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Le pape François au Parlement européen : interférence ou dialogue ?

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Anna Pelleri - publié le 24/11/14
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Pasquale Annicchino, chercheur au Robert Schuman Centre for Advanced Studies, revient pour Aleteia sur la signification de cette visite express du Saint-Père.
Le pape François s’apprête à se rendre au siège du Parlement européen à Strasbourg. Interférence de l’Église dans la vie politique des États – et de l’Union – ou possibilité de rencontre et de dialogue ?

Comme l’a souligné le cardinal Marx, président de la Commission des conférences des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE),  avec cette visite le Pape « marque son soutien et son encouragement à la poursuite du projet d’intégration et d’unité de l’Europe ». Dans ce processus, le dialogue entre l’Union européenne et la liberté religieuse joue un rôle important.

Aleteia a demandé à Pasquale Annicchino, chercheur au Robert Schuman Centre for Advanced Studies de l’Institut universitaire européen de Fiesole (Florence), de nous aider à comprendre certains aspects de la politique de l’Union européenne en matière de liberté religieuse, ainsi que l’impact de la visite d’un pape à cette importante institution. 

Aleteia : La visite du pape François au Parlement européen est-elle vue comme la visite d’un chef religieux ou celle d’un chef d’État ?
Pasquale Annicchino :
Officiellement on pourrait soutenir la seconde hypothèse, mais je crois que l’invitation était adressée avant tout au chef religieux. Martin Schulz s’est toujours montré très attentif au dialogue avec les confessions religieuses de la part des institutions de l’Union, beaucoup plus que Barroso lui-même quand il était président de la Commission européenne. Comme l’a souligné le cardinal Reinhard Marx, président de la COMECE, la visite du Pape est d’une importance particulière parce qu’elle survient avant une visite papale officielle dans l’un des États membres.

Les positions de l’Église sur des questions importantes comme la vie, l’économie, la famille, etc., sont résolument différentes de celles que l’Union européenne préconise depuis toujours. Quel rapport y a-t-il entre l’UE et l’Église ? Quel impact peut avoir la visite du Pape sur le plan de l’orientation sur ces thèmes ?
Je dirais qu’il n’y a pas toujours un conflit explicite entre les positions de l’Union européenne en tant que telles et celles de l’Église. De plus en plus souvent, les positions des institutions de l’Union ne font que refléter certaines exigences de la modernité (ou de la postmodernité) ; l’Église – par l’intermédiaire de la COMECE – fait son travail légitime à  Bruxelles pour dialoguer sur toutes les questions, en exposant son point de vue. La visite du pape François pourrait certainement avoir une incidence, en ravivant le débat, surtout sur les thèmes liés au social et à l’économie. Son discours pourrait sûrement aborder des thèmes beaucoup plus larges liés à la sécularisation croissante de l’Europe.

Quelles dispositions adopte l’Union européenne en matière de liberté religieuse ?
On a parfois tendance à sous-évaluer l’impact du droit de l’Union européenne sur le phénomène religieux. La réalité des faits nous dit au contraire qu’en dépit des tentatives pour empêcher l’incidence du droit européen sur le droit interne, les décisions de Bruxelles et de la Cour de justice du Luxembourg ont un impact réel sur les ordres juridiques internes. Il suffit de de penser au droit antidiscriminatoire ou à une récente décision relative à la définition juridique de la notion de « persécution religieuse ».

Voici quelques semaines est sorti le Rapport 2014 de Aide à l’Église en détresse (AED), publié tous les deux ans sur la liberté religieuse dans le monde. Il en ressort que la majorité des pays connaissent une dégradation relative, pas seulement les pays traditionnellement hostiles à la religion (Chine) ou au pluralisme (Émirats), mais même certains pays occidentaux. Qu’en pensez-vous ?

Les principaux rapports internationaux indiquent tous une tendance à l’augmentation des restrictions apportées à la religion dans la sphère publique, parallèlement à l’augmentation des hostilités sociales liées à la religion. Dans de nombreux cas, ces deux tendances se traduisent par des restrictions au droit à la liberté religieuse. La promotion de normes favorables au droit à la liberté religieuse peut certainement aider. En même temps, il est nécessaire, surtout en Europe et dans certaines réalités particulièrement sécularisées, que les dirigeants politiques comprennent de nouveau l’importance du facteur religieux. Comme le souligne le rapport de l’Aide à l’Église en détresse, l’analphabétisme religieux des hommes politiques occidentaux constitue un obstacle important à la compréhension des évolutions politiques dans le reste du monde.

L’Italienne Federica Mogherini, nouvelle responsable de la politique étrangère de l’Union, semble vouloir changer l’attitude de l’UE à l’égard de l’ISIS et rendre Bruxelles beaucoup plus active sur le front de la lutte contre l’autoproclamé État islamique, de même qu’elle a manifesté un intérêt vis-à-vis de la liberté religieuse dans le monde. Le confirmez-vous ? Qu’en pensez-
vous ?
P.A. :
Concernant la liberté religieuse, Federica Mogherini a souligné son intérêt pour cette question. Reste à savoir ce qu’elle réussira à faire. En ce qui concerne la violence de l’État islamique, l’Union européenne peut s’employer, au niveau diplomatique, à assurer un minimum de coordination entre les décisions des chancelleries nationales, celles-ci restant, à ce jour, les centres de décision en la matière.

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