Avez-vous déjà ressenti de la jalousie envers vos amies ? A quelles occasions ? Comment faire pour la maîtriser, et la dépasser ? 3 jeunes femmes, Marthe, Coline*, et Anne, ont accepté de répondre à ces questions intimes et délicates, et nous confient leurs antidotes à ce poison que peut devenir la jalousie entre amies.
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Le Larousse distingue deux définitions de la jalousie. La première est relative à la vie de couple : « Sentiment fondé sur le désir de posséder la personne aimée et sur la crainte de la perdre au profit d’un rival. » La seconde, plus générale, peut s’immiscer dans les relations amicales : « Dépit envieux ressenti à la vue des avantages d’autrui. » Elle est un sentiment normal, banal, chez nous autres pêcheurs, parfois même légitime lorsqu’il y a injustice, mais elle peut gâcher la vie, devenir oppressante, voire destructrice. Cependant, et voici la bonne nouvelle : on peut la dompter, apprendre à la maîtriser, et faire mentir Montaigne qui disait : « La jalousie est de toutes les maladies de l’esprit celle à qui le plus de choses servent d’aliment et le moins de choses de remède. » Si, il existe bel et bien des « remèdes ».
Qu’est-ce qui alimente la jalousie entre amies ?
La jalousie ne naît pas nécessairement de choses futiles. C’est pourquoi elle peut s’ancrer profondément, et légitimement, dans les cœurs, et qu’il peut être très difficile de l’y déloger. Elle est bien souvent alimentée par des comparaisons : soit d’ordre physique, comme l’implacable chiffre sur la balance, ou la beauté des cheveux, des yeux, ou des orteils de la voisine, soit d’ordre social, comme le mariage, les grossesses, le nombre d’enfants, la réussite professionnelle, le train de vie. Enfin, l’arrivée d’une tierce personne, menaçant l’équilibre d’une relation amicale, peut engendrer de la jalousie.
Témoignages :
Marthe, 32 ans : « J’ai été jalouse du bonheur apparent de mes amies : de leur mariage, alors que je n’étais pas mariée, de leurs grossesses, alors que je désirais un enfant mais que je ne pouvais pas en avoir tout de suite pour des raisons de santé. Un matin, j’ai reçu un texto d’une copine qui m’annonçait sa grossesse : j’étais verte de jalousie. Revenait alors la sempiternelle question : pourquoi elle et pas moi ? »
Coline*, 33 ans : « Pour moi, la jalousie se cristallise sur la question des choix de vie : je jalouse mes amies qui sont au foyer, et celles qui ont de super carrières, alternativement, parce que je me dis “ah mais c’est elle qui a fait le bon choix” ! Cela me rend jalouse quand j’ai l’impression qu’elles ont fait un choix plus intelligent que le mien, qu’elles mènent mieux leur barque que moi. »
Anne, 24 ans : « J’étais très amie avec un garçon, on passait beaucoup de temps tous les deux, et un jour, il a rencontré une autre fille, et notre duo s’est un peu cassé, il est devenu un trio. »
Comment dépasser la jalousie ? Quels sont les « remèdes », dirait Montaigne ? Et sont-ils aussi peu nombreux qu’il le croyait ?
1. Commencer par admettre qu’on est jalouse
D’autant plus qu’être jalouse peut faire paraître sotte ou mesquine… André Maurois, dans Ariel ou la vie de Shelley, écrit : « Rien ne donne plus de sottise apparente que la jalousie inavouée. Au lieu d’attaquer franchement l’adversaire, ce qui aurait du naturel et serait sans doute assez touchant, on en vient alors à critiquer avec aigreur des paroles inoffensives, des actions banales et l’on donne maladroitement un air d’insupportable mesquinerie à ce qui est en vérité un sentiment vif et légitime. »
2. Analyser sa jalousie
Pourquoi suis-je jalouse ? D’où vient ce sentiment ? Que cache-t-il ? Ai-je de bonnes raisons d’être jalouse ?
