Après s'y être longtemps opposée, la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture (CNPA) a finalement donné son feu vert ce jeudi 12 juin à l’installation de vitraux contemporains dans six chapelles de Notre-Dame de Paris. La CNPA a toutefois émis un vœu "unanime" : que les vitraux d’Eugène Viollet-le-Duc, réalisés au XIXe siècle et non endommagés, soient restaurés et exposés dans un lieu dédié. La ministre de la Culture, Rachida Dati, a assuré qu’elle y veillerait.
C’est l’artiste Claire Tabouret, associée à l’atelier Simon-Marq, qui a été retenue parmi 110 duos candidats pour réaliser ces nouveaux vitraux. Son projet figuratif illustrera la Pentecôte, en dialogue avec le vitrail de l’arbre de Jessé, seul à être conservé. Les travaux devraient commencer fin 2026, pour un coût de 4 millions d’euros pris en charge par le ministère. Souhaités par le président de la République Emmanuel Macron et l'archevêque de Paris Mgr Laurent Ulrich, ces nouveaux vitraux doivent remplacer six des sept baies du bas-côté sud (côté Seine) de l'architecte du XIXe siècle Eugène Viollet-le-Duc.
Depuis l’annonce du souhait présidentiel d’introduire des vitraux contemporains à Notre-Dame, la CNPA s'était montrée réservée, voire opposée au projet. Dès les premières discussions, ses membres avaient exprimé de fortes réticences quant à la pertinence de remplacer des vitraux historiques, pourtant intacts. Lors d’une réunion en juin 2023, la commission avait notamment souligné l’importance de préserver l’intégrité de l’œuvre de Viollet-le-Duc et l’unité stylistique de l’édifice. En juillet 2024, elle avait voté contre le projet : les rapports justifiant cette décision unanime avaient alors conclu que les vitraux XIXe conçus par Viollet le Duc n’ayant pas été endommagés par l’incendie, leur remplacement par de nouvelles verrières n'était pas justifié. Mais dès le mois de septembre, un nouveau communiqué du ministère de la Culture annonçait que le projet était toujours d'actualité.
Les vitraux concernés par le projet contemporain, réalisés au XIXe siècle par Eugène Viollet-le-Duc, n’ont pourtant subi aucun dommage lors de l’incendie du 15 avril 2019. Situés dans le bas-côté sud de la cathédrale, ils ont été protégés à la fois par leur emplacement relativement préservé des flammes et par l’intervention rapide des secours. Leur remplacement ne répond donc pas à une nécessité de restauration ou de sauvegarde, mais à une volonté de marquer une "trace contemporaine" dans le monument, comme l’ont exprimé Emmanuel Macron et Mgr Laurent Ulrich.
Parler de la Pentecôte
Mais à quoi ces vitraux vont-ils ressembler ? Parler de la Pentecôte, choisir la figuration, s’inscrire dans l’architecture gothique et respecter les traces de Viollet-le-Duc. En particulier, s’adapter au seul vitrail de l’architecte du XIXe siècle qui demeurera dans les collatéraux sud de la nef et qui représente un "arbre de Jessé", c’est-à-dire la généalogie du Christ. Telles étaient, en partie, les contraintes données par le comité artistique présidé par Bernard Blistène et missionné par le ministère de la Culture, l’Élysée et le diocèse de Paris pour sélectionner les artistes appelés à proposer six nouveaux vitraux pour Notre-Dame de Paris dans le collatéral sud rebaptisé "Allée de la Pentecôte". Chacune des six verrières doit illustrer les extraits suivants des Actes des apôtres : "Ils se trouvaient réunis tous ensemble dans un même lieu", "soudain un bruit vint du ciel", "un violent coup de vent", "leur apparurent des langues de feu", "leur cœur fut transpercé", "ils se mirent à parler dans d’autres langues".
Qu’il soit discuté et commenté largement, ce projet de création de nouveaux vitraux ne doit pas faire oublier le lieu auquel ils sont destinés : Notre-Dame de Paris. La France, pays de cathédrales, possède la plus grande surface de vitraux au monde, quelque 90,000 m2, selon l’Institut national des Métiers d’Art. Véritable Bible de verre, les vitraux par les scènes représentées, les techniques utilisées ou encore les couleurs employées existent pour porter la prière des fidèles autant que pour rendre gloire à Dieu. Des critères qui devraient ne pas souffrir de polémiques et débat purement patrimoniaux.