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"Un modèle pour la politique italienne et européenne", c’est ainsi que le cardinal Baldassare Reina, vicaire du diocèse de Rome, a décrit Alcide De Gasperi (1881-1954), lors de la cérémonie de clôture de l’enquête diocésaine sur la vie et les vertus héroïques de l’ancien président du Conseil des ministres italien ce 28 février 2025. Figure centrale de l’après-guerre en Italie et pionnier de la construction européenne, Alcide De Gasperi pourrait prochainement devenir vénérable, ultime étape avant la béatification puis la canonisation.
La cérémonie solennelle de clôture de la phase d’enquête diocésaine de la cause en béatification d’Alcide De Gasperi s’est déroulée en présence d’une trentaine de personnes rassemblées dans la Salle des Pontifes, au sein du Palais du Vicariat. Elle a été présidée par le cardinal vicaire Baldassare Reina en présence du doyen du collège cardinalice, le cardinal Giovanni Battista Re, grand admirateur du démocrate chrétien. Dans le discours lu pour l’occasion, le cardinal Reina a souligné l’importance de cette figure historique qui fut un adversaire de Benito Mussolini pendant la période fasciste, et devint ensuite le président du conseil des ministres de 1946 à 1953, jouant un rôle clé dans la reconstruction de l’Italie d’après-guerre.
Le cardinal a aussi mis en avant la vision "inclusive et tournée vers l’avenir" de celui qui est aujourd’hui considéré comme un des ‘pères de l’Europe’ politique. "Notre époque exige que nous unissions les Européens et que nous ne les maintenions pas séparés. Nous ne coalisons pas les États, nous unissons des hommes", avait déclaré Jean Monnet en avril 1952 dans un discours prononcé à Washington intitulé Une Europe fédérée. Jean Monnet et Alcide de Gasperi, Robert Schuman, Konrad Adenauer, Joseph Bech, Johan Willem Beyen et Paul-Henri Spaak font partie des Pères fondateurs de l’Union européenne. Inlassables bâtisseurs, ils ont joué un rôle central dans la mise en place de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) en 1951 et de la Communauté économique européenne (CEE) en 1957, deux institutions précurseurs de l’Union européenne.
Un homme à la "foi granitique"
"À un moment de l’histoire où l’on a besoin de leaders crédibles et cohérents, la figure du Serviteur de Dieu De Gasperi apparaît comme un modèle actuel, capable d’offrir des leçons valables pour les personnes engagées dans la politique et le travail social", a encore affirmé le cardinal originaire de Sicile. Insistant sur l’actuelle "crise de la représentation politique", il a donné la "méthode De Gasperi" comme un antidote adapté pour une "époque marquée par la polarisation et le populisme".
Le cardinal a aussi rappelé la relation d’amitié qui unissait Alcide De Gasperi au cardinal Angelo Roncalli, futur Jean XXIII. Il n’a en revanche pas évoqué les liens unissant De Gasperi à Pie XII : ils furent très proches jusqu’en 1952, année durant laquelle le Vatican tenta de forcer la Démocratie chrétienne à des compromissions pour empêcher l’élection d’un maire socialiste à Rome. Le refus net opposé par De Gasperi fut très mal accueilli par le pontife, qui refusa de le recevoir par la suite. Cet épisode blessa beaucoup De Gasperi, qui de son vivant était reconnu comme un homme très pieux et d’une grande intégrité morale. Le cardinal Reina a d’ailleurs rendu hommage à la "profonde spiritualité" qui nourrissait sa vision chrétienne de la vie et du service public, évoquant une "foi granitique".
Plus de 22.000 documents
Initialement ouverte en 1993 dans le diocèse de Trente, dont est originaire Alcide De Gasperi, sa cause en béatification a finalement été transférée à Rome afin de faciliter les travaux de recherche sur la vie de l’ancien président du Conseil des ministres. La phase d’enquête historique sur les vertus héroïques de l’homme politique a commencé en 2022 avec l’accord du dicastère pour les Causes des saints.
En tout, plus de 22.000 documents ont été recueillis par une équipe d’historiens, le fruit de leurs recherches ayant été rassemblé dans 23 boîtes qui ont été officiellement scellées lors de la cérémonie de clôture. Elles ont ensuite été acheminées auprès du dicastère pour les Causes des saints. C’est cette entité qui a autorité pour reconnaître, avec l’accord du pape, l’héroïcité des vertus de l’homme politique, le déclarant ainsi "vénérable", dernière étape avant la béatification.