hui, une urgence qui nous concerne tous.

Pratique

Pour en savoir plus sur la situation des écoles chrétiennes au Liban, vous pouvez consulter cette page.

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