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Hubert de Boisredon : “On ne devient pas chef tout seul”

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Cécile Séveirac - publié le 11/10/25
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Dans son livre à paraître le 24 octobre, "Le courage des chefs" (Mame), le chef d'entreprise Hubert de Boisredon invite à repenser la définition du chef. Loin de toute notion de pouvoir, le chef véritable est fait pour servir. Surtout, devenir chef n'est pas destiné qu'à une élite. "Chacun est invité à mener sa propre vie, plutôt que de la subir. Être chef, c’est avant tout être fidèle à soi-même", explique l'auteur. Entretien.

Dans un monde en quête de repères et de sens, la notion de chef est souvent mal comprise. Diriger n’est pas seulement exercer un pouvoir ou imposer des décisions : c’est avant tout inspirer, rassembler et servir un projet plus grand que soi, explique Hubert de Boisredon, entrepreneur engagé et auteur du livre Le courage des chefs (Mame, octobre 2025). Pour lui, être chef concerne toute personne désireuse de prendre en main sa propre vie. C’est une invitation à oser suivre sa voie, à faire preuve de courage et à développer une influence positive autour de soi. Diriger, c’est avant tout servir, explique-t-il à Aleteia. Entretien.

Aleteia : Être chef, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
Hubert de Boisredon : Être chef ne concerne pas uniquement ceux qui dirigent des équipes : cela nous concerne tous. Chacun est invité à mener sa propre vie, plutôt que de la subir. Être chef, c’est avant tout être fidèle à soi-même, à ses convictions, et oser prendre le risque de suivre sa voie. Mais c’est aussi la capacité à rassembler autour d’un projet commun, à donner une direction claire et inspirante. C’est ce qu’on appelle le leadership : le leader inspire et entraîne, le chef décide et assume. Ces deux dimensions sont indissociables.

Être chef, ce n’est pas imposer sans écouter. Ce n’est pas dominer, ni ramener les choses à soi.

Et qu’est-ce que cela n’est pas ?
Être chef, ce n’est pas imposer sans écouter. Ce n’est pas dominer, ni ramener les choses à soi. C’est au contraire un engagement profond au service du bien commun. Le rôle du chef est d’assumer la direction pour quelque chose de plus grand que lui. Or, notre époque a tendance à dévoyer cette notion. Ce qui se passe en ce moment dans l'actualité politique française le montre : trop de dirigeants cherchent avant tout à imposer leurs idées ou à satisfaire leurs intérêts personnels, au lieu de rassembler autour d’un projet collectif, d'un bien plus grand qui est celui de la France.

Quelles sont, selon vous, les qualités essentielles d’un vrai chef ?
La première, c’est la force d’âme : percevoir que diriger est une vocation, qui donne à servir autrui. Cela suppose un détachement du pouvoir, pour pouvoir exercer sa responsabilité librement. La deuxième, c’est l’authenticité : oser être soi, donc accepter sa vulnérabilité. Le chef qui croit pouvoir tout décider seul finit isolé. Les décisions justes se prennent toujours avec et par les autres.

Diriger, est-ce un don inné ou une compétence qui s’apprend ?
Je crois que le leadership se cultive. Certains ont sans doute des aptitudes naturelles, mais le courage, lui, est accessible à tous. Chacun peut le réveiller en soi. Ce courage se nourrit de l’inspiration : rencontrer des personnes qui nous élèvent, qui nous montrent un chemin. Pour moi, ce furent mes grands-parents, mais aussi des dirigeants d’entreprise qui savaient écouter et prendre soin de leurs équipes. Et puis des figures comme Charles Péguy, François d’Assise, ou les résistants, qui ont incarné ce que signifie "servir".

On ne devient pas chef tout seul.

Pour y travailler, nous pouvons donner trois pistes. D’abord, oser croire en son bonheur. Croire qu’on peut donner le meilleur de soi-même, et que cela a un impact positif autour de nous. Ensuite, identifier les freins qui peuvent nous empêcher d'avancer en ce sens : le confort du statu quo, la peur de l’échec, ou encore le rejet de soi. Se dire "je n’en suis pas capable" est un piège redoutable. Enfin, décider d’avancer. On ne devient pas chef tout seul : il faut s’entourer, se laisser interpeller, être accompagné par des personnes de confiance qui nous encouragent et nous remettent en question.

Quelles sont les expériences à vivre pour se forger un caractère de chef ? 
Le courage, c’est oser sortir des normes, des conventions sociales, des attentes familiales. C’est choisir sa voie, même quand elle surprend. À 22 ans, j’ai tout quitté pour partir au Chili créer une banque de microcrédits dans les quartiers pauvres. Cette aventure m’a appris à entreprendre au service des autres, à ne pas craindre l’échec, à forger mon caractère. Vouloir tout sécuriser empêche de grandir. Être chef, c’est accepter de se tromper pour mieux se relever. Comme le disait Churchill : "Le succès, c'est d'aller d'échec en échec sans perdre son enthousiasme".

Qui incarne, selon vous, le chef parfait ?
Pour moi, c’est le Christ. Il n’a cessé d’être vrai et de se confronter avec courage aux conventions, notamment à celles des pharisiens qui voulaient l’empêcher d’annoncer la bonne nouvelle. Bien qu’Il soit doté de toute puissance, Il n’a jamais cherché à s’y accrocher : au contraire, Il s’est continuellement dépouillé de ce pouvoir pour une valeur supérieure — l’amour. Son autorité ne repose pas sur la force, mais sur l’amour inconditionnel pour tous. Et c’est précisément en renonçant à sa puissance que sa vie a porté un fruit d’une fécondité incomparable : deux mille ans plus tard, la force de son message demeure intacte. En ce sens, Il montre la voie : c’est le leadership de l’amour, de la rencontre, qui porte un fruit. Hérode est passé, Jésus demeure. Le chrétien a cette chance de comprendre, à travers l’exemple du Christ, la grandeur de cette vocation de leader : vivre son influence non pas pour lui-même, mais pour le bien de tous. J’invite chacun à ne pas avoir peur de devenir leader, à développer sa capacité d’aimer et de servir à travers son leadership.

Quel message souhaitez-vous transmettre à travers votre livre ?
Mon souhait est que ce livre réveille en chacun la confiance dans la grandeur de sa propre vie, et rassemble ceux qui veulent mettre leur influence au service du bien commun. Le monde, plus que jamais dans le contexte actuel, a besoin de chefs lucides, courageux, animés d’un vrai sens du service. Il y a urgence.

Pratique

Le courage des chefs, Hubert de Boisredon, Mame, octobre 2025, 14,90 euros.
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