Pour un enfant, être sollicité pour mettre la table semble être une véritable injustice. Cela arrive toujours au moment précis où l’on s’apprête à regarder un film ou à courir dehors avec nos amis : “Peux-tu mettre la table, s'il te plaît ?”. Un appel si familier accompagné de tous les soupirs exaspérés et les roulements d'yeux dramatiques dont on est capable, traînant nos pieds jusqu'à la cuisine, faisant cliqueter les assiettes dans l’espoir que quelqu'un d'autre soit désigné pour ranger ensuite.
Pourtant, un phénomène intriguant se manifeste au fur et à mesure que nous vieillissons. Cette tâche autrefois fastidieuse acquiert une nouvelle signification. Le simple rituel de disposer les couteaux et les fourchettes, de lisser une serviette, d'allumer une bougie se transforme en un repère apaisant dans le déroulement de la journée. Mettre la table, nous le réalisons, ne concerne pas tant les assiettes que la création d'un lieu de communion, non seulement au sens eucharistique, mais aussi dans le sens profondément humain de se réunir, de partager et d’être ensemble.
Dans un monde qui paraît souvent précipité et fragmenté, ces petits rituels domestiques se transforment en actes d'intentionnalité. Ils proclament : “Tu es précieux, ce moment est précieux”. Une table dressée devient une invitation à ralentir, à renouer des liens, à vivre pleinement l'instant présent. Même lors des journées les plus remplies, elle nous ramène à quelque chose de fondamental et de bon.
Encourager ses enfants à aider
C'est pourquoi il est important d'encourager ses enfants à participer aux tâches ménagères, même lorsqu'ils y sont réticents — et surtout dans ces moments-là ! Les tâches ménagères, notamment celles liées aux soins et à la communauté, enseignent un sens des responsabilités, certes, mais elles nourrissent également un sentiment d'appartenance. Les enfants ne perçoivent peut-être pas immédiatement la valeur de ces activités, mais avec le temps, la répétition devient une routine, et cette habitude s'ancre discrètement dans leur mémoire. Un jour, loin de chez eux, ils pourraient se surprendre à plier une serviette d'une certaine manière ou à placer une fourchette à gauche sans y réfléchir — et dans ce simple geste, ressentir la chaleur du foyer.
Ces moments, aussi simples soient-ils, sculptent l'âme. Dans l'Évangile, le Christ se manifeste si souvent autour de la table. Repas partagés, pain rompu, cœurs ouverts. En dressant la table, nous ne nous contentons pas de préparer la nourriture : nous préparons également la rencontre.
Ainsi, la prochaine fois que votre enfant soupire face à cette demande, prenez courage. Vous n’enseignez pas seulement les bonnes manières, vous transmettez une tradition silencieuse d'amour.
