Thomas sur sa sœur jumelle : “Laurène m’a donné les clés pour vivre sans elle”

À la mort de Laurène, sa sœur jumelle, en juin 2016, Thomas Hug de Larauze a vécu un déchirement inouï. Aujourd’hui, malgré la douleur qui parfois revient l’assaillir, le jeune papa d’un bébé de 16 mois a trouvé la paix. Thomas "partageait tout" avec Laurène. "Nous avons toujours eu une relation fusionnelle. On était habillés pareil, on avait les mêmes copains…" énumère ce cadre de 31 ans qui vit à Paris. Les jumeaux Thomas et Laurène sont les derniers d’une fratrie de cinq enfants. La famille, élevée dans la foi catholique, grandit à Nantes. Pour autant, le jeune garçon d’alors ne "sent pas la présence de Dieu dans sa vie". "Laurène non plus… Ça ne nous parlait pas trop" relit-il aujourd’hui.

Septembre 2009, les jumeaux ont 16 ans. Laurène s’envole pour un an à Toronto, une première séparation douloureuse pour Thomas. Le lycéen ignore que sa sœur sera rapatriée trois mois plus tard, terrassée par des douleurs dentaires qui sont les premiers signes d’une leucémie. Hospitalisations, traitements… À partir de cette date, tout s’enchaîne. Sidérée par ce qui est en train d’arriver, toute la famille se met en quatre pour accompagner Laurène dans son combat. Chacun navigue à vue ; Thomas poursuit son lycée dans cette atmosphère angoissante. Chaque jour à la sortie des cours, celui qui avait "pris un peu ses distances" avec Laurène au collège se précipite à l’hôpital pour la retrouver dans sa chambre stérile. "J’étais paniqué. Elle seule pouvait me rassurer" raconte la voix de Thomas dans le documentaire.

Quelques mois plus tard, une greffe de moelle osseuse est réalisée grâce à la compatibilité de sa sœur aînée Marine. La vie reprend comme elle peut. Les jumeaux passent leur bac et leur permis à 18 ans. Laurène s’inscrit en faculté de Psychologie à Angers. Croque la vie à pleines dents, sort beaucoup avec ses amis. Quant à Thomas, après plusieurs mois d’hésitation pour rester auprès de Laurène, il s’envole pour un an en Australie pour des études de commerce mais garde le lien avec sa sœur par Skype. Mais l’état de santé de la jeune fille se dégrade : une grave affection pulmonaire lui rend la respiration de plus en plus difficile.

Un tournant dans la vie intérieure de Laurène qui se rapproche de Dieu, prie davantage et s’entoure d’amis croyants. "La fragilité de la vie lui a fait cheminer sur l’essentiel. Elle se rendait compte qu'il y avait une présence autre que ses proches autour d’elle" analyse Thomas. En août 2015, luttant contre la fatigue, Laurène témoigne sur son combat et sur sa foi en Dieu devant une foule de jeunes au festival Welcome to Paradise, à Hautecombe (communauté du Chemin neuf). Lorsque Thomas découvre la vidéo, il est "bouleversé". Quelques mois plus tard, Laurène commence à filmer son quotidien "sans filtre", dans le but d’en faire un film pour raconter son histoire. Avec Thomas, qui est en études de commerce à Lyon et revient à Nantes dès qu’il peut, ils se promettent d’en faire un film.

En mars 2016, Laurène subit une greffe de poumons. Au mois de juin, elle est plongée dans un coma artificiel à la suite de graves complications. Elle s’éteint le 19 juin. Juste avant le coma, elle avait murmuré à sa maman qui lui avait proposé de prier : "Non c’est bon. J’ai déjà parlé avec Dieu, je suis apaisée". Une phrase à laquelle Thomas "pense énormément" aujourd’hui. Après le décès, la famille est accompagnée par un prêtre. Un précieux soutien pour le jeune homme qui depuis, est "devenu très croyant". "C'est grâce à cela que j'arrive à vivre sans Laurène. Parce que je suis convaincu qu'on va se retrouver avec Dieu plus tard."

Aujourd’hui, malgré les périodes de profond chagrin et de colère face "à une telle injustice", Thomas est en paix. "Laurène a su nous donner les clés pour apprendre à vivre avec son absence. Elle puisait son bonheur dans des plaisirs très simples, partagés avec ses proches. Ça me permet d'avancer" confie celui qui désormais souhaite "s’impliquer dans des activités qui font sens" et "faire du bien autour de lui, même à petite échelle". Depuis quelque temps, Thomas "prie beaucoup". Chaque matin et chaque soir avant de dormir, il embrasse "sa petite pierre" sur laquelle son grand-père a gravé une colombe en hommage à Laurène.

Il a fallu deux ans à Thomas pour visionner les images de sa sœur et mettre en route la réalisation du film, qui a duré six ans en tout. On y entend les témoignages de leurs parents, de leurs frères et sœurs, des amis de Laurène. "Faire ce film a été thérapeutique pour moi. Je me dis qu'elle voit tout mon travail, et ça me fait beaucoup de bien. Aujourd’hui c’est notre film à tous les deux", conclut-il.