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[HOMÉLIE] Comment enseigner la vérité dans la charité ?

SAINT PAUL BARNABE

Tableau représentant Saint Paul et saint Barnabé à Lystre.

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Maxence Bertrand - publié le 24/05/25
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Curé d’Oullins dans le diocèse de Lyon, don Maxence Bertrand commente les lectures du VIe dimanche du Temps pascal. Les apôtres demandent à Paul et Barnabé : comment enseigner la vérité dans la charité ? Si les mots dialogue et doctrine paraissent opposés, a remarqué récemment Léon XIV, ce récit des Actes des Apôtres illustre parfaitement l’unité de la foi dans la charité et la vérité.

"Cela provoqua un affrontement ainsi qu’une vive discussion engagée par Paul et Barnabé contre ces gens-là." (Ac 15, 2) Les affrontements ont donc marqué l’histoire de l’Église naissante. Cette forte dissension à propos de la circoncision a conduit Paul et Barnabé à se tourner vers les apôtres et les anciens pour éclaircir la mission propre de l’Église en général et pour cette communauté en particulier. 

Charité ou vérité ?

Le chapitre 15 des Actes des Apôtres est une remarquable illustration de la dimension collégiale et institutionnelle de l’Église dans sa double mission d’enseigner la vérité de la foi et de témoigner de la charité des disciples du Christ. À Antioche, où ce conflit d’interprétation de la loi de Moïse a vu le jour, fallait-il d’abord chercher la paix entre tous ou bien la vérité de la foi ? Fallait-il prendre soin de la relation fraternelle de ces chrétiens divisés ou bien accepter de recevoir un éclaircissement — et avec autorité — des Apôtres sur ce sujet ? Charité ou vérité ? Fraternité ou autorité ?

Léon XIV, que nous apprenons à découvrir dans ces toutes premières semaines de son pontificat, a déjà donné plusieurs audiences, homélies et discours. Dans l’un d’entre eux, il évoque cette question précise du lien entre dialogue et doctrine qui nécessite pour n’être pas séparés un "entrelacement dynamique et constant de grâce et de liberté" (Discours aux membres de la fondation Centesimus annus pro Pontifice, 17 mai 2025).

Le discernement de l’Église

Ainsi, après cette forte altercation à Antioche, Paul, Barnabé et quelques autres ont donc pris la route de Jérusalem. Il convenait de chercher avec d’autres — et en particulier avec les apôtres — la volonté de Dieu parce qu’il est "plus important de savoir se rapprocher humblement [de la vérité] plutôt que de fournir une réponse rapide" (Léon XIV, ibid.). "L’objectif est d’apprendre à affronter les problèmes, qui sont toujours différents, car chaque génération est nouvelle, avec de nouveaux défis, de nouveaux rêves, de nouvelles interrogations" (ibid.). Cet affrontement des problèmes requiert du temps et le temps demande notre consentement libre et patient.

Ainsi, après avoir réfléchi, discuté, prié et invoqué l’Esprit saint, les apôtres et les anciens ont confié le fruit de leur discernement, par écrit, à Jude et Silas, frères reconnus et estimés dans les premières communautés chrétiennes. Le discernement de l’Église prendra donc la forme d’une décision écrite mais transmise par des frères estimés de tous. "Nous avons ici un aspect fondamental pour construire une “culture de la rencontre”" (Léon XIV, ibid.).

Car, si "pour la sensibilité de nombre de nos contemporains, les mots dialogue et doctrine paraissent opposés, incompatibles" (ibid.), ce récit des Actes des Apôtres illustre parfaitement l’unité de la foi dans la charité et la vérité. Jude et Silas portent donc aux chrétiens d’Antioche cet éclaircissement des Apôtres (Ac 15, 28) :

L’Esprit saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations que celles-ci qui s’imposent : vous abstenir des viandes offertes en sacrifice aux idoles, du sang, des viandes non saignées et des unions illégitimes. Vous agirez bien, si vous vous gardez de tout cela. Bon courage !

Le "bon courage" final respire la bonté et les encouragements de ceux-là mêmes qui ont entendu le Christ leur dire : "L’Esprit saint vous enseignera tout et vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit" (Jn 14, 26).

Un chemin commun

"Peut-être qu’en entendant le mot doctrine, poursuit Léon XIV, nous pensons immédiatement à la définition classique : un ensemble d’idées propres à une religion. Et cette définition nous donne le sentiment de manquer de liberté pour réfléchir, remettre en question, chercher des alternatives". Mais "il existe un autre sens — prometteur — au mot doctrine, sans lequel même le dialogue devient vide" :

Ses synonymes peuvent être “science”, “discipline” ou “savoir”. Ainsi comprise, chaque doctrine est le fruit d’une recherche et donc d’hypothèses, de voix diverses, d’avancées et d’échecs, à travers lesquels elle tente de transmettre un savoir fiable, structuré et systématique sur un sujet donné. Ainsi, une doctrine n’équivaut pas à une opinion, mais devient un chemin commun, choral et même interdisciplinaire vers la vérité (ibid.).

La doctrine transmise par Jude et Silas prend en effet et très concrètement la forme d’un "chemin commun". D’abord parce qu’ils ont pris la peine de se déplacer à deux pour transmettre directement et fraternellement le fruit de ce discernement apostolique et ensuite parce que le contenu de la lettre évoque l’idée d’un agir appelé à s’inscrire dans le temps : "Vous agirez bien si vous gardez tout cela ! Bon courage !"

Le don de l’Esprit saint

La rencontre et le dialogue forment donc le vecteur de cette doctrine. Nous sommes loin de ces "paroles criées [qui] dominent, souvent accompagnées de fausses informations et de thèses irrationnelles proférées par quelques puissants." (Léon XIV, ibid.). Regardant l’histoire tout entière, le Christ a promis à ses disciples, pour toujours, le don de l’Esprit saint.

Que cet Esprit nous conduise sur des chemins de paix, fidèles à la foi de l’Église, transmise par les Apôtres et leurs successeurs, en vivant toujours de la communion fraternelle. Que la doctrine de la foi ne prenne jamais pour nous la forme d’une idée, mais toujours celle d’un chemin vers la vérité de Celui qui veut, en nous, faire sa demeure (Jn 14, 23).

Lectures du VIe dimanche du temps pascal :

Ac 15, 1-2.22-29 ; Ap 21, 10-14.22-23 ; Jn 14, 23-29

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