PAPE LÉON XIV
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Certes, le pape Léon XIV, fraîchement élu, a commencé sa première homélie comme successeur de Pierre en invitant ses frères cardinaux, en anglais, "à reconnaître les merveilles que le Seigneur a accomplies, les bénédictions que le Seigneur continue de répandre sur nous tous" malgré la croix qu’il est "appelé à porter" par cette élection. Ces mots étaient inspirés du psaume de cette messe de clôture du conclave, présidée dans la chapelle Sixtine par celui qui n’était hier encore que le cardinal Prevost : "Chantez au Seigneur un chant nouveau, car il a fait des merveilles" (Ps 97, 1).
Mais le principal de sa méditation, prononcé en italien, portait sur l’épisode dit de la "confession" de saint Pierre chez saint Matthieu (cf. Mt 16, 13-19), évangile de la fête de la Chaire de saint Pierre, le 22 février. Le premier des apôtres, aidé du Saint-Esprit, affirme devant Jésus "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant", premier acte de foi de celui qui est appelé à conforter celle de ses frères et à assurer l’unité du peuple de Dieu : "Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux."
La réalité dans laquelle nous vivons
Cependant, ce qui a retenu ce matin l’intérêt de Léon XIV est davantage ce qui se trouve "en amont de la conversation". La question "Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ?" n’est pas "anodine" mais "touche à un aspect important de notre ministère : la réalité dans laquelle nous vivons, avec ses limites et ses potentialités, ses questions et ses convictions" explique le Pape. Avant de décrire des "attitudes" différentes, dont la première, "la réponse du monde", visible dans la société contemporaine.
Le fait que la profession de Pierre ait lieu à Césarée de Philippe, d’après saint Matthieu, ville "riche en palais luxueux, nichée dans un cadre naturel enchanteur, au pied de l'Hermon, mais aussi siège de cercles de pouvoir cruels et théâtre de trahisons et d'infidélités" n’est pas une simple coïncidence pour l’ancien préfet du Dicastère pour les évêques. "Cette image, explique-t-il, nous parle d'un monde qui considère Jésus comme une personne totalement insignifiante, tout au plus un personnage curieux". Ce qui est bien actuel : "Aujourd'hui encore, nombreux sont les contextes où la foi chrétienne est considérée comme absurde, réservée aux personnes faibles et peu intelligentes, des contextes, ajoute Léon XIV, où on lui préfère d'autres certitudes, comme la technologie, l'argent, le succès, le pouvoir, le plaisir."
Le monde entier a besoin d’être transformé en tournant son regard vers Dieu
Au cœur de son homélie, cette phrase manifeste la lucidité du pasteur sur le monde auquel il est envoyé. Un homme du nord tourné vers le sud, qui ne peut pas être accusé d’ignorer les problématiques d’un Occident sécularisé. Ni de parler comme un intellectuel enfermé dans ses livres de théologie puisqu’il fut missionnaire et évêque au Pérou après avoir grandi dans un milieu modeste aux États-Unis. Continuant sa description de la société contemporaine, Robert Francis Prevost parle "d'environnements où il n'est pas facile de témoigner et d'annoncer l'Évangile, et où ceux qui croient sont ridiculisés, persécutés, méprisés ou, au mieux, tolérés et pris en pitié".
La foi, donc, ne doit être ni réservée à quelques dévots naïfs ni une mondanité. Au contraire, le monde entier a besoin d’être transformé en tournant son regard vers Dieu : "C'est précisément pour cette raison [les problèmes de ce monde décrits plus haut] que la mission est urgente en ces lieux, car le manque de foi entraîne souvent des drames tels que la perte du sens de la vie, l'oubli de la miséricorde, la violation de la dignité de la personne sous ses formes les plus dramatiques, la crise de la famille et tant d'autres blessures dont notre société souffre considérablement." Parlant croyants, il a fait preuve d’une même acuité, affirmant que "nombre de baptisés finissent ainsi par vivre, à ce niveau, dans un athéisme de fait" quand "Jésus, bien qu'apprécié en tant qu'homme, est réduit à une sorte de leader charismatique ou de super-homme". Malgré la douceur de la voix, la fermeté du propos rappelle même le combat de Benoît XVI contre le relativisme ambiant. Un état du monde qui appelle chacun "à témoigner de la foi joyeuse en Christ Sauveur". "Nous sommes disciples du Christ, a-t-il d’ailleurs souligné lors de sa première allocution, hier soir, à la loggia de la basilique Saint-Pierre. Le Christ nous précède. Le monde a besoin de sa lumière. L'humanité a besoin de Lui comme pont pour être rejoint par Dieu et par son amour."

