À la veille du premier conflit mondial qui allait dévaster l'Europe, les relations entre la France et le Saint-Siège sont rompues. Depuis dix ans déjà, il n'y a plus d'ambassadeur français à Rome et plus de nonce apostolique à Paris. Cette absence de relations durant les quatre années de guerre va être préjudiciable. La France aurait aimé pouvoir faire entendre sa voix au Vatican. Même du côté de certains républicains, on déplore cette situation, arguant que les Allemands et les Autrichiens, eux, ont leurs entrées à Rome.
« Au fil des mois, Benoît XV va être perçu comme le “pape boche” par les Français », explique d'ailleurs l’historien Jean Vavasseur-Desperriers. Sa déclaration de 1917 dans laquelle il appelle les belligérants à cesser le « massacre inutile » et à revenir à un statu quo territorial – qui laisserait l’Alsace et la Lorraine aux Allemands – est très mal accueillie dans l'Hexagone. Pour certains, l'Allemagne a profité de la chaise vide laissée par la France pour avancer ses pions et influencer le jugement du pape. « C’est sans doute injuste puisque le pape souhaitait se situer au-dessus de la mêlée. Ce qui est sûr c’est que la France, sans représentation officielle, ne pouvait pas même tenter de peser sur le Saint-Siège », souligne l'historien spécialiste de la période.
Au lendemain de la Grande Guerre, la France a donc conscience des intérêts diplomatiques qu'elle a de se rapprocher du Saint-Siège. D'autant plus que la « boucherie des tranchées » a sans doute fait relativiser les passions religieuses et anticléricales. D'ailleurs, en France, la donne a changé avec l'Union sacrée. L'Eglise et les catholiques français ont participé massivement à l'effort de guerre. Les mentalités ont donc évolué et cela s'observe avec un retour des catholiques dans la vie politique. En 1919, les candidats catholiques obtiennent un certain succès aux élections législatives. Sur 600 députés élus à la Chambre, 180 se réclament du catholicisme et sont favorables à une application modérée des lois laïques. Auparavant, se dire catholique, c’était avoir la quasi-certitude de ne jamais devenir ministre sous la IIIe République. Du côté du Saint-Siège, là aussi, on se dit favorable à des discussions. Au cardinal Léon-Adolphe Amette, archevêque de Paris, Benoît XV aurait d'ailleurs confié : « Si l’on me tend le doigt, j’ouvrirai la main. Si l’on me tend la main, j’ouvrirai les bras ».
Il faudra pourtant attendre de longs mois pour voir se rétablir des relations officielles entre le Vatican et la France. Il fallait en effet encore dépasser une difficulté apparemment insurmontable : la papauté avait formellement condamné les lois laïques et notamment celle de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat. La France quant à elle ne voulait pas entendre d'une quelconque modification de ladite loi. Il faudra le travail habile de diplomates pour dépasser les différents.