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Élire un pape, un acte démocratique ou un discernement spirituel ?

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Martin Pinet - publié le 06/05/25
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L’élection du pape obéit à un fonctionnement démocratique mais les cardinaux opèrent avant tout un discernement spirituel, autour de plusieurs critères. Car l’Église elle-même n’est pas une démocratie, explique le père Martin Pinet, auteur de "Le Pouvoir dans l’Église, on en parle ?" (Cerf).

PAPE LÉON XIV

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L’ouverture du conclave est l’occasion pour les bookmakers de tous poils d’analyser avec une étonnante ingéniosité les jeux de pouvoir et d’influence qui traversent le collège des cardinaux, dans une frappante surenchère des oppositions : pastoral ou doctrinal, occidental ou du Sud global, synodal ou hiérarchique, rupture ou continuité, et surtout, progressiste ou conservateur. Le catholique qui attend dans une confiance priante le résultat de l’élection, peut trouver simpliste, déplacée et souvent fatigante, cette lecture binaire et systématiquement politique et horizontale de l’évènement. Il est pourtant nécessaire d’accepter la réalité politique commune à toute élection, en conservant un regard de foi, un regard surnaturel, sur ce qui s’y joue. Trois questions peuvent nous aider à comprendre cet équilibre délicat.

Le conclave est-il démocratique ?

Le conclave est-il un exercice démocratique ? La première réponse est positive, si l’on définit la démocratie comme un système politique dans lequel la souveraineté émane du vote de ses membres : chacun des 133 cardinaux possède une voix égale aux autres. Mais c’est une démocratie qui n’est pas de type représentatif, puisque tous les membres baptisés de l’Église n’ont pas élu les cardinaux ; ceux-ci ont été choisis par le pape pour représenter l’institution dans sa variété géographique, culturelle et spirituelle. Le conclave obéit certes à un fonctionnement démocratique, mais l’Église ne l’est structurellement pas.

La démocratie moderne, c’est en effet le lieu de la libre discussion afin de parvenir à un projet politique commun. Dans l’Église, en revanche, le projet est reçu d’En-Haut : c’est la Révélation de l’amour de Dieu en Jésus-Christ, qui se transmet dans l’Écriture sainte portée par la Tradition. Les cardinaux sont donc invités à opérer durant le conclave un discernement spirituel "triangulaire" autour de trois éléments : d’abord la foi de l’Église exprimée dans la Bible et dans la théologie, puis l’expérience de leurs communautés respectives qui exprime l’attente des fidèles, et enfin leur intime conviction spirituelle, forgée dans la prière. Si le conclave est un événement spirituel, se pose naturellement la question de l’articulation entre foi et pouvoir.

Le pouvoir du pape est-il sacré ?

Le pouvoir du pape est-il particulièrement sacré ? Après tout, celui-ci porte le titre de souverain pontife, c’est-à-dire celui qui "fait le pont" entre le monde d’en bas et les principes invisibles et spirituels. Il faut pourtant souligner combien la liturgie qui marque le début d’un pontificat est sobre. C’est la simple réponse positive du cardinal élu au doyen qui lui demande s’il accepte son élection, qui fait de lui le nouveau pape. Sa première célébration comme pape n’est plus un couronnement, mais une simple inauguration.

Paradoxalement, cette inauguration est nettement moins sacralisée que ne l’était le sacre des rois de France, dont le rite de l’onction, parmi tant d’autres rites et symboles religieux, en faisait presque une ordination sacramentelle. Si le pouvoir du pape n’est pas sacré, il repose malgré tout sur une fondation théologique et sacramentelle : c’est lorsqu’il a été ordonné prêtre, puis évêque, qu’il a reçu une grâce spirituelle d’enseignement de la foi, de sanctification par la célébration des sacrements, et de gouvernement de la communauté. Son élection comme pape lui donne assurément une grâce supplémentaire d’assistance de l’Esprit Saint pour œuvrer à la communion dans l’Église, grâce qui a été explicitement promise par le Christ à saint Pierre (Lc 22, 32), mais n’efface pas ses limites, et ses péchés. C’est son choix par les cardinaux qui lui promet cette grâce, ce qui nous conduit à notre dernière question.

Le choix de Dieu ou l’aide de Dieu ?

Les cardinaux doivent-ils discerner le choix de Dieu, ou discerner avec l’aide de Dieu ? Autrement dit : Dieu a-t-il déjà désigné son candidat lorsque le conclave s’ouvre, et la mission des cardinaux serait de discerner lequel ? Cette question rappelle étrangement celle que peut se poser un jeune qui cherche son âme sœur : faut-il croire que Dieu m’a réservé, de toute éternité, un conjoint qu’il me revient de rencontrer ? Hors de cette rencontre inscrite dans le projet de Dieu, aucun vrai amour ne serait envisageable.

Il faut alors revenir à la doctrine traditionnelle de la Providence divine, qui n’est pas le destin ou la fatalité, mais qui est la façon merveilleuse qu’a Dieu de faire tout concourir (y compris les choix libres de chacun) à son projet d’amour pour le monde. Autrement dit : de la même manière qu’une personne peut choisir librement de s’engager pour aimer une autre, en l’acceptant avec ses qualités et ses défauts, et que Dieu s’engagera à leurs côtés en soutenant leur bonne volonté, les cardinaux choisiront celui qu’ils discerneront le plus à même de gouverner l’Église, avec ses forces et ses fragilités, et Dieu lui donnera assurément sa grâce pour mener à bien sa mission.

À cet égard, la prière d’ouverture de la messe Pro Eligendo Pontefice qui est célébrée ce mercredi matin, demande opportunément au Seigneur : "Accorde à ton Église un pasteur qui saura te plaire par sa sainteté." Non pas un pasteur qui plaise déjà à Dieu, non pas un pasteur qui me plaise, mais un pasteur qui saura plaire au Seigneur en se mettant à son écoute et au service de la foi et de l’unité de l’Église.

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