3. Exprimer sa jalousie à une personne de confiance
La jalousie révèle souvent une peur ou un manque de confiance en soi. Mettre des mots sur le malaise est un pas supplémentaire vers la guérison.
4. Agir
La jalousie, utilisée de façon positive et constructive, peut être le déclic pour nous faire avancer. Elle peut devenir le moteur pour obtenir ce dont nous rêvions. Exemples : commencer un régime, demander une augmentation, trouver un autre travail, faire la connaissance d’autres personnes célibataires…
5. Lorsqu’on ne peut pas agir, apprendre à s’accepter telles que nous sommes
Pour cela, le Père Denis Sonet nous livre quelques conseils (1) : s’accepter en tant que créature limitée, accepter le corps qui nous a été donné, accepter de ne pas être un sur-homme, accepter d’être encore en chemin, cesser de se comparer, soigner son apparence, faire l’inventaire de ses qualités, de ses réussites, accepter les compliments, croire en la présence de Dieu en soi.
6. S’abandonner totalement entre les mains du Seigneur
On peut confier à Dieu ce sentiment qui nous pourrit de l’intérieur, et lui demander son aide afin qu’Il nous purifie. Il est également possible de nous en remettre à Lui par la prière ou par le sacrement de Réconciliation. N’oublions pas que Jésus a dit : « Venez à moi, vous qui peinez sous le poids du fardeau, et je vous soulagerai. » (Matthieu, 11-28).
Témoignages :
Marthe : « Mon humeur du jour a fait que mon mari m’a questionnée… et nous en avons parlé et reparlé… et j’ai mis un mot sur ce que je ressentais : de la jalousie. J’ai été dans un premier temps très honteuse de l’être. Je suis jalouse de la bonne santé des autres, parce que ma santé à moi, elle n’est pas au top, une maladie chronique évolutive, ça vous modifie la vie, vos rêves, vos projets… La jalousie est un poison qui peut vous entraîner dans une spirale négative. C’est grâce à un travail sur moi, que je peux en parler aujourd’hui. Ce qui marche bien avec moi, c’est de me dire : « chacun sa route, chacun son chemin, chacun son rêve, chacun son destin…» Et puis, je fais des exercices de respiration, cela m’aide beaucoup à expirer mes sentiments négatifs. Et surtout, le fait d’en parler évite de nourrir la flamme de la jalousie.”
Coline* : « Passer le plus de temps possible avec mes amies pour comprendre leur choix de vie, m’en inspirer, ou au contraire me conforter dans mes propres choix. Voir, c’est connaître, connaître, c’est comprendre, comprendre, c’est aimer. »
Anne : « La jalousie n’est pas un sentiment que j’aime beaucoup, pour moi, elle n’était pas acceptable, donc pendant 2-3 mois, j’ai refoulé ce sentiment, je ne l’admettais pas. J’ai fui cette situation, jusqu’à ce qu’un soir, je me suis sentie appeler à une soirée d’adoration dans ma paroisse avec la possibilité de se confesser. Et là, un paroissien qui errait dans l’église m’a suggéré de lire à l’envers les mots inscrits sur une affiche pour le denier de l’Eglise : « je crois, je prie, j’espère, je cherche ». Ces verbes ont soudain résonné en moi, et j’ai cru vraiment que le Seigneur était là pour m’aider. Je suis allée me confesser en acceptant cette jalousie, en acceptant d’être pêcheur. Ce jour-là, j’ai compris que ce sentiment que je n’aimais pas, je ne pouvais pas le combattre toute seule. Et en quittant l’église, j’ai ressenti une vraie paix intérieure, et la relation avec mon ami s’est purifiée. »
* Le prénom a été changé.
(1) Mon célibat, j’en fais quoi ?, Denis Sonet, nouvelle édition, Editions Le Livre Ouvert, Septembre 2017, 12€.