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Comment devenir patient dans une société de consommateurs 

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Jean-Michel Castaing - publié le 10/09/24
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Le chrétien vit la remise à plus tard de la satisfaction de ses désirs comme une grâce : patienter est pour lui est une occasion de grandir en sainteté, dans la vertu d’espérance.

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La mentalité de client-roi qui est la nôtre aujourd’hui s’accommode mal des atermoiements dans la satisfaction de nos désirs. L’Européen occidental est devenu impatient. La société de consommation a fait de lui un créancier qui trépigne, tel un ado caractériel, dès lors que la réponse à ses demandes souffre le moindre retard. Et la spiritualité n’est pas à l’abri de cette disposition psychologique. Cette avidité, cette exaspération devant tout délai à ses satisfactions se répercutent en effet au niveau spirituel. Aussi le consommateur ne goûte-t-il plus les promesses du christianisme d’un bonheur remis à plus tard. 

La joie ici-bas ?

Certes, le Christ a promis à ses disciples de leur procurer le repos (Mt 11, 28) et de leur donner la joie dès cette vie ici-bas. Cependant, ces promesses semblent trop incertaines pour appâter le chaland. Faut-il se mettre au service des autres pour en bénéficier ? Ou bien porter sa croix ? Devenir pauvre en esprit ? Pour le consommateur qui n’a plus que de vagues réminiscences de catéchisme en tête, la foi chrétienne n’est pas très claire… 

Face à ces perspectives indéterminées, le marché des religions ou des « spiritualités », offre des produits a priori plus alléchants. Certaines offres proposent même un « kit » de satisfaction pourvu que l’on suive un parcours initiatique dont elles dévoilent les différentes étapes comme on le ferait d’un dépliant touristique : c’est simple, concret et sans aléas. Face à ces offres « clé en main », l’invitation du Christ à porter sa croix chaque jour ne fait pas le poids ! Cependant, la sagesse du christianisme avertit les clients de ces « spiritualités » que celles-ci souffrent de deux tares qu’il convient de spécifier afin de ne pas tomber dans ce panneau.

Redécouvrir les vertus de la patience

Le premiers défaut de ces recettes spirituelles « clé en main » réside dans leur méconnaissance des fondamentaux de l’existence humaine. Celle-ci ne peut faire l’impasse sur l’inassouvissement inhérent à notre condition. Vouloir brûler les étapes, trépigner d’impatience n’est pas un signe de bonne santé spirituelle. Toutes les religions et sagesses du monde ont fait l’éloge de la patience. Rien de tel que la constance et la persévérance pour forger un caractère. Chez l’adulte, la patience est un signe de maturité psychologique et spirituelle. L’homme fait sait qu’il ne suffit pas d’un claquement de doigt pour que le bonheur lui tombe dessus, ou bien de suivre à la lettre les recettes d’un gourou en « développement personnel ». D’autant plus que ces recettes ont tendance à nous infantiliser, comme si notre liberté et nos facultés d’intelligence et de discernement n’avaient aucune part dans la quête de notre bonheur. Les pseudo-spiritualités qui promettent un bien-être immédiat, voire à portée de clic si on fonctionne en « distanciel », sont de vulgaires contrefaçons de sagesse. 

Compter sur Dieu

Le second défaut de ces produits frelatés consiste dans leur occultation de Dieu. Dans leur « mode d'emploi », jamais n’est fait mention d’un Autre transcendant susceptible d’accompagner la recherche de l’homme en quête de plénitude et de le faire sortir de l’orbe de son égo. Au contraire, tout se passe comme si la clé de la réussite résidait dans le tréfonds de la personne. Ici, la foi chrétienne détrompera avec profit notre consommateur : le bonheur se trouve en Dieu et celui qui le recherche se tournera avec profit vers la source transcendante de la Vie divine pour l’obtenir. Autrement dit, seul Dieu est en mesure de nous donner la joie véritable. Et cette voie est d’autant plus certaine que la foi chrétienne nous révèle que Dieu est un Père attentionné qui n’a qu’un désir : faire le bonheur de Ses enfants que nous sommes. Voilà pourquoi la foi chrétienne nous invite à ne pas compter en priorité sur nos ressources propres mais à nous adresser à Celui qui nous a promis d’entrer en alliance éternelle avec nous. Le bonheur réside dans le dialogue et la communion entre Lui et nous, non dans l’observation de recettes qui nous enfermerait dans l’espace étriqué de notre moi.

Le régime de l’espérance

Quant à l’exercice de la vertu de patience, elle s’appelle « espérance » en régime chrétien. Il ne s’agit de s’user en résignation contre-nature mais plutôt de tenir ferme dans la foi dans les promesses de Dieu. Dès lors que le croyant sait que Dieu habite sa patience, tous les atermoiements, tous les retards sont pour lui des étapes dans sa maturité spirituelle et non des motifs d’aigreur et de récrimination. Greffée sur la vertu d’espérance, la patience porte des fruits que le consommateur compulsif, insatisfait et aliéné, est incapable d’imaginer et de concevoir. On grandit davantage en sainteté en attendant de Dieu l’heure propice où il comblera nos désirs plutôt qu’en Lui forçant la main comme un enfant gâté et trépignant. 

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