Ce 2 avril 2025 marque le 20e anniversaire du décès de Jean Paul II, dont l’agonie, la mort et les obsèques mirent Rome au centre du monde et de l’attention médiatique internationale. Sa popularité demeure palpable parmi les Romains. Reportage.Carême 2025
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Ce 2 avril 2025 marque le 20e anniversaire du décès de Jean Paul II, dont l’agonie, la mort et les obsèques mirent Rome au centre du monde et de l’attention médiatique internationale. Sa popularité demeure palpable parmi les Romains dont la vie quotidienne a été marquée, durant plus d’un quart de siècle, par la présence de ce pape charismatique. Aujourd’hui encore, les images du pontife polonais demeurent très présentes tout autour du Vatican, notamment dans les magasins d’articles religieux et les librairies.
"Jean Paul II, c’est le top du top !", lance avec énergie Simona, une Romaine d’une cinquantaine d’années, ravie de montrer les articles liées au pontife polonais dans le magasin du Borgo Pio où elle est employée. "Tous les jours, de nombreux Polonais mais aussi des Italiens, et des gens venus de partout, viennent acheter des souvenirs liés à Jean Paul II. C’était le pape du monde entier", insiste-t-elle, devant une grande photo presque grandeur nature de Jean Paul II avec Mère Teresa, qui recouvre la porte menant à l’arrière-boutique.
"C’était un pape formidable, le pape de ma jeunesse. Pour nous, c’est comme s’il était romain, car il avait visité toutes les paroisses, tous les quartiers", se souvient Simona. "Il a témoigné de son amour pour les gens jusque dans sa maladie, jusqu’au dernier moment. Quand nous l’avions pu passer en voiture au retour de son dernier séjour à l'hôpital, nous avions senti que c’était un adieu. Mais même dans son dernier salut à la fenêtre, alors qu’il ne pouvait plus parler, nous sentions dans ses mouvements faciaux qu’il était proche de nous. C’était il y a vingt ans, mais je m’en souviens comme si c’était hier", confie la vendeuse, émue de raconter ce souvenir.
Le cardiologue miraculé
Croisée quelques mètres plus loin, sur la Via della Conciliazione, Donna Squillara, une Américaine d’origine italienne, est venue du New Jersey afin de servir comme bénévole pour le Jubilé 2025. Et c’est dans son lien avec Jean Paul II qu’elle a puisé sa motivation pour revenir à Rome, où son mari a vécu une guérison liée au pape polonais.
"Nous sommes venus en 2013 avec mon mari Antonio, qui souffrait d’hypertension", se souvient-elle. "En priant devant la tombe de Jean Paul II - qui se situait dans la crypte de la basilique Saint-Pierre, car il était alors bienheureux mais pas encore saint -, mon mari a ressenti un grand choc et s’est senti défaillir", raconte la volontaire. "J’ai dû le soutenir pour empêcher qu’il ne tombe. C’était totalement inattendu, mais nous avons senti l’Esprit saint venir sur lui. Cela a changé sa vie. Il était choqué et n’avait jamais rien ressenti de tel, mais il a eu tellement de chance ! Nous en parlons encore souvent. C’était une expérience incroyable", explique Donna.
Son mari, en parfaite santé désormais, est médecin cardiologue. Il n’a pas pu revenir à Rome cette fois-ci en raison de son agenda professionnel, mais il appelle régulièrement son épouse, éducatrice, venue "pour vivre ce moment d’espérance et de réconciliation", explique-t-elle, heureuse d’avoir pu participer à une messe, ce dimanche 30 mars, sur la tombe du saint pape polonais, "avec de très nombreux pèlerins venus honorer Jean Paul II".
Une « familiarité » avec les Romains
Don Stefano Cascio, curé de la paroisse Saint-Bonaventure, se souvient que Jean Paul II "a été un pape très présent dans le diocèse de Rome, et probablement le seul pontife à avoir visité presque toutes les paroisses" : plus de 300 d’entre elles firent en effet l’objet de visites pastorales officielles, toujours préparées minutieusement. "Quelques jours avant sa visite dans une paroisse, il recevait à sa table, au Vatican, le curé et les vicaires de la paroisse concernée, avec le cardinal-vicaire de Rome et l'évêque auxiliaire de la zone", raconte don Stefano, qui est entré au séminaire durant les dernières années du pontificat de Jean Paul II.
Sa propre paroisse, située dans un quartier difficile de la périphérie de Rome, fut l’une des premières visitées par Jean Paul II, dès le 1er avril 1979, alors que l’église était encore en construction. "Les franciscains qui avaient fondé notre paroisse étaient en conflit avec la municipalité communiste de l’époque, et ils avaient planté une croix sur le lieu du chantier le 6 mai 1978. Je crois que Jean Paul II y a vu un parallèle avec son propre combat pour la construction de l’église de Nowa Huta, quelques années auparavant, dans son diocèse de Cracovie", explique don Stefano Cascio.
Dans les couloirs de sa paroisse, des photos retracent ce souvenir de la visite de Jean Paul II dans cette église en chantier. "Presque toutes les paroisses romaines exposent des photos de Jean Paul II en visite dans ces églises. Cela constitue un lien vivant, qui montre la familiarité qu’il entretenait avec les Romains", explique don Stefano.
La fragilité comme "couronnement" de la prédication de Jean Paul II
Dans la libraire Paoline, proche du Vatican, les livres liés à Jean Paul II sont encore en tête de gondole. Si les doctorants en théologie se penchent plus facilement vers les écrits de Joseph Ratzinger, le grand public demeure attaché au pontife polonais. "Nous avons dans nos rayons toutes ses encycliques, ses textes majeurs, qui sont encore très recherchés", souligne sœur Alexandra, religieuse d’origine malgache, au service des clients francophones.
Elle aussi en service dans cette librairie, sœur Rita souligne que "Jean Paul II a été un grand pape qui a humanisé l’Église, qui a donné l’image d’une grande ouverture au monde et à l’homme dans son intégralité, avec cette attention aux jeunes et aux valeurs familiales". Toujours au travail à 78 ans, dont 58 ans de vie consacrée au sein de la congrégation des Filles de Saint Paul, la religieuse se souvient surtout que "dans sa maladie, Jean Paul II a montré comment un chrétien devait affronter ses limites humaines".
"Cela a renforcé son témoignage, car c’est facile de parler quand on va bien, mais quand nous sommes appelés à vivre dans la précarité, dans la faiblesse, la vérité sort. Ces moments de fragilité constituent le couronnement de la vie et de la prédication de Jean Paul II, comme c’est aussi le cas aussi aujourd’hui avec le pape François. Il y a une continuité et une cohérence", souligne-t-elle.