Le célèbre philosophe a même été admis comme postulant chez les Jésuites !Si tout le monde connaît la célèbre “hutte” du philosophe à Todtnauberg, sur les pentes boisées de la Forêt-Noire, c’est du côté de Messkirch, son village natal du Bade-Wurtemberg, qu’il faut chercher les racines familiales de Martin Heidegger.
Une enfance plongée dans la piété familiale
Fils du sacristain du village, habitant de ce fait dans une maison située à l’ombre de la belle église paroissiale, le jeune Martin grandira dans un milieu simple mais profondément pieux. Son père ajoutait ainsi à son métier de tonnelier le service de l’église, et la mère du futur philosophe l’éleva, son frère et lui, dans la simplicité d’une vie paysanne rythmée par la vie de prière. Le voisinage de l’abbaye bénédictine de Beuron, qui liait vie monastique et défense vigoureuse de la foi dans une Allemagne en proie au Kulturkampf, contribua fortement à l’attrait de Martin Heidegger pour la vie sacerdotale. Brillant, le jeune Heidegger est envoyé à Lindau, sur les rives du lac de Constance où il suit sa scolarité au Gymnasium tout en étant hébergé dans le petit-séminaire de la ville. Il poursuivra ensuite son lycée à Fribourg-en-Bresgau, ville universitaire prestigieuse jusqu’à l’obtention de son Abitur, l’équivalent du baccalauréat.
Un futur jésuite ?
En septembre 1909, Martin Heidegger est admis comme postulant au sein de la Compagnie de Jésus ! Il doit rallier la communauté la plus proche, alors située en Autriche à Tisis, du fait de l’interdiction des Jésuites sur le sol allemand. Malheureusement, des problèmes cardiaques contraignent les supérieurs à rejeter l’admission du jeune Heidegger, toute faiblesse physique étant jugée incompatible avec l’exigeante vie sacerdotale. Les douleurs cardiaques de Martin devaient alors être assez sérieuses pour constituer un motif de refus. Bien que touché par cet échec, Martin Heidegger ne baisse pas les bras et demande son entrée au séminaire diocésain de Fribourg où il est admis à l’hiver 1909. Il y suit alors les cours de théologie jusqu’en février 1911 où ses douleurs cardiaques se réveillent à nouveau et entraînent sa mise au repos forcée par le médecin du séminaire. Le jeune prodige de Messkirch retrouve alors l’atmosphère familiale… et ne reprendra plus le chemin de la prêtrise.
Du jeune intellectuel catholique à l’auteur de Être et temps
Mais les tiraillement intellectuels du futur philosophe le réclament déjà à plein temps. Rentré à Fribourg, étudiant les mathématiques et les sciences puis retournant à son intérêt premier pour la philosophie, Heidegger noue de fortes amitiés avec de jeunes intellectuels et devient l’un des jeunes espoirs de la philosophie catholique allemande. Suivra toute une vie dédiée à la philosophie et qui feront de Heidegger un philosophe majeur du XXe siècle, avec ses renoncements et… ses zones d’ombre. À découvrir dans l’excellente – et définitive ? – biographie que vient de lui consacrer Guillaume Payen aux éditions Perrin. Plus de 600 pages qui permettent de confronter l’homme à son oeuvre, dans les décennies troublées que traversa l’Allemagne et qui permettent de percer ici et là … le mystère Heidegger.