L’Eglise fête le 28 août le « Docteur de la grâce » dont l’œuvre n’a cessé d’irriguer les chrétiens et les chercheurs de Dieu, de siècle en siècle.
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(Illustration : Saint Augustin par Antonio Rodriguez 1636-1691 )
Du blogue de Jacques Gauthier :
Né en 354 à Tagaste en Algérie, Augustin fait ses études à Carthage où il vit plusieurs aventures amoureuses. Il a un fils en 372, Adéotat, d’une jeune maîtresse à laquelle il reste lié durant quatorze ans. Il enseigne pendant neuf ans à Carthage, puis à Rome et à Milan. Il est déçu et inquiet, cherche le repos en Dieu, comme il l’écrira plus tard dans un livre personnel qui traversera les siècles, Les Confessions : «Tu nous as faits pour toi et notre cœur est sans repos jusqu’à tant qu’il repose en toi.»
Augustin cherche Dieu; là est le fondement de son désir. « Louera le Seigneur quiconque le cherche. Qui cherche, en effet, le trouvera et, trouvant, le louera » (Conf. I, 1). Ce désir de chercher et de louer Dieu est un dynamisme intérieur, une libre attraction que tout peut détourner. « C’était toi que je cherchais. Tu étais et au-dedans du plus profond et au-dessus du plus haut de mon être » (Conf. III, 11).
Le retour à Dieu
Ce Dieu intime révélé dans le Christ lui sera surtout communiqué par la prédication de saint Ambroise, évêque de Milan, et par la lecture de saint Paul, dont l’épître aux Romains lui procure « une lumière de sérénité déversée dans mon cœur » (Conf. VIII, 29). Il reçoit le baptême en 387, l’année de ses trente-trois ans, en même temps que son fils. Cette conversion, il la doit beaucoup aux larmes et aux prières de sa mère, qui deviendra sainte Monique.
Que serait devenu Augustin sans l’amour priant de sa mère qui l’enfanta une seconde fois? L’Église célèbre d’ailleurs la mère (27 août) avant le fils (28 août). En attendant l’embarquement à Ostie pour rentrer en Afrique, Augustin et sa mère aspirent à la vie éternelle dans une sorte d’extase commune. Quelques jours plus tard, Monique meurt à l’âge de 56 ans. Son fils la pleura longtemps, mais il savait qu’elle était entrée dans la joie de son Seigneur.
La tension vers Dieu creuse le désir qui devient une soif d’amour infini, malgré les limites et les peurs. Sur ce chemin du retour à Dieu, « Aime et fais ce que tu veux », dit Augustin, même si chacun fait ce qu’il peut. Pour lui, l’amour est le guide qui nous aide à aller au-delà de nous-mêmes. Comment? En plongeant en nous-mêmes par la prière intérieure et le désir. « Il est dans l’âme une autre prière, intérieure celle-là, qui n’a pas de cesse, c’est le désir. Quoi que tu fasses, si tu désires le sabbat éternel, tu ne cesses de prier. Si tu ne veux pas cesser de prier, ne cesse pas non plus de désirer » (Homélies sur les psaumes). Il s’agit de revenir à soi, au plus intime du cœur, où Dieu demeure.
Augustin vend ses biens et mène une vie de prière où il laisse l’Esprit Saint mettre en lui l’amour de Dieu pour son Église. Il sait que prier, c’est désirer, et désirer, c’est prier, aussi peut-il prier sans cesse. Il reçoit le sacerdoce, à la demande du peuple, puis est nommé évêque de la ville portuaire d’Hippone en 396. Son immense œuvre théologique fait de lui le « Docteur de la grâce » qui influencera tant de fondateurs et fondatrices de communautés religieuses. Il meurt en 430, alors que les Vandales dévastent l’Afrique et sa ville. Il est fêté le 28 août; la veille, l’Église célèbre sa mère.
Les Confessions : œuvre de désir et de prière
Ce plus haut que le plus haut et plus intime que le plus intime, Augustin en relate la rencontre dans son œuvre de désir que sont Les Confessions, divisées en treize livres ou chapitres. Ce classique de la littérature chrétienne est une quête du bonheur qui passe par la recherche de Dieu : « Quand je te cherche, toi, mon Dieu, c’est une vie de bonheur que je cherche. Ah! puissé-je te chercher pour que vive mon âme, puisque la vie de mon corps, c’est mon âme et que la vie de mon âme, c’est toi! » (Conf. X, 20). Plus il trouve Dieu, plus il le cherche, car son désir s’agrandit à la mesure de sa prière.
Les Confessions sont avant tout une longue prière qui doit être lue dans un climat de prière pour en saisir toute la plénitude. Augustin tutoie Dieu audacieusement et son désir a des ailes. Son « je » assoiffé de bonheur s’adresse à un « Tu » qui va le combler d’amour : « Puissé-je, Seigneur, me ressouvenir dans l’action de grâces et confesser tes miséricordes sur moi » (Conf. VIII, 1). Quinze siècles plus tard, Thérèse de Lisieux reprendra le même désir de louange dans son Histoire d’une âme: « chanter les miséricordes du Seigneur ».
Un maître de la prière
Augustin avait l’habitude de dire dans sa prière : « Dieu, que je me connaisse et que Tu me connaisses. » Il commence ainsi son célèbre examen de conscience que l’on retrouve au livre X des Confessions : « Te connaître, ô mon connaisseur! Connaître comme je suis connu » (X, 1). Dans la prière, connaissance de soi et connaissance de Dieu vont de pair. En cherchant et en priant Dieu au plus intime de soi, l’on se trouve et se découvre comme un être de désir créé à son image.
En écrivant ses Confessions, il répond à un besoin spirituel qui n’est pas étranger au conseil de Socrate : « Connais-toi toi-même! » Pour Augustin, cette connaissance passe par l’écoute de Dieu qui seul parle bien de lui-même et de l’humanité : « Pour toi, Seigneur, dont l’œil voit à nu l’abîme de l’humaine conscience, qu’y aurait-il de caché en moi, quand même je ne voudrais à ta gloire le confesser? » (Conf. X, 2).
Augustin montre que pour trouver Dieu il faut entrer en soi-même. Ainsi, nous demeurons en Dieu qui est plus grand que nous. Dieu nous invite à nous dépasser par le désir d’aimer et de prier. Ce Dieu est la Beauté en nous, et son mystère nous inonde de sa miséricorde.
« J’ai tardé à t’aimer, Beauté si ancienne et si neuve, j’ai tardé à t’aimer! Ah! voilà : tu étais dedans, moi dehors… Je t’ai goûté : j’ai faim et soif. Tu m’as touché : j’ai pris feu pour la paix que tu donnes. Une fois soudé à toi de tout mon être, il n’y aura plus pour moi douleur et labeur et ma vie sera, toute pleine de toi, la vie… Plein de toi, je ne le suis pas; aussi mon être me pèse… Ah! le pauvre être que je suis! Aie pitié de moi, Seigneur. Voici mes plaies que je ne cache point : tu es médecin, je suis malade; tu es miséricordieux, j’ai de la misère » (Conf. X, 27-28).