Campagne de Carême 2025
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Ce remède est si empreint de bon sens que c’est celui dont on se souvient le mieux en général. Qui ne s’est jamais endormi triste et réveillé consolé le lendemain matin ? Qui ne s’est jamais senti soulagé après un bon bain chaud ? Saint Thomas explique ce phénomène par deux raisons.
Rétablir la motion vitale
La première raison est proprement physiologique. Selon l’Aquinate, qui hérite de la biologie de son temps, la vie humaine consiste en un mouvement qui part du cœur et qui se diffuse dans les membres : il parle de « motion vitale ». Par ailleurs, toute passion ou émotion est un mouvement de l’âme qui s’accompagne d’une modification corporelle qui lui est proportionnelle. Cette modification corporelle va parfois dans le sens de la motion vitale et parfois s’y oppose.
Lorsque nous éprouvons des passions comme l’amour, le désir ou la joie, notre cœur s’accélère ou s’enflamme. La modification corporelle va dans le sens de la motion vitale. Ces passions sont bénéfiques à notre corps (sauf évidemment quand elles sont excessives !). En revanche, lorsque nous éprouvons des passions comme la crainte, le désespoir ou la tristesse, notre cœur ralentit (plus encore pour la tristesse, car le mal redouté est présent et non futur). La modification corporelle s’oppose à la motion vitale. Ces passions sont nuisibles à notre corps. C’est pourquoi nous ressentons un certain accablement physique.
Le cinquième remède à la tristesse vise précisément à rétablir la motion vitale dans son état naturel. C’est ce que font le sommeil et les bains. Ils ont un effet d’abord sur le corps puis par rejaillissement sur le cœur qui va pouvoir peu à peu retrouver son activité naturelle.
La délectation
Vous vous doutez certainement de la seconde raison, qui renvoie comme dans les cas précédents au premier remède à la tristesse. Lorsque notre corps se retrouve dans son état normal, nous éprouvons naturellement de la délectation. Lorsque nous avons froid et que nous nous mettons près du feu, notre corps se réchauffe et nous éprouvons de la délectation. Lorsque nous avons soif et que nous buvons de l’eau, notre corps s’hydrate et nous éprouvons de la délectation. Ainsi en va-t-il avec la tristesse : lorsque nous sommes tristes et que nous dormons ou bien que nous prenons un bain, notre corps retrouve sa motion vitale et nous éprouvons de la délectation.
Comme toute délectation chasse la tristesse, la délectation du sommeil et des bains chasse notre tristesse. Saint Thomas pousse un peu la réflexion. Comment se fait-il que des remèdes opposés - comme le sommeil et les bains sont opposés à la contemplation de la vérité - puissent avoir le même effet ? Toute délectation atténue la tristesse. Deux délectations, même si elles sont opposées, atténuent la tristesse. En d’autres termes, il est difficile de contempler la vérité quand on dort (ou quand on prend un bain), et pourtant l’un comme l’autre chasse la tristesse. On ne peut pas faire les deux en même temps, mais pourquoi ne pas essayer l’un après l’autre ? Commencer par bien dormir, par exemple, et ensuite ouvrir la Bible.
Un esprit sain dans un corps sain
Nous avons un exemple concret ici de la manière dont le corps et l’âme sont unis. « Un esprit sain dans un corps sain » dit-on à juste titre. Parfois le meilleur moyen de soigner la tristesse de l’âme sera de prendre soin du corps : de dormir ou prendre un bain. Dormir, cela implique par exemple d’aller se coucher plus tôt, de s’offrir une grasse matinée ou bien une sieste. Outre le fait de passer un bon moment dans sa baignoire, prendre un bain peut aussi s’entendre d’autres manières : aller se baigner à la piscine ou en mer, prendre un bain de pieds dans un cours d’eau, etc. Une bonne douche chaude peut aussi bien faire l’affaire !
On pourrait ajouter d’autres choses qui font du bien au corps : aller marcher, se faire masser, améliorer son alimentation, etc. Certains prétendent que saint Thomas aurait mentionné dans ce cinquième remède non seulement le sommeil et les bains, mais aussi un verre de vin. Je n’ai jamais trouvé cela dans la Somme de théologie, mais je ne doute pas qu’il aurait approuvé l’idée ! Qui a dit que la théologie n’était pas concrète ?
Pratique