La joie, marque de fabrique du pèlerin marchant vers Chartres

Ce samedi 7 juin, il est 5h30 du matin aux alentours de la place Saint-Sulpice lorsque des chants catholiques résonnent de tous côtés. 19.000 pèlerins, soit trois colonnes, s'apprêtent à parcourir une centaine de kilomètres en direction de la cathédrale de Chartres. Après une messe d’envoi à l'église Saint-Sulpice même, l'une des colonnes se met en route et parcourt Paris pour le plus grand plaisir des Parisiens qui se hâtent de sortir leur téléphone pour photographier cette ribambelle de drapeaux et de sourires très "instagrammables". La cadence est lancée, les pas s'enchaînent, les champs de blé défilent rapidement. Les pèlerins traversent Verrière, Igny, Chevreuse, Cernay, la forêt de Rambouillet, Gas, Harleville et bien d'autres villes et villages. Des chapelets de pèlerins alignés les uns derrière les autres, chapitre par chapitre, récitent d'un même cœur des chapelets de prière.

Au fur et à mesure que les flèches de la cathédrale de Chartres grandissent, les douleurs aux jambes sont oubliées pour laisser place aux cœurs ardents. La joie se dessine sur chaque visage, malgré l'arrivée sous la pluie au premier bivouac et les arrêts répétés à l'approche des lieux de pauses et de déjeuner. Les ampoules ne parviennent pas à soumettre les voyageurs spirituels qui unissent leurs voix pour chanter. Le kyrie des gueux, l'alléluia de Saint Michel ou encore le "E Ultreia" résonnent à l'entrée de chaque bivouac où les marcheurs sont accueillis par une haie d'honneur et une pluie d'applaudissements et de bravo.

Cette joie et cette ardeur semblent être la marque de fabrique du pèlerin. Tous reconnaissent de manière univoque avoir vécu une expérience extraordinaire même si chacun l'a intériorisé différemment. L'un d'entre eux, Éloi, âgé de 19 ans, jeune étudiant d'hypokhâgne participant pour la première fois au pèlerinage de Chartres, a été profondément touché par l'adoration ayant eu lieu dimanche soir, dans le deuxième lieu de bivouac. Très ému, il confie très simplement "avoir laissé couler une larme" pour ensuite ajouter avec un sourire en coin : "Je crois que c'était la première fois depuis quatre ans". À ce témoignage fait écho celui de Jean Malo, 18 ans, lui aussi étudiant en hypokhâgne, et familier de ce pèlerinage. Après la dernière messe ayant eu lieu à la cathédrale de Chartres lundi 9 juin, il affirme pour sa part avoir "senti comme si quelqu'un [le] prenait dans ses bras pour [le] rassurer" au cours de l'homélie de Mgr Philippe Christory.

Une autre jeune fille, Marie, reconnaît elle aussi avoir vécu une expérience extraordinaire au cours de cette même homélie. Elle assure les yeux brillants : "Il s'est passé quelque chose entre le Seigneur et moi pendant la messe, je ne saurai pas encore dire précisément quoi mais il s'est passé quelque chose…". Chacun semble ainsi avoir trouvé Dieu à sa porte, à sa manière, mais tous ont hérité de cette expérience une joie surnaturelle dont le retentissement du Jubilate Deo dans tout le métro parisien au retour de ce pèlerinage témoigne.