separateurCreated with Sketch.

François, le pape des paradoxes

Pope Francis
whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Fabrice de Chanceuil - publié le 28/04/25
whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Attendu comme un pape de rupture, le progressisme du pape François avait peu à voir avec l'idée d'une Église vidée de ses traditions et rompant avec sa doctrine.

Le pape François est mort ce lundi de Pâques, alors même que la veille, dimanche de la Résurrection, il bénissait encore la foule amassée sur la place Saint-Pierre de Rome. En décidant, l'an passé, de faire de l'année 2025 celle du Jubilé de l'Espérance, il ne s'imaginait sans doute pas — encore qu'il en avait peut-être la prescience — qu'elle s'appliquerait d'abord à lui. Depuis, les hommages affluent de toutes parts, laissant croire que le pape François a toujours fait l'unanimité en sa faveur au cours de son pontificat, ce qui n'est pas le cas, comme pour ses prédécesseurs d'ailleurs. En ce qui le concerne, les avis divergents, qui ne manqueront pas de s'exprimer à nouveau quand viendra le temps du bilan, résultent du caractère déroutant de sa pensée et de l'expression de celle-ci, soufflant souvent le chaud et le froid.

Très hostile à l’avortement

Après deux papes jugés conservateurs, Jean Paul II et Benoît XVI, François est monté sur le trône de Saint-Pierre avec la réputation d'un progressiste. Dès le début de son pontificat, il a semblé effectivement s'inscrire dans cette vision sur les sujets sociétaux, s'interdisant de juger les personnes homosexuelles. Mais à la fin de son pontificat, il a utilisé un terme péjoratif à leur égard, même s'il s'en est excusé un peu plus tard, tout en ouvrant la possibilité, par la déclaration doctrinale Fiducia supplicans, de bénir les personnes du même sexe vivant en couple, sans pour autant approuver cette forme d'union.

Et ceux qui misaient sur son ouverture sur la question de l'avortement, en raison de sa compassion pour les femmes y ayant eu recours, auront compris qu'ils faisaient fausse route quand François a ouvert la voie à la béatification du roi Baudouin en raison même de l'opposition radicale du monarque belge à cette pratique. De même, avec les traditionalistes. Alors qu'en 2015, il fait inscrire la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, société de prêtres intégristes, dans la liste des instituts de vie consacrée, il publie, en 2021, la lettre apostolique Traditionis custodes qui annule l'élargissement accordé par son prédécesseur pour la célébration de la messe dans le rite extraordinaire antérieur à 1962.

Un pape autoritaire

Il en est allé pareillement dans son mode de gouvernement de l’Église. Le pape François a lancé, en 2020, un synode sur la synodalité dont les conclusions, quatre ans plus tard, mettent l'accent en faveur d'une Église plus participative, inclusive et moins cléricale. Pourtant, il aura été, tout au long de son pontificat, un pape autoritaire, court-circuitant les organes officiels pour faire aboutir ses projets. Ainsi a-t-il eu recours à la création de groupes de travail ad hoc composés de ses proches, comme le conseil des cardinaux ("C9") pour la réforme de la curie romaine, ou la désignation de délégués spéciaux, autorisés à transgresser les règles en vigueur, comme pour la réforme de l'Ordre de Malte.

Pape du Nouveau Monde, dans tous les sens du terme, François a semblé se désintéresser de l'Europe et de la France en particulier, refusant de considérer ses incursions sur son territoire, à Strasbourg, Marseille et Ajaccio, comme des visites faites au pays lui-même. Pourtant, il n'a pas manqué de saluer et d'honorer de grandes figures spirituelles de notre pays, en canonisant Charles de Foucauld et en souhaitant la béatification de Blaise Pascal. Mêmes paradoxes avec l'encyclique Laudato si' sur la sauvegarde de la maison commune, sans doute la plus remarquée et la plus marquante du pontificat, encensée par les écologistes mais où la contradiction est plutôt du côté des lecteurs, le Saint-Père ayant beau jeu de s’étonner que ceux qui s’opposent aux organismes génétiquement modifiés (OGM) puissent se satisfaire des expérimentations sur les embryons humains vivants.

En fait, François a déjoué tous les pronostics. Son progressisme avait peu à voir avec l'idée d'une Église vidée de ses traditions et adoptant une attitude idéologique. Le dépouillement qu'il appelait de ses vœux était moins dans les rites et les idées que dans la vie personnelle de chacun, dénonçant, dès sa prise de fonction, la mondanité sous toutes ses formes et choisissant de délaisser les appartements pontificaux pour la plus modeste résidence Sainte-Marthe. C'est cette simplicité qui, en décembre 2024, lui a fait préférer, à la pompe médiatique de la réouverture de Notre-Dame de Paris, la clôture d'une session d'étude sur la piété populaire en Corse.

Une simplicité non feinte

C'est cette simplicité non feinte qui restera d'abord dans le souvenir des fidèles et même des non-croyants et sur laquelle ses successeurs pourront difficilement revenir dans la pratique de leur fonction. Si tel est l'héritage que le pape François laissera dans les mémoires, il n'est pas secondaire car, à la différence des grandes réformes qu'il aurait peut-être souhaitées sans pouvoir les mener complètement à bien, celui-ci est un modèle que chacun peut faire sien pour son plus grand profit.

Vous avez aimé cet article et souhaitez en savoir plus ?

Recevez Aleteia chaque jour dans votre boite e−mail, c’est gratuit !

Vous aimez le contenu de Aleteia ?

Aidez-nous à couvrir les frais de production des articles que vous lisez, et soutenez la mission d’Aleteia !

Grâce à la déduction fiscale, vous pouvez soutenir le premier site internet catholique au monde tout en réduisant vos impôts. Profitez-en !

(avec déduction fiscale)