À deux jours près, elle aurait pu finir sous les chenilles des pelleteuses venues la démolir. Le feuilleton qui entoure cette petite église des Yvelines n’a pas fini d’être écrit. Le 2 octobre, l’église Saint-Pierre de Notre-Dame-de-la-Mer, datée du XIIe siècle principalement, a été sauvée d’une démolition certaine grâce à la mobilisation de l’association Urgences patrimoine, qui œuvre pour la sauvegarde du patrimoine non-protégé, depuis 2014. Une campagne de promesses de dons, 25.000 euros, a été réalisée en un temps record (deux jours) et devrait permettre de lancer des travaux d’urgence rapidement, pour consolider un édifice dans un état critique.
Historiquement église communale de Notre-Dame-de-la-Mer, fort de 700 âmes, l’église Saint-Pierre est progressivement boudée par les paroissiens alors que se construit au XIXe siècle la chapelle de Notre-Dame-de-la-Mer, devenue avec le temps et tous les 15 août, un haut lieu de pèlerinage. À Saint-Pierre, les offices se font plus rares. "Les gens sont attachés à Notre-Dame-de-la-Mer. À Saint-Pierre, la dernière messe a eu lieu dans les années 2010. Elle a été vidée de ses objets liturgiques et de son mobilier depuis des années. J’ai bien tenté de lancer des projets de rénovation, mais cela demandait beaucoup d’argent et de volonté", plaide le père Didier Lenouvel, curé du groupement paroissial de Bonnières.
Site dangereux
Il faut dire que la position géographique de l’édifice ne joue pas en sa faveur. Pire, elle va provoquer son abandon progressif. Celle-ci jouxte une route départementale, "très passante", construite évidemment après l’église, pour rejoindre la Normandie. Avec les années, le bitume accumulé arrive à hauteur de la gouttière de l’église. "Le site est dangereux, on ne peut se garer que de l’autre côté de la route. Un camion lancé à bonne vitesse sur une route trempée pourrait provoquer un drame considérable." Si "l’église ne risque pas de s’écrouler demain", rassure Alexandra Sobczak-Romanski, présidente d’Urgences patrimoine, son état est très critique. "L’église nécessite de lourds travaux sur sa charpente, sur sa toiture ou sur le mur qui donne sur la route." "C’est simple, au cours de la dernière messe, nous étions tous trempés et la toiture n’était pas rassurante", se souvient le père Didier Lenouvel.
Une campagne de dons éclair
Pour le maire, devant le danger représenté par la vétusté des lieux, la solution, dramatique, est toute trouvée : il faut raser les lieux. Il envisage alors un arrêté de péril, qui condamne l’édifice. Alertée durant l’été, l’association Urgences patrimoine se mobilise pour sauver Saint-Pierre, et monte fin septembre une campagne de promesse de dons éclair pour consolider l’édifice. L’objectif de l’association est clair : convaincre le maire de renoncer à son projet en prenant à sa charge les quelque 60.000 euros de frais de travaux de mise en sécurité de l’édifice. "Il s’agit des premiers soins pour stopper l’hémorragie. En deux jours, nous avons récolté 25.000 euros de promesse de dons, c’était très encourageant ! Le projet a plu au maire, qui s’est engagé à préserver Saint-Pierre." Restait à empêcher la désacralisation de l’église, qui n’attendait plus que la signature du préfet. "Cela s’est joué à deux jours près. C’est une belle preuve que l’église a de beaux jours devant elle", s’enthousiasme Alexandra Sobczak-Romanski.

Le père Didier Lenouvel se montre plus nuancé. "Au lieu de restaurer l’église au même emplacement, il aurait été plus judicieux de déplacer ses murs avec les piliers et les fonts baptismaux, seuls éléments qui en vaillent la peine, sur un terrain plus sûr, où nous aurions reconstruit Saint-Pierre avec les scouts de la région. C’est une bonne idée de restaurer le patrimoine, mais la dangerosité des lieux reste la même." Alexandra Sobczak-Romanski salue de son côté une "victoire", qui permettra de "faire tenir l’église encore quelques années", avant que les grands travaux de reconstruction soient lancés. En attendant, les premiers pansements destinés à Saint-Pierre devraient arriver "dans les six mois", assure l’association de protection du patrimoine, qui a déjà recruté un charpentier, prêt à y travailler. "Nous sommes dans les starting-blocks !"










