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Les trois dimensions de la synodalité qui expliquent la structure fondamentale de l’Église

Pope Francis leads a mass on the opening day of the 16th Ordinary General Assembly of the Synod of Bishops 2023

Messe de lancement du Synode, 4 octobre 2023.

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Hyacinthe Destivelle - publié le 17/03/25
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Le pape François a décidé de lancer une phase inédite d’évaluation de la mise en œuvre du Synode sur la synodalité. Le théologien dominicain Hyacinthe Destivelle revient sur les trois dimensions de la synodalité qui font comprendre la structure fondamentale de l’Église et l’unité des chrétiens. Dans son essai "Un, Tous, Quelques-uns" (Cerf), il montre en quoi l’Église se fonde sur l'application dynamique de trois principes : "communautaire", "collégial" et "personnel".

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La synodalité restera sans aucun doute comme l’une des clés principales du pontificat du pape François. Celui-ci n’hésitait d’ailleurs pas à déclarer dès 2015 que la synodalité est "le chemin que Dieu attend de l’Église au troisième millénaire". Mettant cette conviction en application, le processus synodal de consultation de l’ensemble du Peuple de Dieu au cours des années 2021-2024 n’a pas d’équivalent dans l’histoire de l’Église. Ce "synode sur la synodalité" aurait d’ailleurs pu s’intituler aussi bien "synode sur l’Église". En cette année 2025, le 1.700e anniversaire du concile de Nicée, qui inaugura la synodalité au niveau universel, est aussi l’occasion de réfléchir à ce que signifie et implique la "synodalité".

Un terme mal compris

Ce terme demeure mal compris. On l’a longtemps assimilé à la "collégialité" épiscopale promue par le concile Vatican II en complément de l’enseignement de Vatican I sur la primauté. On le confond souvent aussi avec la dimension "communautaire" de l’Église fondée sur le sensus fidei de tous les fidèles en vertu de leur baptême. En termes politiques, la synodalité serait en quelque sorte la version ecclésiale de la démocratie. Ainsi comprise, la synodalité constituerait un contrepoids à la primauté, voire à la collégialité. Une telle approche risque rapidement d’aboutir à une vision dialectique des rapports entre les différents membres du corps ecclésial.

En réalité, si la synodalité dépasse le "quelques-uns" de la collégialité, elle est aussi plus large que le "tous" de la dimension communautaire, et elle inclut également le "un seul" du ministère primatial. Elle est une dynamique articulant trois dimensions essentielles de la vie de l’Église : collégiale, communautaire et personnelle. C’est précisément cette vision large de la synodalité que promeut le pape François, qui a affirmé en 2021 que "la synodalité dans l’Église catholique, au sens large, peut être comprise comme l’articulation de trois dimensions : "tous, quelques-uns et un" ", tout en précisant que, "dans cette vision, le ministère primatial est intrinsèque à la dynamique synodale, tout comme l'est l'aspect communautaire qui inclut tout le peuple de Dieu et la dimension collégiale relative à l'exercice du ministère épiscopal".

La structure fondamentale de l’Église

Le document final du Synode sur la synodalité en 2024 a repris cette compréhension en affirmant que la synodalité "articule de façon symphonique les dimensions communautaire ("tous"), collégiale ("quelques-uns") et personnelle ("un") de chaque Église locale et de l'Église entière". Dans cette perspective, "le ministère pétrinien est inhérent à la dynamique synodale, de même que l'aspect communautaire, qui inclut tout le Peuple de Dieu, et la dimension collégiale du ministère épiscopal".

 Si l’articulation entre "un", "tous", et "quelques-uns" caractérise la synodalité, c’est parce qu’elle est une structure fondamentale de l’Église. Elle parcourt tout le Nouveau Testament : parmi ses disciples (tous), Jésus choisit les Douze (quelques-uns), au sein desquels il distingue Pierre (un seul). Dans les Actes des Apôtres, lorsque la défection de Judas oblige à compléter le groupe des Douze, Pierre ne s’appuie pas sur sa seule autorité ni même sur celle des dix autres membres du collège, mais il s’adresse en personne (un seul) à l’assemblée des frères (tous), qui proposent deux candidats parmi lesquels on tire au sort, pour que la décision revienne à Dieu. Cette articulation du "un", "tous", "quelques-uns" structure aussi la liturgie de l’Église, et notamment l’Eucharistie, comme l’explique le document final du récent synode : "Sous la présidence d’un seul et grâce au ministère de quelques-uns, tous peuvent participer à la double table de la Parole et du Pain."

Une vision dynamique et circulaire

C’est grâce au mouvement œcuménique que ce triple ordonnancement de l’Église a été mis en lumière. Lors de sa première réunion à Lausanne en 1927, la commission Foi et Constitution (Faith and Order) — l’une des principales commissions du mouvement œcuménique — relevait que dans la constitution de l’Église primitive, on retrouvait toujours, au niveau local, "la charge épiscopale, les conseils d’anciens et la communauté des fidèles". La commission affirmait que ces trois systèmes d’organisation ecclésiale (qu’elle appelait "épiscopalisme", "presbytérianisme", "congrégationalisme") devraient prendre simultanément leur place dans l’organisation de l’Église réunie. 

Dans l’Église catholique, ces trois dimensions ont été diversement accentuées au fil de l’histoire. Vatican I a promu la dimension personnelle en définissant les dogmes de la primauté de juridiction et de l’infaillibilité papale. Le concile Vatican II a complété cet enseignement en valorisant la collégialité épiscopale sur le fondement de la nature sacramentelle de l’épiscopat. Dans un nouveau développement, l’actuel pontificat approfondit la dimension communautaire de l’Église fondée sur le sensus fidei de tous les fidèles en vertu de leur baptême. Mais il faut toujours articuler cette dimension communautaire avec les deux autres, collégiale et personnelle, dans une vision dynamique et circulaire de la synodalité.

Afin que le monde croie

"Un", "tous", "quelques-uns" : trois dimensions constitutives de l’Église que la synodalité cherche à mieux articuler par des processus d’écoute, de dialogue et de discernement, pour une meilleure mission. Trois principes qui sont aussi trois dimensions de l’Église une, "afin que le monde croie" (Jn 17, 21). 

Pratique

Hyacinthe Destivelle, Un, tous, quelques-uns : Dynamique synodale et unité des chrétiens, Cerf, coll. "Unam sanctam", 2025, 296 pages, 29€
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