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[HOMÉLIE] L’espérance ne déçoit pas

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"La Samaritaine à la fontaine", de James Tissot.

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Erwan de Kermenguy - publié le 22/03/25
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Curé de la paroisse Notre-Dame de Tout Remède en pays de Landerneau, le père Erwan de Kermenguy commente les lectures du 3e dimanche de carême de l’année A, lues dans les paroisses où des adultes se préparent au baptême. L’homme a soif et Dieu seul peut étancher sa soif. Dans la vie, l’espérance ne déçoit pas, parce que le Christ nous sauve du péché, et c’est bien le sens du chemin vers le baptême

Carême 2025

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"L’espérance ne déçoit pas !" C’est le thème choisi par le pape François pour cette année jubilaire. C’est aussi ce que nous dit saint Paul, dans la deuxième lecture, tirée de l’épître aux Romains, lue dans beaucoup de paroisses de France où se vivent ce troisième dimanche de carême des "scrutins", étape importante pour les catéchumènes en vue de leur baptême à Pâques. "L’espérance ne déçoit pas" (Rm 5, 5), c’est ce que je voudrais dire tant à nos chers catéchumènes qu’à tous les fidèles rassemblés pour la messe.

L’espérance ne déçoit pas : Dieu, et lui seul, comble l’immense désir de l’humanité. L’espérance ne déçoit pas, parce que le Christ nous sauve du péché, et c’est bien le sens du chemin vers le baptême. L’espérance ne déçoit pas… c’est ce qui nous permet d’avancer dans le combat spirituel, car le baptême n’est pas le point final de la vie chrétienne, mais simplement le début. Il y aura des combats, que nous avons à mener dans l’espérance.

Dieu seul comble l’immense désir de l’humanité

Le monde ne suffit pas. Ce n’est pas seulement le titre d’un James Bond, c’est surtout l’expérience la plus ordinaire : rien sur terre ne suffit à combler le cœur humain. Gagner plus, toujours plus… ne rendra pas éternellement heureux. L’homme pressent qu’il a besoin de davantage, de quelque chose qui donnera du sens à sa vie. La soif des Hébreux dans le désert (Ex, 17) est à cet égard un exemple symbolique, une vérité théologique : l’homme a soif et Dieu seul peut étancher sa soif. Tant que nous n’avons pas trouvé l’eau vive, nous buvons des eaux qui ne désaltèrent pas ! Et de fait, nous voyons autour de nous se multiplier les quêtes spirituelles, qui prennent parfois des formes très surprenantes. C’est que Dieu seul peut combler le cœur de l’homme, parce qu’il nous a créés pour être aimés par Lui ; il nous a créés pour être dans une relation d’amour avec Lui. Il nous a créés pour nous adopter et faire de nous ses enfants bien-aimés — ce que nous devenons par le baptême.

Celui qui ne connaît pas Dieu va alors chercher des façons d’assouvir cette soif spirituelle. Nous le voyons dans l’évangile avec l’histoire de la montagne sur laquelle les Samaritains vont adorer (Jn 4, 20). À vrai dire, nous connaissons assez mal les Samaritains : au mieux, nous les confondons avec le magasin du même nom… au pire nous n’en connaissons rien. Au point de départ, ce sont des Juifs, héritiers de la promesse d’Abraham. Mais ils se sont écartés de la foi juive, lors des invasions païennes. Leur foi depuis un mélange (un syncrétisme) de différentes religions… ce qui nous permet de comprendre la question de la Samaritaine à Jésus : faut-il adorer sur cette montagne ou à Jérusalem ? Qui a raison : les Samaritains ou les Juifs ? Jésus tranche le problème ("le salut vient des Juifs" Jn, 4 22) mais s’en éloigne aussitôt : il est Lui, la Source Vive, celui qui permet d’adorer Dieu "en esprit et en vérité" (Jn 4, 23). Il est de notre responsabilité d’être témoins du Christ. Sinon, nos frères et sœurs continueront de boire une eau qui ne désaltère pas… voire de s’empoisonner en buvant des breuvages douteux ! Nous devons les conduire au Christ, qui sauve. C’est Lui notre espérance.

Le Christ, notre espérance, nous sauve du péché

L’espérance ne déçoit pas, écrit Paul aux Romains. Et il s’en explique en ajoutant : "le Christ est mort pour les impies que nous étions […] ; la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous alors que nous étions encore pécheurs" (Rm 5, 6-8). C’est absolument inouï ! Dieu nous aime au point de mourir pour nous, pécheurs. C’est l’expérience que fait la Samaritaine dans sa rencontre avec l’homme de Dieu, Jésus, ce prophète juif qu’elle rencontre au bord du puits. Un homme de Dieu ose venir à elle, en sachant tout ce qu’elle a fait.

