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Ces (belles) dévotions péruviennes méritent d’être connues

Procession en l'honneur de la Vierge du Mont Carmel à Paucartambo, Cuzco, Pérou, août 2023.

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Mathilde de Robien - publié le 12/05/25
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Léon XIV a passé une vingtaine d’années au Pérou, en tant que prêtre missionnaire puis comme évêque de Chiclayo. Nul doute qu’il ait fait l’expérience de la piété populaire péruvienne, dont les dévotions encore bien vivantes méritent d’être connues.

Originaire de Chicago, Léon XIV connaît et aime aussi le Pérou, son pays de cœur, dont il a obtenu la nationalité en 2015, année où il est devenu évêque de Chiclayo. Le jour de son élection, le 8 mai 2025, il n’a pas manqué de saluer "[son] cher diocèse de Chiclayo" qu'il a défini comme "un peuple fier". Un pays qui ne compte pas moins de 96 % de catholiques selon le rapport sur la liberté religieuse de l’Aide à l’Église en détresse de 2023 et où l’Église a joué un rôle important dans la formation historique, culturelle et morale du pays. De nombreux prêtres missionnaires ont contribué à la fondation de la nation, en développant les villes, en prenant soin des plus pauvres, en donnant accès à l’éducation aux populations indigènes, ainsi qu’aux femmes dans l’enseignement universitaire. Les deux universités les plus célèbres du Pérou ont été fondées par des communautés religieuses : l'université de San Marcos par la congrégation dominicaine en 1551, et l'université catholique pontificale du Pérou par le père Jorge Dintilhac des Sacrés-Cœurs en 1917.

Religion d’État depuis la colonisation espagnole (1527-1533) jusqu’en 1979, le catholicisme suscite toujours une grande ferveur chez les fidèles, à l’exception des grandes villes où celui-ci connaît un certain recul, sous l’influence de plus en plus marquée de différentes organisations évangéliques. Le Pérou a donné naissance à de grands saints qui méritent d’être connus, et a construit des sanctuaires qui perpétuent encore aujourd’hui de belles dévotions au Christ et à la Vierge. Une piété latine et populaire qui teintera peut-être le pontificat de Léon XIV.

Des saints humbles et bâtisseurs

Le Pérou a vu grandir trois figures déclarées saintes par l’Église catholique et qui bénéficient d'une grande dévotion parmi les Péruviens. La plus vénérée est sainte Rose de Lima (1586-1617), première sainte du Nouveau monde, devenue sainte patronne du Pérou et de la ville de Lima, mais aussi des Amériques, des Philippines, de la police nationale et de l’université catholique du Pérou. Née Isabel De Flores Y Del Oliva, dixième enfant d’une famille pauvre de Lima, sainte Rose de Lima est une Tertiaire dominicaine qui passa une partie de sa vie dans un minuscule ermitage au fond du jardin de ses parents, dans la prière et l’austérité. Avec un zèle ardent pour le salut des pécheurs et des Indiens, pour qui elle souhaite donner sa vie, elle se soumet à toutes sortes de souffrances, pour les gagner au Christ.

SANTA ROSA DE LIMA

Saint Martin de Porrès (1579-1639) est quant à lui le saint patron des humiliés. Fils d’une ancienne esclave noire péruvienne et d’un noble espagnol castillan qui ne l’a pas reconnu, saint Martin de Porrès supporte toute sa vie les humiliations et le mépris en raison de sa naissance illégitime et de sa couleur de peau. À 22 ans, il entre comme tertiaire laïc dominicain en tant qu’infirmier. Alors qu’il apprend que son couvent croule sous les dettes, il supplie le prieur de le vendre comme esclave « pour être utile au moins à quelque chose dans la communauté ». Très populaire au Pérou, il est invoqué par tous ceux qui ressentent du mépris ou de profondes souffrances.

Enfin, les Péruviens se tournent aussi vers saint Turibio de Mongrovejo (1538-1606), dit le bâtisseur, grand protecteur des populations autochtones du Pérou. Originaire de Mayorga en Espagne, il est encore laïc lorsqu’il est nommé archevêque du diocèse de Lima par le roi Philippe II. Il y ouvre alors le premier séminaire d’Amérique latine, et y construit des églises, des couvents, des hôpitaux, des routes et des écoles.

