En raison de conditions météo très complexes, les organisateurs de la Vendée Arctique qualificative pour le Vendée Globe 2024 ont décidé de neutraliser la course dans la nuit de jeudi à vendredi 17 juin. Les skippers pourront s’abriter et attendre le passage de la dépression. Parmi eux se trouve Yannick Bestaven. Le 28 janvier 2021, à 4 heures du matin, les feux d’artifice illuminent le ciel au-dessus du chenal des Sables-d’Olonne. La foule en liesse fait un cortège au bateau Maître Coq qui rentre au port pour célébrer l’arrivée du vainqueur du Vendée Globe, l’une des courses les plus difficiles au monde. Debout, à l’avant de son bateau, Yannick Bestaven, cheveux en bataille et bougie fontaine dans les bras en signe de victoire, a du mal à savourer sa première place. Il lui a fallu 80 jours, 3 heures et 44 minutes pour boucler la course en solitaire autour du monde sans escale et sans assistance. Il prend conscience petit à petit que son rêve est en train de se réaliser parce qu’il a osé aller jusqu’au bout.
Et c’est ce que ce navigateur et marin veut transmettre aux enfants aujourd’hui. À la clé pour celui qui est aussi ingénieur et co-inventeur de l’hydrogénérateur, une révolution verte dans la gestion de l’énergie en mer. Dans un documentaire Les rêves ne meurent jamais, réalisé par Sébastien Blémon, le vainqueur du Vendée Globe se confie sur son histoire. Au cœur de celle-ci, cette question : pourquoi si peu de gens osent réaliser leurs rêves ? Et surtout comment apprendre aux enfants à ne pas abandonner leurs rêves ?
Aleteia : En novembre 2008, seulement 30 heures après le départ de la 6e édition du Vendée Globe, vous avez été contraint d’abandonner. Pourtant, vous n’avez pas renoncé à votre rêve qui s'est réalisé finalement 12 ans plus tard. Comment avez-vous réussi à aller jusqu’au bout de ce rêve?
Yannick Bestaven : C’est grâce au soutien de mes proches, de ma famille, de mes amis. Et aussi grâce à l’envie : celle d’aller voir si la terre est bien ronde. L’envie de me surpasser. L’envie de savoir si j’en étais capable. L’envie d’être en mer. Enfin, l’envie de voir ces mers du sud et de comprendre pourquoi les marins ont toujours envie d’y retourner. J’ai aussi fait de belles rencontres. Des personnes ont cru en moi. L’enthousiasme et l’engagement de tout ce collectif – équipe, partenaires, famille, amis et du public – m'a porté, il m'a poussé. Avec de nombreuses personnes, on a réalisé une belle performance et vécu une belle aventure. C'était mon rêve.
Quelles sont les ingrédients d'une telle victoire ?
Cette victoire est collective, elle a été obtenue à force de persévérance et de belles rencontres.
Grâce à mon échec de 2008, avec mon associé Matthieu Michou, nous avons crée Watt&Sea qui, aujourd'hui, équipe pratiquement tous les bateaux de course en hydro-générateurs. J’ai rencontré des investisseurs qui m’ont aidé à acheter mes bateaux. D’autres ont accepté que je porte haut leurs couleurs. Grâce à eux, j’ai pu naviguer et obtenir de bons résultats. Puis il y a eu la rencontre avec Maître CoQ et cette formidable aventure qui nous a mené à la victoire en janvier 2021. Avec l'aide de mon équipe, mon bateau, Maître CoQ IV, était fiable et bien préparé. Une préparation sereine et une course avec du monde derrière moi qui m’encourageait. Le travail et les relations humaines, voilà les ingrédients. C’est plutôt simple, non ?
Au centre de la narration du documentaire "Les rêves ne meurent jamais", il y cette question : pourquoi ceux qui osent réaliser leurs rêves sont si rares ? Avez-vous trouvé la réponse ?
Nous sommes sans doute très conditionnés par les règles édictées par la société ou la famille. Egalement par des peurs qui paralysent et empêchent d’oser. S’extirper d’un carcan n’est pas simple. La personnalité joue aussi.
Dans les moments de doute, de découragement ou d'échec, quelle est votre méthode pour y faire face ?
Dans la difficulté, il y a toujours un moment de déclic qui me fait comprendre les choses et avancer à nouveau. Je pars du principe qu’il ne faut pas blâmer une contrariété. Cette philosophie me permet de rebondir assez rapidement car finalement, il y a du positif dans chaque situation. C'est essentiel : ne pas baisser les bras trop vite. D’une manière générale, je suis en mouvement et à l’écoute.
La première des choses à dire à nos enfants, c’est d’aller au bout de ce qu’ils entreprennent. Le chemin est sinueux, mais la voie pour accéder à ce dont on rêve est magnifique. Il ne faut pas avoir peur d’aller au bout, même si parfois, ça fait mal.
Comment apprendre aux enfants à ne pas lâcher ses rêves ?
La première des choses à dire à nos enfants, me semble-t-il, c’est d’aller au bout de ce qu’ils entreprennent. Peu importe ce que c’est, une tâche quotidienne, un exercice, un sport débuté en début d’année… Aller au bout d’une entreprise, c’est une bonne base pour ne jamais lâcher. Le chemin est sinueux, mais la voie pour accéder à ce dont on rêve est magnifique. C’est là où l’émotion est la plus forte. Rien que pour vivre et ressentir cela, il ne faut pas avoir peur d’aller au bout, même si parfois, ça fait mal. Enfant, j’étais toujours en action et curieux, comme aujourd’hui d’ailleurs. J’ai une maman qui m’a permis très tôt de goûter à différents sports. Je m’épanouissais avec le soutien des miens, donc j’ai continué !
Si vous deviez donner un seul conseil aux jeunes, qui commencent à envisager leur vie dans une période particulièrement anxiogène ?
Osez, foncez, travaillez. Vous êtes votre propre métronome, battez la mesure à votre rythme et selon votre cadence. Certaines périodes seront plus faciles que d’autres mais mettez-vous en mouvement et gardez le rythme. Vous êtes les maîtres de votre destin.