SEMAINE DU DON
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"Avec quoi compléter cette tenue pour être chic et décontractée ?" (photo à l’appui), "Dois-je augmenter les doses de lait de mon bébé ?", "Peux-tu écrire un message pour remercier des amis de nous avoir invités à dîner ?"… Les prompts posés à ChatGPT s’emparent de tous les sujets. Il n’existe aucun domaine dans lequel l’intelligence artificielle (IA) ne puisse donner une réponse, un conseil ou une recommandation. La réponse est immédiate, précise, et même personnalisée si le prompt est suffisamment détaillé. Mais il arrive que le recours systématique à l’IA prenne le pas sur le bon sens, la simple réflexion ou l’effort de mémoire.
Pour certains, utiliser ChatGPT est devenu un réflexe pavlovien. "Cet usage fait désormais partie de nos vies‚ car nous avons pris l’habitude de formuler un ensemble de demandes à Google, mais aussi à des assistants virtuels comme Alexa ou Siri et désormais à des IA génératives comme ChatGPT, Perplexity, Claude, Mistral ou Deepseek‚ de questions banales comme le temps de cuisson d’un œuf dur à des demandes beaucoup plus complexes", constate Jean Pouly, auteur du récent ouvrage Transmettre et éduquer à l’heure de ChatGPT (Artège). "La fonction d’outil de recherche que Google a monopolisée depuis 25 ans s’en trouve totalement renouvelée et dépassée. Il est à parier que ces outils vont devenir totalement indispensables dans notre vie quotidienne pour tout et n’importe quoi. De véritables prothèses digitales dont nous ne pourrons plus nous passer", prédit le consultant en médiation numérique et fondateur du "Smartphone Show".
1Affectation des capacités cognitives
Des prothèses dont on ne peut plus se passer alors même que nous avons les capacités pour s’en passer ! En réfléchissant à l’usage qu’il fait de ChatGPT, Pierre, coureur aguerri, réalise qu’il en oublie les règles de calculs les plus élémentaires. "J’ai voulu savoir combien de temps je mettrais sur un parcours plus grand, il suffisait de multiplier par dix, mais j’ai demandé à ChatGPT", reconnaît-il. Il avoue aussi poser plusieurs fois la même question, en l’occurrence, "comment enlever une tache de pamplemousse ?", et en oublier aussitôt la réponse. "J’identifie un premier risque dans l’utilisation récurrente de ces différentes IA dans notre quotidien. Celui d’affecter nos facultés intellectuelles", alerte Jean Pouly. "À force de déléguer différentes actions cognitives à des machines, nous risquons de fragiliser, de réduire, atrophier puis de perdre, petit à petit, différentes capacités intellectuelles comme réfléchir, relier des choses entre elles, synthétiser, mémoriser, déduire, classer, hiérarchiser, s’orienter, etc." Le cerveau "comprend" qu’il est plus important de mémoriser le chemin qui mène à l’information que l’information elle-même.
2Altération du lien entre les personnes
À quoi bon poser des questions à ses proches, ses amis ou ses pairs quand ChatGPT fournit la réponse immédiatement ? Marie, mère de deux jeunes enfants, directrice d’une start-up, a l’habitude de poser ses questions à l’IA pour l’aider à éduquer ses enfants. Comment l’habiller aujourd’hui ? Combien de doses de lait à cet âge ? Comment l’endormir ? Pourquoi régurgite-t-il autant ? "Je trouve ça hyper pratique, je me souviens de ma sœur qui posait des questions à notre mère pour un oui ou pour un non !", confie la jeune femme, fière de son indépendance.
Le recours systématique à ChatGPT nourrit une certaine forme de narcissisme.
"Il faut tout un village pour élever un enfant" dit le proverbe. Aujourd’hui, le village semble se réduire à ChatGPT. Ne perd-on pas là une richesse liée au lien entre les personnes, à la transmission de génération en génération, à l’échange et plus généralement à l’ouverture aux autres ? Faisons le parallèle avec les Chantiers Éducation, ces groupes de mères ou de pères qui se réunissent une fois par mois pour échanger et partager leur expérience de la parentalité. En confiant sa propre expérience, on s’enrichit aussi des expériences des autres, on se projette dans les années à venir, on s’ouvre à d’autres réalités que la sienne. Le recours systématique à ChatGPT nourrit une certaine forme de narcissisme : les questions posées à l'IA évoquent uniquement ses propres problèmes, il n'y a aucun échange, aucune ouverture à l'autre.
3Perte d'esprit critique
Quant à Irène, elle ne s’habille plus sans avoir interrogé l’IA. Quelles chaussures avec cette jupe ? Est-ce que ces deux couleurs vont bien ensemble ? Quelle tenue pour un entretien d’embauche ? De même que pour les questions liées à l’éducation, le risque est de perdre toute confiance en soi, en sa capacité à choisir, à discerner, et à se laisser influencer par une machine. C’est faire fi de toute créativité et prendre le risque de tomber dans le piège des "bulles de filtre", ce filtrage lié aux algorithmes qui n’expose l’utilisateur qu'à des contenus qui vont lui plaire ou lui confirmer ce qu’il pense déjà.
Un système qui rend captif et qui prive de tout esprit critique. "Si le fil d’informations de mon réseau social préféré m’affiche des informations qui vont dans mon sens, je me sens confirmé dans ce que je crois et je vais l’utiliser de plus en plus", explique Jean Pouly. "Il est beaucoup plus difficile d’accepter une réalité complexe, ambivalente, paradoxale et qui va à l’encontre de nos croyances. En avoir conscience est déjà un premier pas pour garder un esprit critique et utiliser au mieux ces nouveaux outils."