Des dévotions mariales bien ancrées

Procession en l'honneur de la Vierge du Mont Carmel à Paucartambo, Cuzco, Pérou, août 2023.

La dévotion à la Vierge du Mont Carmel (Virgen del Carmen) est sans doute la dévotion mariale la plus répandue au Pérou. Elle prend un essor considérable en Amérique latine à partir du XVIe siècle avec les missions espagnoles. Elle est fêtée massivement le 16 juillet, notamment à Paucartambo, dans la région de Cuzco, où elle est appelée affectueusement "Mamacha del Carmen".

Image de la Vierge de Candelaria, Lima, Pérou, janvier 2025.

Une autre dévotion mariale donne lieu à une grande fête annuelle, notamment à Puno, sur les rives du lac Titicaca : la fête de la Vierge de la Chandeleur, ou Candelaria, qui commémore chaque 2 février la Présentation de Jésus au temple, ainsi que la purification de la Vierge. L’image associée à la Vierge de la Chandeleur est celle d’une apparition de la Vierge qui se serait présentée à deux jeunes bergers sur l'île de Tenerife en Espagne.

Pèlerinage de la Vierge de la Porte d’Otuzco, janvier 2018.

Enfin, la Vierge de la Porte (Virgen de la Puerta) est une dévotion mariale répandue dans le nord du Pérou. Elle est vénérée au sanctuaire d’Otuzco, un village de montagne situé à 75 kilomètres de Trujillo. Chaque 15 janvier, elle est transportée jusqu’à la cathédrale de la ville, où une procession rassemble des milliers de fidèles et de danseurs. Parmi ces derniers, "los negritos d’Otuzco", qui représentent d'anciens travailleurs pauvres descendant d’esclaves d’Afrique, qui nourrissaient une grande vénération pour la Vierge dont ils estiment qu’elle les a affranchis de leur servitude. 

Des dévotions à Jésus-Christ prisonnier ou crucifié

La dévotion au Seigneur des Miracles (Señor de los Milagros) est l’une des dévotions les plus importantes du Pérou. Elle est liée à une image du Christ crucifié, peinte par un esclave angolais sur un mur du quartier de Pachacamilla au XVIIe. En 1655, malgré un violent tremblement de terre, le mur avec l’image du Christ reste intact, ce qui est perçu comme un miracle. Dès lors, le Christ de Pachacamilla est vénéré sous le nom de Seigneur des Miracles et l’image est conservée au sanctuaire des Nazaréennes à Lima. Chaque année en octobre, des milliers de fidèles vêtus de violet marchent en procession pour la fête du Seigneur des Miracles.

Procession du "Señor de los Milagros", octobre 2024.

Particulièrement vénérée au nord du Pérou, dans la région de Piura, près de la frontière avec l'Équateur, la dévotion au Seigneur Captif d'Ayabaca (Señor Cautivo) remonte à une statue sculptée au XVIIe siècle, représentant le Christ prisonnier, les mains liées, lors de son arrestation avant la Passion. Elle est conservée dans le sanctuaire d’Ayabaca, un petit village andin à plus de 2.700 mètres d’altitude qui accueille en octobre des dizaines de milliers de fidèles.

Pèlerinage de dévotion au Seigneur de Qoyllurit’i

Enfin, la dévotion au Seigneur de Qoyllurit’i mêle quant à elle spiritualité chrétienne et traditions andines préhispaniques. Elle est connue grâce à un pèlerinage spectaculaire, qui se déroule 58 jours après Pâques sur trois jours dans les montagnes de la région de Cuzco, à plus de 5.000 mètres d'altitude. En 2011, l’UNESCO a inscrit le pèlerinage de Qoyllurit’i au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Qoyllurit’i signifie "Seigneur de la Brillante Neige" en quechua. Lorsque le catholicisme reprend cette tradition ancestrale, il y ajoute une image du Christ crucifié, qui serait apparue miraculeusement sur un rocher au XVIIIe siècle à un enfant autochtone. Parmi d'antiques traditions des Andes, le pèlerinage comprend des processions de la croix du Christ. Un syncrétisme détonnant.

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