Mikhaïl Gorbatchev, dont le obsèques ont lieu ce samedi 3 septembre à Moscou, était le leader de la dernière superpuissance athée du monde. Et lorsqu'il était secrétaire général du parti communiste, Dieu n'était pas censé exister. Mais depuis sa rencontre avec Jean Paul II le 1er décembre 1989, Mikhaïl Gorbatchev, décédé à l’âge de 91 ans ce mardi 30 août, donnait des signes clairs d'un rapprochement personnel au christianisme et à ses valeurs. Pour certains, il s’agit juste d’un questionnement, pour d’autres d’un cheminement qui a abouti à une conversion spirituelle en 2008. Alors, le leader de la perestroïka est-il mort chrétien ? Est-ce que l'homme qui a présidé à la disparition de l'Union soviétique, s'est révélé être un croyant à l'automne de sa vie ? Éléments de réponse.
Une "perestroïka" spirituelle à Assise ?
"C'est grâce à saint François d’Assise que je suis arrivé à l'Église, et c'est pourquoi il était important pour moi de visiter sa tombe", aurait reconnu l’ancien président Gorbatchev aux moines de la basilique d'Assise, surpris de le voir le 19 mars 2008 venir incognito parmi d’autres pèlerins. "Pour moi, saint François est l’alter Christus, l’autre Christ. Son histoire me fascine et il a joué un rôle fondamental dans ma vie. Je suis très ému d’être ici en ce lieu si important non seulement pour le catholicisme, mais pour toute l’humanité", aurait-il encore dit. Des propos que certains médias réfutent mais qui demeurent néanmoins, sa visite étant attestée.
Pour moi, saint François est l’alter Christus, l’autre Christ. Son histoire me fascine et il a joué un rôle fondamental dans ma vie.
Le moine lithuanien, Miroslavo Anuskevicius, présent à ce moment-là, a rapporté ensuite au quotidien italien La Stampa que Mikhaïl Gorbatchev, accompagné de sa fille Irina, avait passé une demi-heure sur la tombe de saint François au cours d’une visite organisée du sanctuaire, avant de faire le tour de la basilique. Son apparition à Assise, ainsi que sa confession de foi "ouverte", ont confirmé les rumeurs qui circulaient depuis longtemps selon lesquelles il avait abandonné l'athéisme, même si dans l’interview accordée à l’agence russe Interfax le lendemain de sa visite surprise à Assise, l’ancien président de l’URSS a nié être un chrétien pratiquant. "C’est en touriste et non pas en pèlerin que je me suis rendu sur cette tombe", a-t-il expliqué à l’agence. Un vieux réflexe typique d’un dirigeant soviétique baptisé à la naissance en cachette par ses grands-parents et conscient que s'il n'avait pas prétendu être athée, il n'aurait jamais fait carrière dans le parti communiste ?
Un "croyant refoulé" ?
Pourtant, des propos sur sa quête du spirituel ont circulé dès sa rencontre historique avec le pape Jean Paul II au Vatican, le 1er décembre 1989. Mikhaïl Gorbatchev était alors au pouvoir en URSS depuis trois ans. Pris au piège de sa propre stratégie réformatrice, le dirigeant soviétique a alors assuré que le temps de la lutte antireligieuse était terminé… Et il a accepté de rencontrer le pape polonais trois semaines après la chute du Mur de Berlin.
Jean Paul II témoigne que Dieu est dans le cœur de l’homme.
Touché par l’échange avec Jean Paul II, Mikhaïl Gorbatchev a confié aux médias deux mois plus tard : "Rien de ce qui s’est passé en Europe de l’Est n’aurait pu se produire sans ce pape-là..." Même son adversaire de la guerre froide, le président américain Ronald Reagan, aurait déclaré à ses conseillers qu'il pensait que Gorbatchev était un "croyant refoulé".
En juillet 2000 dans une interview accordée à L’Osservatore romano, le père de la perestroïka, qui avait rencontré à nouveau "son ami" Jean Paul II le 27 juin au Vatican, a confié que sa vie et ses choix ont été influencés par "le témoignage personnel de Jean Paul II". Et en reprenant ses mots : "le Pape témoigne que Dieu est dans le cœur de l’homme", il a conclu que la "pensée chrétienne" ne quittait pas son esprit.
Enfin, le jour de la mort de son épouse Raïssa, le 20 septembre 1999, Mikhaïl Gorbatchev a tout de suite demandé à son ami, le métropolite Yuvenaly de Krutitsy et Kolomna, hiérarque de l'Église orthodoxe russe, de célébrer l'office religieux des funérailles. Un prêtre qui a co-célébré la cérémonie a confié à Aleteia qu'il "n'excluait pas qu'un office religieux des funérailles du dernier président de l'URSS ait lieu en privé". Même si ses proches ne le confirment toujours pas.