Je n’avais pas l’habitude de me rendre dans cette sous-préfecture le jeudi, jour du marché. Je craignais de ne pouvoir garer ma voiture. Je gardais le souvenir de l’affluence d’antan, quand s’y tenait le marché aux bestiaux. Cependant, je désirais me confesser et un des prêtres de la paroisse m’avait confirmé que le sacrement de la réconciliation se donnait le jeudi matin, une demi-heure avant la messe de 10 heures. De plus, je devais aller à la banque pour une affaire urgente. Aussi n’hésitai-je pas et me rendis à l’église à 9 h 30. Je réussis à me garer facilement à proximité de l’édifice religieux. Je fus le premier à me confesser au curé. Dans la foulée, je participai à la messe. Puis, sans attendre, je filai à la banque.
Un sentiment de plénitude et de bienveillance inattendu
L’affaire fut bouclée dans de bons délais. En sortant de l’agence bancaire, je me retrouvai plongé au beau milieu du marché de plein vent. Et c’est là, immergé dans cette foule, que l’Esprit me rendit la compagnie des hommes plus agréable et suave que d’habitude. Sans que je sache pourquoi, je les trouvais soudain plus aimables et dignes d’attention que jamais. Je déambulais dans les travées du marché. Je n’avais rien à acheter et, surtout, il était plus que temps de rejoindre mon domicile. Malgré cela, combien j’aurais voulu rester au milieu de cette marée humaine, raisonnablement populeuse ! Je me plaisais au milieu de ces inconnus. Leur présence rendait soudain la vie encore plus attractive.
Le pardonné regarde ses semblables avec les yeux de Dieu
Avant de regagner mon véhicule, je réfléchis. D’où me venait cet état inattendu de plénitude ? La réponse ne fit aucun doute dans mon esprit : du sacrement de la confession. Dieu m’avait régénéré par son pardon : j’étais de nouveau cette créature nouvelle qui avait surgi de la cuve baptismale le jour de ma nouvelle naissance de l’eau et de l’Esprit. Et cette grâce résurrectionnelle qui m’était octroyée une fois encore (tous les sacrements s’enracinent dans la Pâque du Christ) avait donné à mes frères et sœurs en humanité un attrait et une amabilité supplémentaires pour moi. Pourquoi ?
Jésus, comme la Sagesse, avait trouvé jadis ses délices parmi les enfants des hommes quand il déambulait sur les routes de Palestine, ainsi que l’avait prophétisé le livre des Proverbes à propos de la Sagesse (Pr 8,31). De même, mes semblables possédaient soudain un attrait nouveau pour moi qui avais revêtu, à nouveaux frais, le Christ par le sacrement de la confession. C’était Jésus, lui qui s’était tant plu au milieu de ses contemporains, qui vivait pleinement en moi après l’absolution. Et l’Esprit de résurrection avait étendu son onction à tous mes semblables au milieu desquels j’avais déambulé dans ce marché. Plus fondamentalement que mon cas particulier, la confession fait grandir l’Église en fortifiant son unité. Or, comment cette unité se consolide-t-elle sinon par la charité et par l’attrait que nous avons les uns pour les autres ?
Le sacrement de la réconciliation est source de joie profonde
Je livre ce témoignage afin de persuader les récalcitrants qu’un des fruits les plus délicieux de la confession consiste en une joie profonde, elle-même effet d’une philanthropie qui naît du Cœur de Jésus. L’homme ou la femme qui sort du confessionnal est une créature nouvelle : voilà pourquoi il ou elle est en mesure de regarder les autres avec les yeux du Créateur le premier jour du monde. En effet, aux yeux de Dieu, nous sommes tous aimables. Sinon, pourquoi nous aurait-Il créés ? Et créés de surcroît à Son image et ressemblance ! De plus, de la main du Bon ne peut sortir que du bon. Aussi, aucun moyen n’égale la grâce du pardon de Dieu pour goûter la bonté foncière de la Création et prendre plaisir à la compagnie de nos frères et sœurs en Christ, goûter une joie si profonde et intérieure qu’elle ne peut venir que d’ailleurs.










