Peu de personnes peuvent se targuer d’avoir eu pour élèves à la fois plusieurs évêques de France, tous les prêtres de Paris… et Martin Solveig qui, à 12 ans, était un soprano "très motivé et très curieux" ! L’homme qui parle ainsi de son ancien élève s’appelle François Polgár. À 78 ans, il dirige la Maîtrise de Sainte-Croix de Neuilly, qui se produira les 12 et 14 juin pour deux concerts exceptionnels à Saint-Ferdinand des Ternes et Notre-Dame-des-Champs. Au programme ? Une œuvre phare du répertoire baroque, Le Messie de Georg Friedrich Haendel, "dans une version à la fois fidèle et originale". Plus de vingt musiciens professionnels, avec des instruments anciens, et quatre chanteurs solistes accompagnés d’un chœur de 70 jeunes garçons seront sur scène.

Pourquoi le directeur artistique et musical a-t-il choisi une telle œuvre pour conclure la saison ? "Parce que c’est un résumé en musique de toute la foi du chrétien, de la naissance aux fins dernières", explique-t-il. "Le livret, d’une richesse inouïe, est basé tant sur l’Ancien que le Nouveau Testament. Toute la prédication du Christ y est exprimée par des notes dans un langage simple, extrêmement varié, accessible à tous !"
Une riche carrière
Chez François Polgár, en effet, le chant est pour la foi "une nourriture dont j’ai besoin pour trouver ma place dans le monde et dans l’Église". Le chef de chœur va jusqu’à dire que la musique est "prière, et non l’expression d’une prière, elle est une preuve de l’existence de Dieu." L’homme a rendu de longues années service à l’Église, notamment en enseignant le chant, notamment grégorien, aux séminaristes de Paris. Une "activité très exaltante car on a conscience de poser sa pierre à un édifice fondamental, celui de la liturgie" explique le patient professeur de ces élèves bien spécifiques "toujours prêts à donner le meilleur d’eux-mêmes" dans leur désir de servir Dieu.
Le chant est un facteur d’équilibre.
Mais la carrière de François Polgár ne s’est pas arrêtée aux portes des églises. Elle l’a conduit dans des sphères très variées : à l’Opéra de Paris, entre 1980 et 1992, comme chef de chœur adjoint ou à Radio France pour les neuf années suivantes comme chef des chœurs, le conduisant à se produire dans de nombreux pays avec un large répertoire symphonique. C’est pourtant la musique sacrée, à "la rhétorique plus parlante qu’un long sermon" que revient sans cesse l’artiste. Il y est "tombé" tout petit, comme élève et choriste de Sainte-Croix de Neuilly.
L’éducation par la musique
Il y découvre, encore enfant, "les possibilités infinies de la voix. Un souvenir : celui de la première fois où je me suis retrouvé dans au milieu du chœur, plongé au cœur de la musique, ivre de notes, sans bien réaliser ce qui se passait." Depuis, il n’a pas quitté la Maîtrise, qu’il dirige depuis 1983, succédant à son maître Louis Prudhomme. François Polgár y fait œuvre d’éducation, auprès des jeunes choristes, avec les armes de la musique, qui lie le corps et l’esprit : "Le chant apprend la juste respiration, la concentration. Il apprend à faire d’une mélodie une phrase à part entière, parlante, expressive, affirmative. Le chant est un facteur d’équilibre." Et s’il fallait faire le bilan de cette belle aventure, François Polgár espère qu’il a "su transmettre un goût, une connaissance et une compréhension." Et de garder en mémoire "les rares moments de grâce où j’ai pu faire un avec quelque chose qui me dépasse."