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Les premiers pas diplomatiques de Léon XIV

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Audience de Léon XIV avec les 184 diplomates accrédités près le Saint-Siège, 16 mai 2025

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Jean-Baptiste Noé - publié le 03/07/25
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"Que la paix soit avec vous" : les premiers mots de Léon XIV fraîchement élu, ont mis d’emblée la question de la paix au cœur de son pontificat. Deux mois après son élection, indique le géopoliticien Jean-Baptiste Noé, les premiers pas diplomatiques du nouveau pape tissent quelques orientations nouvelles.

Le principal changement diplomatique opéré par Léon XIV est un recentrage technique, en remettant la Secrétairerie d’État au cœur de la diplomatie pontificale. Celle-ci avait été quelque peu délaissée par François, qui se méfiait de la Curie, et qui s’appuyait sur des hommes et des réseaux parallèles, notamment le cardinal Zuppi et la communauté Sant’Egidio pour la tentative de conciliation avec la Russie. Léon XIV est revenu à un usage classique de la diplomatie, en s’appuyant sur les nonces, qu’il a reçus quelques jours après son élection, et sur l’appareil diplomatique du Saint-Siège.

Inflexions et ouvertures

Sur deux dossiers différents, deux inflexions ont été notées. La première concerne la Russie. Léon XIV s’est entretenu par téléphone avec Vladimir Poutine, alors même que le président russe n’avait plus parlé avec le Pape depuis 2021, soit avant l’invasion de l’Ukraine. Bien qu’il ait toujours désigné la Russie comme l’agresseur de l’Ukraine, quand il était évêque et désormais qu’il est devenu pape, Léon XIV a pu échanger avec le dirigeant du Kremlin, sans que cela ne modifie la position russe. Mais c’est une première inflexion, qui permettra peut-être au Saint-Siège de jouer un rôle dans les prochaines négociations de paix.

La seconde inflexion concerne l’Asie, avec la réception, lundi 30 juin, de la vice-présidente du Vietnam, qui est l’un des rares pays à ne pas avoir de relations diplomatiques avec le Saint-Siège, celles-ci ayant été rompues en 1975 lors de la prise de pouvoir par les communistes. Mais plusieurs avancées notables ont eu lieu depuis 2023, notamment la nomination d’un représentant pontifical qui résidait à Singapour avant de déménager à Hanoï en 2024. La réception de la vice-présidente par le Pape est un pas encourageant vers des relations plus proches et plus confiantes et, pourquoi pas, vers l’établissement de relations diplomatiques formelles, avec un nonce à Hanoï. Ce réchauffement des relations diplomatiques avec le Vietnam est scruté par un autre pays asiatique, la Chine, où les relations sont au point mort. Toute avancée dans la péninsule indochinoise ne peut qu’avoir des effets bénéfiques pour trouver une solution définitive avec Pékin.

La question de la guerre juste

Depuis l’élection de Léon XIV, théologiens et historiens de l’Église réinterrogent la notion de guerre juste, notamment à l’aune de la guerre à Gaza et en Iran. Si le Pape ne s’est pas encore formellement exprimé sur le sujet, si ce n’est par petites touches où il a repris des éléments très classiques, d’autres le font, non pas à sa place, mais pour planter des balises qui seront peut-être, demain, des points de fixation du discours pontifical.

À cet égard, un entretien majeur a été publié le 24 juin par L’Osservatore romano. Interrogé par le journaliste italien Guglielmo Gallone, don Mauro Cozzoli, professeur émérite de théologie morale à l’université pontificale du Latran, présente et analyse la pensée de l’Église sur la notion de guerre juste et de guerre préventive. La pensée exprimée est celle de l’auteur, pas celle du Pape, bien évidemment. Mais qu’un tel entretien paraisse dans le journal officiel du Saint-Siège signifie que ce que dit don Cozzoli n’est pas très éloigné de ce que pense le Pape et est en tout cas conforme à la pensée de l’Église. Or, dans ses propos, il condamne la notion de guerre préventive : "Frapper en premier pour éviter une attaque hypothétique de l'ennemi n'est pas éthiquement acceptable." S’il ne nomme ni Israël ni les États-Unis, c’est bien évidemment à ces deux pays que tout le monde pense, et à leur réaction contre l’Iran. Le débat porte sur le terme "hypothétique", Israël arguant que l’attaque de l’Iran n’était pas hypothétique et que le pays veut se doter de l’arme nucléaire pour en faire usage contre son ennemi.

Un débat ouvert

Le débat n’est pas clos et ne manquera pas de mobiliser théologiens et stratégistes. Quoi qu’il en soit, cela sera l’un des enjeux majeurs du pontificat de Léon XIV. Le fils spirituel de saint Augustin, celui-là même qui a posé les fondements de la guerre juste chez les chrétiens, ne pourra pas esquiver la question et devra l’affronter de front. Peut-être lors d’un voyage à l’ONU pour le 80e anniversaire de l’organisation.

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