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Au détour de la chapelle Saint-Vincent-de-Paul, dans la vaste église parisienne de Saint-Sulpice, le visiteur découvre une œuvre de marbre qui attire le regard et touche le cœur. Le sculpteur Émilien Cabuchet y a représenté le saint tenant de jeunes enfants, rassemblés autour de lui comme sous une aile protectrice. Tout dans la composition exprime une tendresse paternelle : l’un des enfants se blottit contre lui, un autre lève vers lui un regard confiant, tandis que le visage du saint rayonne de bonté.
La pierre, sous le ciseau de Cabuchet, semble se faire chair et transmettre quelque chose de cette charité inlassable qui caractérisa la vie de Vincent de Paul. Cette image sculptée vient rappeler qu’au XVIIe siècle, tant d’enfants abandonnés ou privés de ressources survivaient dans les rues de Paris, livrés à la faim et à la maladie. Pour eux, il fallait des hommes et des femmes charitables, capables de se consacrer sans compter. Saint Vincent fut de ceux-là, suscitant un véritable mouvement d’attention aux plus pauvres qui traverse encore l’histoire.
Une œuvre saluée par son temps
La statue ne passa pas inaperçue à son époque. Présentée au Salon de 1857, elle valut à Cabuchet une médaille et connut un grand succès auprès du public. Très vite, on en diffusa des reproductions, en petit ou grand format, destinées à orner églises et chapelles, mais aussi à entrer dans les maisons particulières. La popularité de l’œuvre atteste de la puissance du message transmis par la sculpture : la charité n’est pas une idée abstraite, mais une attitude concrète, incarnée dans le visage d’un homme attentif aux plus fragiles.

Ce succès permit au sculpteur de se faire remarquer et d’obtenir par la suite d’autres commandes prestigieuses, notamment lorsque la Ville de Paris entreprit de reconstituer la statuaire de l’Hôtel de Ville détruite après 1871.
Un artiste habité par la foi
Émilien Cabuchet était connu pour être un homme de foi, presque indifférent aux biens matériels. Dévoué à son art, il ne se consacrait qu’à des sujets religieux, comme s’il voulait faire de son talent un service rendu à Dieu. Une anecdote le montre bien : à une période où il traversait un temps de découragement et jugeait ses œuvres médiocres, il prit la route de Rome afin de faire bénir ses outils par le pape lui-même. Ce geste, à la fois simple et audacieux, dit quelque chose de l’humilité et de la ferveur de cet artiste, qui voyait dans son travail une forme de mission.
Saint Vincent de Paul, un héritage toujours vivant
À travers la statue de Cabuchet, c’est toute la mémoire de saint Vincent de Paul qui refait surface. Son œuvre est immense : fondateur des Lazaristes et des Filles de la Charité, soutien indéfectible des malades et des galériens, consolateur des provinces ravagées par la guerre, libérateur de captifs chrétiens, il fut aussi un acteur de la vie politique, conseiller et confesseur d’Anne d’Autriche pendant sa régence. Reconnu par l’Église, il fut proclamé "patron de toutes les œuvres de charité" par le pape Léon XIII.
Cette reconnaissance n’est pas une formule, mais la juste traduction de ce que les Français gardent en mémoire de "Monsieur Vincent" : un homme au grand cœur, qui sut transformer la société de son temps par sa charité créatrice.
Une présence vivante au cœur de Saint-Sulpice
L’histoire de l’église Saint-Sulpice elle-même éclaire cette œuvre. Après la Révolution, l’édifice, transformé en temple de la Raison, en magasin de fourrage ou encore en salle de banquet, se retrouve dépouillé de presque tous ses décors. Ce n’est qu’au XIXe siècle, lorsque le culte y est rétabli, que l’on entreprend de remeubler et de réenrichir l’église par de grandes commandes de tableaux et de statues, mobilisant les meilleurs artistes de l’époque. C’est dans ce contexte que Cabuchet reçut la commande d’une statue de saint Vincent, pour la chapelle qui lui est dédiée.
Aujourd’hui encore, elle rappelle aux visiteurs que la grandeur de l’art sacré ne réside pas seulement dans la virtuosité technique, mais dans sa capacité à rendre visible la tendresse de Dieu à travers la figure de ses saints. En contemplant saint Vincent tenant des enfants, le marbre nous invite à laisser parler en nous la charité, vertu qui ne se démode jamais.











