Pour sa première sortie hors de Rome, le pape Léon XIV s’est rendu à Genazzano, au sanctuaire de Notre-Dame du Bon Conseil, fondé au XVe siècle par une religieuse augustine, la bienheureuse Petruccia. Il s'est recueilli devant une icône de la Vierge à l’Enfant qui fait l’objet d’un culte populaire depuis le XVe siècle. Ce geste n’est pas anodin pour un pape qui se présente comme "fils de saint Augustin". Pour le plus éminent Père de l'Église latine, la Vierge Marie et l'Église dont Léon XIV est devenu le pasteur (après le Christ) sont liées sous le double rapport de la maternité et de la virginité.
La maternité de l'Église et de Marie
Marie, comme l'Église, est mère. La première a enfanté le Christ selon la chair, la seconde enfante les chrétiens par la foi et le baptême. "Marie a enfanté votre tête (le Christ), l'Église enfante les peuples" dit Augustin (Sermon 192, 2). "Si donc l'Église enfante les membres du Christ, elle est absolument semblable à Marie" (Sermon, Morin, 1,1). Pour Augustin, l'Église est notre" mère spirituelle" (Lettre 34,3). De son côté, Marie, notre mère selon la grâce, est dans son être la personnification de l'Église. Saint Ambroise, le maître d'Augustin (qu'il baptisa) disait déjà : "Marie est la figure de l'Église" (Maria est typus ecclesiae). Le Moyen-Âge reprendra cette intuition en disant : "Tout ce qui est dit de Marie peut et doit être dit de l'Église."
Nul doute que Léon XIV, en tant que pape, reviendra sur cette maternité de la Vierge et de l'Église à l'égard des chrétiens, et plus largement de tous les hommes. À Genazzano, le pape a demandé aux personnes qui sont venues le voir, à propos de Marie : "Comme la Mère n’abandonne jamais ses enfants, vous devez toujours être fidèles à la Mère."
L'Église et Marie, toujours vierges
Le second thème qui illustre le parallèle entre la Vierge et l'Église est la virginité. Écoutons saint Augustin à ce sujet :
"L'Église est vierge. Tu vas peut-être me dire : si elle est vierge, comment enfante-t-elle des fils ? Ou si elle n'enfante pas des fils, comment avons-nous donné nos noms, pour naître de son sein ? Je réponds : elle est vierge et elle enfante. Elle imite Marie qui a enfanté le Sauveur. Est-ce que la Vierge Marie n'a pas enfanté et n'est pas restée vierge ? Ainsi l'Église enfante et elle est vierge. Et si tu réfléchis bien, elle enfante le Christ : car ceux qui sont baptisés sont les membres du Christ (1 Co 12, 27). […] Si donc elle enfante les membres du Christ, elle est absolument semblable à Marie" (Sermon, Morin, 1, 1).
Car pour Augustin, c'est par la foi au vrai Dieu que l'Église est vierge. A contrario, donner son cœur aux idoles équivaut à être adultère selon les Écritures. Il en va pareillement pour Marie. Sa virginité n'est pas d'abord liée à l'intégrité corporelle mais à la pureté de sa foi qui lui a permis d'accueillir le Sauveur comme personne ne l'avait fait avant elle et ne le fera jamais après.
La foi de tout le peuple de Dieu
Là encore, nul doute que Léon XIV aura à cœur de valoriser les consacrés dans l'Église afin de fortifier, par eux, la foi de tout le peuple de Dieu qui lui est confié. Mais il n’est pas besoin d'être consacré pour avoir une foi pure et exercer une maternité spirituelle, comme Marie et l'Église, à l'égard de nos proches que Dieu a mis sur notre route, en faisant naître le Christ en eux. Nourri de saint Augustin — qui lui-même était redevable d'enseignements antérieurs, notamment ceux de saint Ambroise de Milan —, Léon XIV donnera vraisemblablement une coloration mariale à son pontificat dans la lignée des papes qui l'ont précédé.

