Invité sur France 2 ce mardi 10 juin, Emmanuel Macron a réagi au meurtre d’une surveillante mortellement poignardée dans la matinée par un élève de 14 ans à l’entrée d’un collège à Nogent, en Haute-Marne, et a tenté d’avancer des explications sur une jeunesse de plus en plus violente. Emmanuel Macron a évoqué en premier lieu "l'explosion des familles", en soulignant notamment la difficulté, pour les mamans solos, d'élever un enfant seule : "Nous vivons dans des sociétés où depuis 20 ans les familles ont explosé, (...) c'est une réalité de notre société et on n’a pas fait assez attention à ça", admet le chef de l'État.
Il a ensuite dénoncé le rôle néfaste des réseaux sociaux et a promis d’en interdire l’accès aux moins de 15 ans : "On peut le faire, a-t-il assuré, parce que toutes ces plateformes ont la possibilité, par la reconnaissance faciale ou des identifiants, de vérifier l’âge". "On doit interdire les réseaux sociaux aux moins de 15 ans", a martelé le chef de l’État. "Je nous donne quelques mois pour faire la mobilisation européenne sinon je négocierai avec les Européens pour que nous, on commence à le faire en France", a-t-il déclaré, faisant une comparaison avec les restrictions faites au niveau européen pour les sites pornographiques. Déjà le 11 mai dernier, Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'Intelligence Artificielle et du Numérique, avait affirmé dans La Tribune se donner "trois mois" pour "mobiliser ses partenaires européens" sur un "accord européen" contraignant les réseaux sociaux à vérifier l’âge des adolescents. Selon la ministre déléguée, un adolescent passe plus de quatre heures par jour sur des plateformes comme Instagram, TikTok, Facebook, et 3 jeunes sur 4 de moins 13 ans utilisent déjà les réseaux sociaux quand bien même cela est interdit dans les conditions générales d'utilisation des plateformes.
En France, les réseaux sociaux sont interdits avant l’âge de 13 ans, mais dans les faits, cette interdiction est loin d’être respectée. Une loi votée le 7 juillet 2023 a instauré l’âge de la majorité numérique à 15 ans. Les plateformes devront mettre en place une solution technique pour vérifier l’âge de leurs abonnés, sous peine de se voir infliger une amende pouvant aller jusqu'à 1 % de leur chiffre d’affaires mondial. Une fois promulguée, la loi leur laisserait encore un an pour trouver des solutions techniques. Mais pour le moment, la loi n’est toujours pas entrée en vigueur, faute de décret d'application qui devrait être publié en 2025, à la suite d’un avis de la Commission européenne. À l’échelle européenne, il n’existe pas, pour le moment, de texte fixant une limite d’âge pour tous les pays, chaque État membre étant libre de décider lui-même de l’âge limite.
Une dimension mondiale
Néanmoins, le sujet commence à prendre une dimension mondiale : de nombreux pays légifèrent afin de réglementer l’accès aux réseaux sociaux aux mineurs. L’Espagne a présenté, en juin 2024, une loi interdisant l’accès des moins de 16 ans aux réseaux sociaux. La Chine régule depuis 2023 l’accès aux réseaux de manière drastique avec notamment la mise en place de couvre-feux numériques. Et depuis tout récemment, l’Australie et la Nouvelle-Zélande examinent des lois interdisant l'accès aux réseaux sociaux pour les moins de 16 ans.
Parallèlement, en France, une commission parlementaire, créée le 13 mars 2025 par l’Assemblée nationale, enquête actuellement sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs. Les députés ont rendu leurs premiers constats le 27 mai dernier. "Le contrôle parental est assez faible", a alerté Laure Miller, rapporteur de la commission. Après avoir auditionné plus de 80 experts, les députés tirent une première sonnette d’alarme : l’encadrement des jeunes face aux contenus des réseaux sociaux reste largement insuffisant.