[HOMÉLIE] Les trois lumières de l’Assomption de la Vierge Marie

"Par la grâce de Dieu, je suis homme et chrétien ; par actions, grand pécheur ; par état, pèlerin sans abri, de la plus basse condition, toujours errant de lieu en lieu. Pour avoir, j’ai sur le dos un sac avec du pain sec, dans ma blouse la sainte Bible et c’est tout." Ces premiers mots des Récits d’un pèlerin russe donne une clé de compréhension de toute notre vie chrétienne. Par le baptême, nous sommes pèlerins. Plus exactement, le baptême fait de nous des fils en pèlerinage vers le Père. Les chrétiens des premiers siècles avaient une conscience très vive de leur condition pèlerine. Saint Augustin n’écrivait-il pas : "Dans son pèlerinage terrestre, l’Église avance entre les consolations de Dieu et les persécutions du monde" ?

À travers le Jubilé que nous vivons cette année, le pape François a voulu réveiller cette conscience dans le cœur des fidèles qui pourraient être tentés par une vie chrétienne toute d’apparences mais sans dynamisme intérieur, ou encore par une vie chrétienne qui ne se préoccuperait que d’améliorer les conditions de vie d’ici-bas mais sans espérance surnaturelle. L’Assomption de la Vierge Marie nous offre trois lumières qui jalonnent notre pèlerinage vers le Ciel.

La première lumière est celle de la Vierge Marie elle-même : elle est la première à être parvenue au terme de son pèlerinage terrestre. Elle est élevée au sein de la gloire du Ciel dans l’unité de son âme et de son corps, sans avoir jamais connu la corruption du péché. Comment est-elle entrée dans la béatitude éternelle ? La prière d’ouverture de la messe souligne que l’Assomption est d’abord l’œuvre de Dieu : "Dieu éternel et tout-puissant, tu as élevé jusqu’à la gloire du ciel, dans son âme et son corps, Marie, la Vierge immaculée, la Mère de ton Fils…" C’est donc Dieu seul qui a l’initiative, mais il a voulu compter sur la parfaite coopération de Marie qui a renouvelé son Fiat à chaque étape qui la conduisait jusqu’au Golgotha et enfin à la gloire de la Résurrection. Le récit de la Visitation que nous entendons au moment de l’évangile manifeste le cœur de cette coopération qui est la foi de Marie : "Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur" s’exclame Élisabeth (Lc 1, 45).

Voici maintenant une deuxième lumière pour raviver notre espérance. À la suite de la Vierge Marie, l’Église elle-même est appelée à la gloire du Ciel. Nous demandons dans la prière d’ouverture de la messe de ce jour : "Fais que, toujours tendus vers les réalités d’en haut, nous obtenions de partager sa gloire." Ce n’est pas seulement la Vierge Marie qui est appelée à la béatitude éternelle, c’est tout le corps du Christ et chaque baptisé en particulier. Dans son amour infini, Dieu a décidé de sauver la multitude par son Fils Jésus-Christ, de la conduire à la gloire comme il y a déjà conduit la Vierge Immaculée. Il n’attend qu’une seule chose de notre part : la coopération de notre cœur animé par la foi.

La troisième lumière qui nous soutient est la communion des saints et spécialement de la bienheureuse Vierge Marie. Aujourd’hui, l’Église se réjouit et rend grâce car Marie dans la gloire continue d’accompagner l’Église en pèlerinage sur terre. Désormais, Notre-Dame est "glorieuse au Ciel et puissante sur la terre" (Mgr Théas, Lourdes, homélie de l’Assomption, 15 août 1965). La providence divine a voulu que la mission maternelle de la bienheureuse Vierge Marie se poursuive au-delà de son pèlerinage terrestre. "Elle brille sur terre comme un signe de ferme espérance et de consolation pour le peuple de Dieu en marche" (Lumen Gentium, 68). Les apparitions comme celles de Lourdes ou de Fatima sont autant de "Visitations" par lesquelles Notre-Dame nous apporte un signe lumineux de son intercession tout en nous promettant le bonheur non de ce monde mais de l’autre (Cf. 3e apparition de la Vierge Marie à Bernadette Soubirous, 18 février 1858). 

En ce jour, prions avec Marie Immaculée, pour toutes les intentions de l’Église en pèlerinage vers la Jérusalem nouvelle. Supplions-la de veiller sur la France dont elle est la patronne principale : que sa maternelle intercession ranime en nos cœurs de pèlerins "l’espérance qui ne déçoit pas" ! (Rm 5, 5)