Un changement radical. De 1962 à 1965, le IIᵉ concile œcuménique du Vatican plus connu sous le terme « concile Vatican II » transforma, un grand nombre de structures de l'Église, et plus particulièrement la place et participation de l’assemblée lors des liturgies. Le souhait d’une plus grande implication des fidèles lors des messes allait ainsi conduire à un certain nombre de décisions importantes tels l’usage de la langue vernaculaire et la position face à l’assemblée du célébrant.
La musique et les chants relevèrent également de cette préoccupation d’une plus grande « participation active du peuple » selon les termes mêmes de la Constitution sur la Sainte Liturgie ou Sacrosanctum Concilium parue en 1963. Sans renier pour autant le legs du chant grégorien, les chants propres à la culture de l’assemblée, voire aux traditions locales de certaines régions, seront ainsi dorénavant admis « dans certaines régions, surtout en pays de mission ». Le texte précisant : « On trouve des peuples possédant une tradition musicale propre qui tient une grande place dans leur vie religieuse et sociale, on accordera à cette musique l’estime qui lui est due et la place convenable, aussi bien en formant leur sens religieux qu’en adaptant le culte à leur génie ».
Une musique accessible aux fidèles
Si la musique grégorienne répondait, il est vrai, aux exigences formelles dispensées dans les monastères, il en allait autrement dans toutes les paroisses. Afin d’éviter ces silences contraires à l’expression de la foi, le concile souhaita pour une participation plus active que « l’Église approuve toutes les formes d’art véritable, si elles sont dotées des qualités requises, et elle les admet pour le culte divin » toujours selon la Constitution. Ainsi, les pères conciliaires ont-ils estimé que le chant religieux populaire soit « intelligemment favorisé pour que, dans les exercices pieux et sacrés, et dans les actions liturgiques elles-mêmes, conformément aux normes et aux prescriptions des rubriques, les voix des fidèles puissent se faire entendre ».
Instruments et compositeurs
Les orgues demeureront, cependant, au cœur de cette réforme de la musique sacrée et le concile Vatican II n’entendra pas réduire le legs précieux de cet instrument prestigieux dont le son — précise-t-il — « peut ajouter un éclat admirable aux cérémonies de l’Église et élever puissamment les âmes vers Dieu et le ciel ». Mais parallèlement, la réforme ne souhaita pas pour autant exclure tout autre instrument, à partir du moment où ces derniers pouvaient être adaptés à un usage sacré et s’accorder à la dignité du lieu. Ce qui explique qu’à partir des années 60, les guitares, tambourins, violons et autres instruments envahiront les églises à la grande stupeur parfois de nombreux fidèles ayant connu l’époque d’avant Vatican II…
Entre nostalgiques de la « belle musique » sacrée et modernistes de chants plus charismatiques, le fossé allait se creuser...
Ce concile encouragea, enfin, également les compositeurs à créer des musiques sacrées qui puissent être aisément accessibles et chantées par les fidèles. Les conséquences durables de ces profonds changements n’allaient pas tarder à s’imposer. Le grégorien fut ainsi rapidement abandonné par la plupart des assemblées alors que des chants à l’unisson aux mélodies simplifiées allaient se généraliser. Entre nostalgiques de la « belle musique » sacrée et modernistes de chants plus charismatiques, le fossé allait se creuser, même si certaines initiatives de compositeurs inspirés comme Joseph Gélineau ou la communauté de Taizé tentèrent d’insuffler de nouvelles et belles créations musicales pour l’Église catholique d’après Vatican II.