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Jésus a-t-il voulu une Église hiérarchique ? Des élections dans l’Église sont-elles nécessaires pour que le peuple participe au pouvoir ? Quelle différence entre synode et démocratie ? Quelles sont les origines du patriarcat dans l’Église ? Faut-il être un ministre ordonné, et un homme, pour exercer un pouvoir dans l’Église ? Toutes ces questions sont au cœur de l’actualité, surtout depuis l’élection du pape François, qui a manifesté clairement son souci de réformer l’exercice du pouvoir dans l’Église. Ces cinq dernières années, cette volonté s’est concrétisée sur deux dossiers en particulier. D’abord, la place des femmes. Après leur avoir ouvert les ministères liturgiques de lecteur et d’acolyte, et relancé la commission de réflexion sur le diaconat féminin, le pape François a nommé en 2025 deux femmes à des postes supérieurs de responsabilité : gouverneur du Vatican, et préfet du dicastère en charge des Instituts religieux et de Vie consacrée.
Une institution fondée en dehors d’elle-même
Deuxième dossier : la participation de tous au pouvoir. La Constitution qui réforme la Curie, publiée en 2022, prévoit explicitement une plus grande place pour des laïcs en responsabilité. Surtout, le pape François a réuni deux sessions du synode des évêques sur la synodalité, avec l’objectif d’une meilleure participation du Peuple de Dieu à l’exercice du pouvoir dans l’Église. Permettre et encourager la participation de tous au pouvoir, serait-ce rendre l’Église plus démocratique ?
La première réponse est non. L’Église n’est pas une démocratie, et voilà pourquoi : certes, elle est une société humaine, avec ses membres plus ou moins actifs, sa hiérarchie, et ses institutions traversées par des péchés parfois structurels. Mais celui qui la regarde avec les yeux de la foi complète cette définition en voyant malgré tout dans l’Église une institution divine, c’est-à-dire voulue par son fondateur, Jésus-Christ, et soutenue par l’Esprit saint, pour en faire l’instrument du salut pour tous les hommes.
La démocratie, elle, désigne un régime politique dans lequel un gouvernement représente le peuple, qui le délègue et le contrôle. Une démocratie, donc, détermine elle-même ses valeurs par la libre discussion dans le débat : elle est construite sur l’équilibre des intérêts de ses membres. L’Église, en revanche, se reçoit d’une Parole fondatrice, d’une Révélation, qui est le Christ, et ne se structure qu’en fonction de cette Parole qu’elle a la mission de préserver et de répandre. Elle est donc une institution fondée en dehors d’elle-même, alors que la démocratie se fonde sur des principes qu’elle se donne à elle-même. En ce sens, le régime de l’Église reste structurellement non démocratique.
Un contrôle d’en haut et d’en bas
Mais cette première réponse n’est pas suffisante. Il faut redire que la vie de l’Église s’est construite sur les principes démocratiques que sont l’égalité fondamentale de tous, la participation commune à la mission, le droit à une expression publique des opinions, entre autres. Les élections sont fréquentes dans la vie de l’Église, qui a participé à la formation des démocraties libérales contemporaines. Ainsi, l’enjeu d’un synode sur la synodalité peut être compris comme celui de maintenir ou de promouvoir dans l’Église des fonctionnements de type démocratique, au sens où tous les chrétiens sont impliqués dans le gouvernement et la décision, sans pour autant entrer dans une logique d’autodétermination par la libre discussion.
Le pouvoir dans l’Église gagne toujours à être contrôlé d’en haut et d’en bas. Un pouvoir contrôlé d’en haut, c’est-à-dire exercé comme l’exige la Révélation : l’Écriture, en particulier les Évangiles, est une boussole très explicite sur l’exercice du pouvoir, compris comme un service désintéressé, à la manière de Jésus. Un pouvoir contrôlé d’en bas, c’est-à-dire par l’immense majorité des membres de l’Église que sont les baptisés : le fait que l’Église ne soit pas un ensemble d’individus porteurs chacun d’une volonté autonome, mais une unité rassemblant tous ses membres en un seul corps, ne doit pas empêcher que le fonctionnement du pouvoir en son sein soit contrôlé par ces membres. La mise en place de contre-pouvoirs, de mécanismes où les clercs rendent compte de leur ministère (notamment les prêtres, les évêques et, pourquoi pas, le Pape), un renforcement des instances consultatives et même délibératives : tout ceci est aujourd’hui nécessaire.
Une délicate ligne de crête
En somme, des instances démocratiques dans l’Église sont souhaitables, et même à développer, tout en restant soumis à la Révélation sur laquelle doit se construire le Corps du Christ, et sous le contrôle du Peuple de Dieu qui a reçu la promesse de l’assistance de l’Esprit saint. L’Église doit tenir cette délicate, et parfois désagréable, ligne de crête : être à la fois ouverte à l’Esprit qui parle à travers les aspirations de ses membres, et obéissante à la mission reçue du Christ. À une question de départ plutôt simple, la réponse est évidemment complexe… Sur des sujets aussi importants que celui de la réforme du pouvoir dans l’Église, il est pourtant fondamental de chercher ce que l’histoire et la théologie peuvent en dire.
Pratique :