Lorsqu’elle rencontre le Christ, elle découvre enfin le véritable amour. Elle découvre l’amour fait chair, celui qui est le véritable époux.

Or qu’a-t-elle fait ? Elle a eu une vie amoureuse volage. Elle en est à son cinquième compagnon… Quel est le péché dans cette affaire ? Aimer c’est une chose bonne et l’amour humain est bon. Mais cet amour, elle l’a brisé à cinq reprises, pour trouver mieux, pour trouver un autre, plus à l’écoute, plus aimable, plus attirant, plus délicat, que sais-je. Elle a cherché l’amour, mais elle a trop peu aimé. Elle n’a pas non plus eu confiance dans l’amour. Elle n’a pas eu confiance dans la capacité de l’amour à guérir les blessures. Elle n’a pas eu confiance dans l’amour éternel du Dieu d’Abraham, du Dieu de Jacob, l’ancêtre qui a creusé le puits où elle vient boire et qui lui enseigne la fidélité envers et contre tout. Elle désirait être aimée et elle ne s’est pas laissée aimer. Et lorsqu’elle rencontre le Christ, elle découvre enfin le véritable amour. Elle découvre l’amour fait chair, celui qui est le véritable époux.

L’espérance dans le combat spirituel

Cette rencontre, nos frères et sœurs catéchumènes l’ont faite. Dieu les aime. Dieu est venu frapper à la porte de leurs cœurs blessés par le péché et il leur a révélé sa sainteté. Sur le chemin vers le baptême, nous demandons à Dieu de les purifier de tout péché par son amour. Et nous aussi, frères et sœurs baptisés, nous demandons à Dieu, plus instamment en ce temps du carême, d’être relevés du péché, notamment par le sacrement de la réconciliation. Je souligne au passage que le pardon est rendu possible par le dialogue confiant et la vérité. Le Christ va nommer à la Samaritaine son péché. Elle va reconnaître sa faute. N’ayons pas peur de parler de notre péché dans la confession : c’est ce dialogue en vérité qui ouvre notre cœur à la grâce de Dieu.

Une fois baptisé, le chemin ne s’arrête pas. Notre liberté humaine a besoin de s’ajuster, tout au long de notre vie, à la liberté divine, pour que notre amour puisse répondre à son amour. Et cela passe par des combats. Cela passe par des déserts… comme le peuple d’Israël dans le livre de l’Exode, alors qu’il est déjà passé par l’eau, qui préfigure le baptême, se trouve à cheminer dans le désert, qui préfigure notre carême. Pour adorer Dieu en esprit et en vérité, il nous faut, année après année, vivre ce chemin qui nous rapproche de Dieu, comme une vis s’enfonce plus profondément dans le bois tour après tour. Ce combat pourrait être désespérant. Et à vrai dire, c’est une tentation bien réelle. Autour de nous, de nombreux chrétiens pourraient témoigner avoir été tenté par le désespoir dans leur chemin de foi. C’est l’épreuve que l’on appelle souvent le "second oui". Après avoir dit oui à Dieu une première fois, par le baptême, ou par un engagement adulte dans l’Église, voilà qu’un second oui est nécessaire.

Le temps de la mémoire

C’est la tentation parfois de l’acédie, ce péché de l’âge mûr. C’est la tentation de l’à-quoi-bon ? Quand plus rien ne semble avoir de sens. Quand on s’éloigne, insensiblement de Dieu. Alors, il nous faut revenir à notre rencontre avec Dieu. Comme le peuple dans le désert, qui semble avoir oublié tout ce que Dieu a fait pour lui.

Tous les baptisés ont besoin de ce temps de la mémoire. Faire mémoire de l’œuvre de Dieu dans notre vie et dans la vie de l’Église vient nourrir notre espérance. On s’appuie sur le passé pour aller vers l’avenir. C’est le chemin auquel nous invite l’épître aux Romains : Dieu nous aime, puisqu’il a donné sa vie pour nous. Donc nous pouvons avancer avec confiance. Oui, l’espérance ne déçoit pas ! Avançons avec espérance vers Pâques, vers le baptême, au cœur de notre année jubilaire.

Pratique

Lectures du 3e dimanche de carême :
Année C : Ex 3, 1-8a.10.13-15 ; Ps 102 ; 1Co 10, 1-6.10-12 ; Lc 13, 1-9
Année A (dans les paroisses où des adultes se préparent au baptême) : Ex 17, 3-7 ; Ps 94 ; Rm 5, 1-2.5-8 ; Jn 4, 5-42
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