En ce jour de la saint Bernard, Jacques Gauthier dresse le portrait du CIstercien, interlocuteur des rois et des papes. Dans sa Divine comédie, chef-d’œuvre de la littérature mondiale, Dante Alighieri (1265-1321) fait du Cistercien Bernard de Clairvaux le guide vers la vision suprême de Dieu au Paradis. C’est dire qu’il le considérait comme le mystique accompli des rapports de l’âme avec Dieu. Cette reconnaissance du poète italien exprime l’influence posthume de saint Bernard. Les prédicateurs ont abondamment utilisé ses écrits, il en est resté quelque chose dans la littérature et les arts.
Interlocuteur des rois et des papes, saint Bernard, docteur de l’Église fêté le 20 août, reste un moine authentique et un écrivain spirituel hors pair dont la foi ardente au Christ n’est pas cérébrale. Contemplatif dans l’action, sa prédication jaillit de son oraison intérieure. Elle attise dans l’âme le feu de l’amour divin pour que cette flamme entraîne d’autres chercheurs à sa suite. Ses œuvres mystiques révèlent une vie spirituelle intense, une science théologique sûre et un grand pouvoir d’attraction qui marqueront les générations à venir.
Une expérience positive de la foi
Dans le contexte de la chevalerie, Bernard de Clairvaux demeure un combattant spirituel qui cherche à conquérir le ciel par l’amour. Car ce moine passionné est doué pour aimer. Son expérience intime de Dieu est fondée sur l’amour, comme on le voit dans son œuvre de maturité : Sermons sur le Cantique des Cantiques. Il commente ce chant nuptial en décrivant l’union mystique de l’âme avec Dieu. Il parle de Dieu et à Dieu en utilisant le langage de l’amour passionnel bien avant les poètes et les romanciers. L’âme solitaire devient un sanctuaire sacré dans lequel se manifeste l’amour de Dieu.
Bernard a une vision nettement optimiste de l’être humain. Créé à l’image de Dieu, l’homme est capable par nature de s’unir à Dieu en l’aimant. Même le verbe humain garde en lui une trace de cette ressemblance avec le Verbe divin. Plus on aime Dieu, plus on veut le connaître, pour l’aimer davantage ; et plus on le cherche, plus on le trouve, pour le chercher davantage. Cet amour est connaissance et expérience; il oriente l’affectivité et éclaire la pensée, sans séparer la théologie de la spiritualité.
C’est là un apport important du saint moine de ne pas couper la théologie de la spiritualité, mais de les intégrer dans une expérience de foi qui rend compte du mystère de l’amour divin vécu comme une histoire de grâce. Cette expérience spirituelle vécue en communauté est un lieu théologique où le Père se dit en son Fils dans l’Esprit.
Le pape émérite Benoît XVI consacra son audience générale du 21 octobre 2009 à saint Bernard en insistant sur l’union entre théologie et foi. “On prétend parfois résoudre les questions fondamentales sur Dieu, sur l’homme et sur le monde à travers les seules forces de la raison. Saint Bernard, au contraire, solidement ancré dans la Bible, et dans les Pères de l’Église, nous rappelle que sans une profonde foi en Dieu alimentée par la prière et par la contemplation, par un rapport intime avec le Seigneur, nos réflexions sur les mystères divins risquent de devenir un vain exercice intellectuel, et perdent leur crédibilité. La théologie renvoie à la “science des saints”, à leur intuition des mystères du Dieu vivant, à leur sagesse, don de l’Esprit Saint, qui deviennent un point de référence de la pensée théologique. Avec Bernard de Clairvaux, nous aussi nous devons reconnaître que l’homme cherche mieux et trouve plus facilement Dieu avec la prière qu’avec la discussion”. Lire la suite sur le blogue de Jacques Gauthier