"Ces morts, je les relèverai !", déclare le sculpteur Paul Landowski, alors qu'il participe à la bataille de la Somme en 1916, au sein de la section de camouflage, aux côtés de ses amis artistes. Ses compagnons d'infortune se nomment Dunoyer de Segonzac, Guirand de Scévola, Jacques Villon, Forain... Horrifié par la vision des tranchées et par les pertes humaines considérables, cet humaniste se jure intérieurement de leur rendre hommage par son art.
Plus de 80 monuments aux morts dans toute la France
Mission accomplie dès le lendemain de la guerre avec une série de commandes sur tout le territoire français. La sculpture monumentale "Les Fantômes", commandée par l'État en 1919, et dont la maquette en plâtre reçoit, dès 1923, la médaille d'or d'honneur au Salon des Artistes français, est particulièrement représentative. Monument particulièrement émouvant, installé sur le champ de Chalmont où se scella le sort de la seconde bataille de la Marne, il commémore la contre-offensive qui conduit les alliés à la victoire en 1918.
Loin d'une œuvre victorieuse, Paul Landowski a, au contraire, préféré représenter sept soldats morts, sept "fantômes" aux regards vides et revêtus des différents uniformes des corps de l'armée française. Au milieu, distancié, un homme nu, un héros martyr, rappelle la souffrance de tous ces hommes disparus aux combats.
C'est encore lui qui réalise, dans les années 1950, le célèbre monument "À la gloire de l'Armée française 1914-1918" place du Trocadéro à Paris. Lancé par l'État en 1936, le monument ne saura inauguré que 20 ans plus tard, en 1956. Toujours aussi habile dans l'art de commémorer, Paul Landowski réalise un groupe sculpté monumental de plus de cinq mètres de hauteur. Au centre, l'allégorie de l'armée française entourée de ses soldats héroïques. De chaque côté, deux inscriptions rythment les murs : À nos héros / À nos morts.
Un temple à la gloire de l'Homme
Décoré de la croix de guerre pour sa bravoure lors de la bataille de la Somme, Landowski marquera les esprits par ses valeurs profondément humanistes. Des valeurs qui lui valurent un succès retentissant à la fois France mais aussi l'étranger. Constamment inspiré par l'idée d'une Europe en paix, il aura rêvé toute sa vie de réaliser son fameux Temple de l'Homme, "un temple pour y chanter la grandeur de l’esprit humain où tous les grands porteurs de lumière sont assemblés comme une symphonie des esprits". À défaut, il aura tenu sa promesse en relevant des ténèbres les sacrifiés de la Grande Guerre.