L’abeille a depuis toujours joui d’une excellente réputation, et les temps bibliques les plus anciens vantaient déjà la douceur de son miel et son ardeur au travail. On trouve plus de 60 références directes ou indirectes à ce petit insecte dans l’Ancien Testament et le Nouveau Testament l’évoque au sujet de Jean le Baptiste et dans l’Apocalypse. Les Pères de l’Église n’auront cesse d’associer l’abeille au verbe divin, faisant de celle-ci l’emblème des vertus chrétiennes et le Moyen Âge abondera d’images la représentant avec sa ruche en une métaphore de la société.
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L’abeille, cet hyménoptère de la famille des Apoïdes, compte parmi les plus anciens insectes que la vie terrestre ait connu. Il n’en fallait pas plus pour qu’elle figure dans la Bible à de très nombreuses reprises, faisant ainsi de l’abeille un animal privilégié du bestiaire biblique. Toutes les références bibliques ont en commun et soulignent cette idée d’un incessant labeur et d’abondance qu’offre ce si petit insecte au ventre rayé. L’abeille et surtout sa ruche est, ainsi, le plus souvent évoquée ou représentée dans les textes bibliques comme une métaphore de la société des hommes faisant de l’activité insatiable de ses travailleuses un modèle de vertu. Vertus, mais aussi et surtout une source d’abondance à nulle autre pareille ; une abondance aussi riche que belle et douce à l’image du celle du paradis…
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Le Deutéronome décrit ainsi la Terre promise comme un « pays de miel » ; pour le livre de l’Exode, c’est la promesse d’un « pays, ruisselant de lait et de miel » faite à Israël ; une expression qui revient plusieurs fois dans l’Ancien Testament et qui témoigne de l’importance du produit de la ruche en ces temps anciens bibliques. Les Psaumes décrivent également la Parole de Dieu comme « plus désirables que l’or, qu’une masse d’or fin, plus savoureuses que le miel qui coule des rayons ». C’est ainsi que le miel créé par les abeilles est réputé apporter la vie, mais aussi la clairvoyance notamment lors des épreuves. Rappelons que Jonathan, au Premier Livre de Samuel, ignorant l’interdiction de se nourrir imposée par Saul goûtera néanmoins du miel sauvage « et son regard s’éclaircit ». Vie, clairvoyance, le miel serait-il une nourriture divine aussi terrestre que spirituelle ?
L’abeille au secours des saints hommes
Si la vie de saint Jean le Baptiste a toujours été décrite comme très austère, l’Évangile selon saint Matthieu décrit, cependant, le quotidien et la vie de ce parent de Jésus, en ces termes : « Lui, Jean, portait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins ; il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage ». L’abeille apporte dans les textes bibliques effectivement aux saints hommes presque tout ce qui est nécessaire pour leur vie matérielle. Et, de cette source de vie, Grégoire de Nysse usera de la métaphore des abeilles volant au-dessus de la prairie pour évoquer les paroles inspirées par Dieu, chacune butinant ces fleurs pour en recueillir ce nectar et le conserver en son cœur sans user de leur dard. Source de nourritures terrestres, les abeilles sont aussi dans les Saintes Écritures des butineuses privilégiées du verbe divin.
Soulignons, enfin, que saint Ambroise de Milan, de par son enfance, est également associé à l’abeille. Alors que nouveau-né il se trouvait dans son berceau, on rapporte qu’un essaim couvrit le visage de l’enfant jusqu’à entrer dans sa bouche. Après que les abeilles se furent éloignées en laissant indemne l’enfant à la grande surprise de son père, ce dernier confia : « Si ce petit enfant vit, ce sera quelque chose de grand ». De cet épisode, saint Ambroise de Milan sera, dès lors, le saint protecteur des apiculteurs.
Un animal à double facette
Mais, si la Bible vante à de nombreuses reprises la douceur de la Parole comme le miel des abeilles, leur aiguillon peut parfois, cependant, être cause de plus de douleurs. C’est ce que soulignera saint Bernard à leur sujet comparant le Christ et l’abeille pour sa douceur, mais aussi pour son aiguillon qui causera d’acre piqûre à ceux qui n’auront pas suivi sa Parole et auront à subir son jugement. Le Livre de l’Apocalypse entend bien lui aussi souligner cette ambivalence : « Je m’avançai vers l’ange pour lui demander de me donner le petit livre. Il me dit : « Prends, et dévore-le ; il remplira tes entrailles d’amertume, mais dans ta bouche il sera doux comme le miel». Abeille source de douceur, de vie, mais aussi cause d’amertume. L’abeille offre décidément dans les textes bibliques en un contraste saisissant cette richesse et une source de vie incomparables ; un legs aussi vital que spirituel qu’il nous appartient de protéger à l’heure de la disparition prévisible de ces petits insectes pourtant si aimés de la Bible.